La voiture connectée peaufine son éventail de services
Les constructeurs automobiles sont de plus en plus nombreux à proposer des interfaces connectées : Ford va sortir son interface SYNC avec la B-Max, BMW le ConnectedDrive, Peugeot son Connect Apps dans la 208, Renault le R-Link, etc. Pourquoi cet engouement ? Qu’est-ce qui fait partie de l’effet de mode et qu’est-ce qui va vraiment s’imposer ?
L'Atelier numérique (à écouter ici) recevait récemment pour en parler Philippe GICQUEL, responsable connectivité télématique et infotainment chez PSA Peugeot Citroën, et Laurent MEILLAUD, journaliste, écrivain et consultant spécialisé dans l’automobile et les nouvelles technologies. Extraits.
L'Atelier : Qu’est-ce qui explique cet engouement soudain pour la voiture connectée ?
Philippe GICQUEL :Nos consommateurs, nos clients, sont aussi des consommateurs, des consumer electronics, et à ce titre, ils souhaitent retrouver dans leur voiture ce qu’ils ont dans leur environnement de tous les jours. Aujourd’hui ils vivent dans un monde connecté et ils ne comprennent pas forcément bien pourquoi ils ne vivraient pas cela aussi dans leur voiture.
Laurent MEILLAUD : En effet, les applications sont désormais très populaires pour les utilisateurs de SmartPhone et beaucoup d’entre elles concernent l’automobile, que ce soit le trafic, des services géolocalisés. Donc effectivement le plus simple c’est de retrouver à bord de la voiture son univers.
L'Atelier : Il y a déjà énormément d’applications qui concernent l’environnement de la voiture sur les SmartPhone, sur les tablettes, qu’est-ce qui fait qu’on va préférer éventuellement s’adresser et se référer au système du constructeur ?
Philippe GICQUEL :Le premier élément déjà c’est que l’usage du téléphone dans la voiture est interdit, en raison du risque de distraction. D'où le rôle du constructeur, qui va proposer des interfaces home machine adaptées à l’environnement automobile et qui va pouvoir évaluer quelles applications pourront être utilisées sans risque dans le monde automobile en conduisant notamment.
L'Atelier : J'imagine que ce n’est pas gratuit. Quels vont donc être les facteurs de motivation, pour un utilisateur, pour utiliser un système embarqué pour connaître le trafic plutôt qu'une application gratuite ?
Philippe GICQUEL : Typiquement si vous sélectionnez un parking, vous allez directement pouvoir être guidé par votre système de navigation intégré au véhicule, ça c’est un premier élément. Et effectivement l’ergonomie des applications qui ont été désignées spécifiquement pour être utilisées dans son environnement automobile seront des arguments pour privilégier ces systèmes vis-à-vis de ce qu’on pourra trouver sur un SmartPhone.
L'Atelier : Les modèles qui se dessinent sont en général embarqués. Est-ce que des approches qui impliquent le téléphone sont envisagées ?
Philippe GICQUEL :Oui, nous travaillons dessus. Et il existe un consortium qui s’appelle le Car ConnectivityConsortium, qui allie des constructeurs automobiles et des équipementiers de téléphone, des fabricants de téléphone. On y définit les interfaces standard pour réussir à faire ces communications. La grosse difficulté avec le monde du téléphone c’est que les gens en changent très souvent, beaucoup plus souvent que de voiture, et que le marché évoluant vite, on n’est pas sûr de pouvoir garantir vis-à-vis du client un service continu dans sa voiture. Donc on a besoin d’interface standard, c’est ce qu’on essaie de faire dans le consortium.
Laurent MEILLAUD :Ce qu’on voit c’est que l’iPhone a priori va rester encore le standard dominant pendant pas mal d’années, d’ailleurs certains constructeurs ont choisi directement de faire des kits auto de l’iPhone, c’est le cas de Smart par exemple, mais c’est aussi le cas de Mercedes tout récemment sur la Classe A. Et dès le début en fait les constructeurs allemands, Audi, BMW, Mercedes ont choisi d’intégrer l’iPhone justement à travers des câbles et un support qui permet en fait d’avoir le menu sur un écran. Donc je dirais que chacun a sa philosophie. Alors c’est vrai que c’est très difficile de parier sur quel sera le standard demain vu que les spécifications d’un téléphone changent tous les mois alors qu’une voiture, on la conçoit quatre ans en avance.
L'Atelier : Mais vous pensez que ce sera un système basé sur une interaction entre le téléphone, le conducteur, le constructeur ?
Laurent MEILLAUD :L’idée, la philosophie qui est dominante c’est ce qu’on appelle le Plug and Play. Donc idéalement en fait, c’est quelque chose que l’on peut brancher facilement dans le véhicule via une clé USB ou via une liaison sans fil Bluetooth par exemple, et de pouvoir retrouver une interface la plus sécurisée possible qui soit doublée par des commandes au volant, et éventuellement par un écran tactile.
Philippe GICQUEL :Effectivement le SmartPhone dans la voiture, c’est clairement une réalité. La capacité à l’intégrer de manière sécuritaire, est un point très important. Ça n’empêche pas que l’horizon futur c’est aussi un véhicule qui est également connecté avec des solutions de connectivité propre. Il y a pas mal d’arguments qui vont dans ce sens-là, entre autre la réglementation européenne en préparation sur l’appel d’urgence qui nécessiterait une connectivité intégrée à la voiture et interdirait dans les discussions en cours le passage par le SmartPhone pour cette connectivité, et un certain nombre d’autres arguments sur la fiabilité du lien entre la voiture et le cloud qui plaident pour le fait que le véhicule soit connecté aussi directement.