Sa chimiothérapie a débuté fin mai pour 9 mois, elle passera le bac en septembre et prévoit déjà « une année sabbatique ». « Pas le choix », dit la jeune fille. Au centre anti-cancer de Lyon, la lutte contre le « risque de l’isolement social » des 15-25 ans est devenue un enjeu majeur.
Photo AFP
La patiente de 19 ans, qui conservera l’anonymat, est allongée pour sa perfusion, une peluche et un ordinateur « pour réviser la philo » à ses côtés. Toutes les deux semaines, elle quitte le Puy-en-Velay pour des cures de 3 à 6 jours.
Les cursus étudiants démarrant à la rentrée, elle se voit dans l’obligation de tirer un trait sur son année universitaire.
A l’Institut d’hématologie et d’oncologie pédiatrique (IHOP) de Lyon, où sont traités les malades jusqu’à 18-20 ans, Perrine Marec-Bérard, pédiatre cancérologue, a en tête nombre d’entre eux qui ont décroché après un cancer et se sont retrouvés « dans un isolement social complet« .
« Jusqu’au bac, l’Education nationale intervient à l’hôpital pour des cours, mais après, personne ne vient les chercher », a-t-elle constaté, évoquant un « gâchis » alors que 70% guérissent.
La pédiatre cite aussi le cas de « ce jeune passionné de musique qui a eu la main amputée », à qui il a fallu montrer une autre voie.
Pour éviter l’écueil de la marginalisation, le Dr Marec-Bérard a engagé « un travail sur la réinsertion et quand nécessaire sur la réorientation scolaire et professionnelle », qui s’adresse aussi aux jeunes patients du centre Léon Bérard voisin, où sont pris en charge les adultes.
Permanences de spécialistes sur la recherche d’emploi ou les droits des malades, « coaching étudiant », interventions de chefs d’entreprise retraités, les actions ne manquent pas, en ligne avec les objectifs du plan cancer 2009-2013.
Parmi ceux-ci figurait l’acquisition pour les adolescents et jeunes adultes « de l’autonomie et de l’estime de soi en dépit des conséquences physiques, psychologiques et sociales de la maladie à cet âge », alors que des associations de patients s’en inquiétaient depuis deux décennies.
Grâce au programme conjoint à l’IHOP et au centre Léon Bérard, qui suivent au total quelque 200 jeunes gens par an, une infirmière coordinatrice, une assistante sociale et un psychologue ont été recrutés.
« Le cancer et les traitements provoquent une régression antinomique avec cette période de la vie », observe le psychologue, Jérémy Moreau.
A la disposition des malades, « dans une énorme détresse », et de leurs familles, il travaille sur des problématiques courantes dans cette tranche d’âge comme « les croyances sur les médicaments, leur mauvaise prise » ou la non-expression de la douleur qui s’explique « par la peur d’une restriction des activités », souligne-t-il.
Pour éviter le repli sur soi, l’IHOP avait déjà inauguré il y a quatre ans un « espace de vie » interdit aux moins de 12 ans mais ouvert aux amis, petits amis, parfois conjoints, et a multiplié des ateliers musique, photo ou encore mode.
Son nouveau projet a été retenu début 2012 par l’Institut national du cancer, avec sept autres en France, et est financé pour deux ans à hauteur de 140.000 euros annuels.
Emmanuelle, 22 ans, foulard sur la tête, se rend au centre, comme presque tous les jours depuis deux ans, luttant contre des métastases au cerveau. Elle qui rêvait de travailler dans l’audiovisuel espère désormais « juste (sa) licence », qu’elle va tenter pour la troisième fois de décrocher, et bien sûr « guérir ».
Le dispositif lyonnais va aussi développer l’expertise et la recherche sur les quatre types de cancers des 15-25 ans, sarcomes (touchant les tissus), tumeurs cérébrales, germinales (organes génitaux) et leucémies.
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