Etudier l'origine d'émission des mails envoyés par les internautes permet d'analyser plus précisément les flux migratoires.
Les courriels pourraient-ils représenter un nouvel outil d'analyse de la migration mondiale à la
fois plus fiable et plus neutre ? Voilà ce que soutient Emilio Zagheni, chercheur pour l'Institut
de recherches démographiques Max Planck en Allemagne. Celui-ci a eu l'idée d'analyser
l'origine des e-mails de plus de 43 millions d'internautes pour comprendre le fonctionnement
des flux migratoires. Mais surtout pour pallier les difficultés relatives à la collecte de données
sur l’immigration. Car, en effet, le rapport rappelle que de telles données sont difficilement
quantifiables du fait d'une caractérisation du phénomène différente d'un pays à un autre, des
délais administratifs également différents, et du taux d'entrées illégales.
En analysant les adresses IP des individus
Pour cela, le chercheur s'est associé au centre de recherche Yahoo! Research qui a mis à sa
disposition les courriers électroniques anonymes de pas moins de 43 millions d'internautes.
Celui-ci a alors analysé les données géographiques issues de l'adresse IP des utilisateurs
sur la période d'octobre 2009 à juin 2011. Et cela, en estimant qu'il existait une preuve de
migration si une majorité d'e-mails provenait d'un même pays sur la période d'octobre 2009 à
juin 2010, et que sur la période de juillet 2010 à juin 2011, une majorité d'e-mails provenait
cette fois d'un autre pays. Il a également incorporé à l'étude les informations personnelles des
utilisateurs Yahoo! Afin de déterminer quels étaient leur sexe et âge. A ces résultats, il a enfin
comparé les chiffres officiels de la migration produits par l'office européen des statistiques,
Eurostat. En ressort des résultats particulièrement proches de ceux existant, validant ainsi
l'approche d'Emilio Zagheni.
Pour pallier des manques de données
Et l'auteur se targue, en plus de la validation de son concept, de la possibilité de voir
émerger via les mails des données migratoires encore peu analysées jusqu'à présent. Et c'est
particulièrement le cas pour les États-Unis, Emilio Zagheni expliquant que "la majorité des
instituts statistiques s'intéressent à l'immigration plutôt qu'à l'émigration", mettant ainsi
un frein à l'analyse de la "fuite des cerveaux" par exemple. Un manque de données donc
qui pourrait être rétabli par ce système d'analyse des courriels. Surtout lorsque celui-ci est
combiné au taux de pénétration d'Internet en fonction de l'âge et du sexe proposé par la base
de données statistiques de l'UNECE. "Ce qui pourrait représenter un véritable atout pour
les pays en voie de développement, où Internet se développe beaucoup plus vite que les
recensements", conclut l'auteur.