Lundi et mardi, le gouvernement a donc organisé le premier « Grenelle » social depuis plus d'une décennie. Sarkozy aimait les sommets d'urgence, Hollande avait promis de la concertation. De cette rencontre, il est ressorti quelques bonnes idées, et des absences. Le Medef a failli claquer la porte, les syndicats de salariés étaient satisfaits.
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Le financement de la protection
sociale sera la priorité de l'année, déficits obligent. Sarkozy
préférait une hausse générale d'une TVA pourtant des plus
élevées en Europe. Une mesure qui frapperait le porte-monnaie des
plus fragiles, tout en épargnant les revenus du capital et du
patrimoine. La CSG devrait augmenter, mais pour 2013. La CFDT y est favorable. La
CGT y est hostile. Ayrault ne l'a pas confirmée. La CSG a l'avantage
d'être un impôt qui frappe tous les revenus (capital, foncier), et non seulement le
travail.
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Une nouvelle réforme des
retraites est prévue pour 2013. On savait que Nicolas Sarkozy
n'avait rien sauvé, tout juste donné un peu de répit au prix de
beaucoup d'injustice. En 2010 déjà, une révision à court terme
était inévitable. La réforme Sarkozy reposait sur des hypothèses
de croissance et d'emploi farfelus. Nous étions et sommes toujours
en pleine crise. Et la réforme Sarkozy faisait l'impasse sur une quinzaine de milliards d'euros par an. Le patron de FO anticipe un joli conflit: « Je dis tout de suite : dossier rock and roll. (...) On ne peut
pas dire que le consensus existe. Il n'existait pas avant je ne vois pas
pourquoi il existerait demain. »
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La loi sur la rémunération des
patrons, peut-être sur le modèle américain « say on pay »
(qui impose de faire voter la rémunération des dirigeants en AG
d'actionnaires) sera proposée en octobre. D'ores et déjà, une vingtaine de dirigeants d'entreprises publiques, mandataires sociaux, ont vu leur traitement fixe et variable se réduire au plafond de 20 fois les plus basses rémunérations de leurs entreprises. Dans son discours de clôture, Ayrault a évoqué la présence des représentants des salariés dans les
comités de rémunération des entreprises... Fichtre ! Une révolution....
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Le chantage « emploi
contre salaires » n'est plus l'ordre du jour, a promis
Jean-Marc Ayrault. Les sarkozystes (et quelques autres) appelaient
cela « les accords compétitivité/emploi »: « baisse ton salaire sinon j'te vire». En septembre, le
gouvernement proposera un document d'orientation sur la
« sécurisation de l'emploi » pour que les partenaires
sociaux négocient un accord d'ici le premier trimestre 2013. Au
menu, lutte contre la précarité, bilan du chômage partiel,
sécurisation des licenciements collectifs, encadrement des licenciements « abusifs », obligation de recherche d'un
repreneur, accord sur le travail des handicapés.
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Lors de cette conférence, on a promis beaucoup de négociations. C'est la limite de l'exercice. Si Hollande avait annoncé des mesures
immédiates, on l'aurait accusé de fausser la concertation. Il « concerte », et donc on l'accuse de ne pas décider. L'année sera donc sociale avec au menu :
- l'égalité hommes/femmes (la loi Sarkozy/Bertrand promettait des sanctions bien légères) et les conditions de travail; en particulier, le temps partiel subi (fixer une durée minimale pour les temps partiels ?); la parité dans les instances du personnel; et une refonte du congé parental pour y inclure un volet formation (« Si le congé parental a été dans l'histoire une avancée, il est pris à 98% par les femmes, ce qui finit par constituer une trappe à inactivité», a jugé Najat Vallaud-Belkacem.)
- le contrat de génération (en septembre): exonération de charges sociales pour l'embauche en CDI d'un jeune de moins de 30 ans placé sous le tutorat d'un senior de plus de 55 ans;
- la régionalisation des fonds de formation;
- la politique salariale et des carrières au sein de la fonction publique (la RGPP est enterrée);
- les modalités d'indexation du SMIC sur la croissance
Laurent Wauquiez et Xavier Bertrand (UMP) taclèrent les projets non annoncés de hausse de la CSG: «Une augmentation de la CSG, pour moi, c'est criminel» a déclaré le premier. Rappelons que la seule hausse de 1,6 point de TVA prévue par Sarkozy (et annulée par Hollande) représentait 11 milliards d'euros de prélèvements sur les consommateurs - retraités, salariés, etc. C'est le même rendement que la hausse d'un point de CSG, mais qui, pour le coup, ne concerne pas que les revenus des salariés mais aussi ceux du capital et du foncier. Les cris d'orfraie UMPistes sur le thème du pouvoir d'achat sont particulièrement mal placés ! A gauche, une bonne dose de pédagogie sera nécessaire.
Au Medef, Laurence Parisot, qui pourtant semblait accepter la démarche d'ensemble, eut un « coup de sang ». Elle était furax des projets gouvernementaux en matière de rémunération des patrons...
Chassez le naturel...