Après la colère, il y a toujours une résignation, et cela encore plus souvent quand on voyage souvent avec nos trains, avec leurs retards trop récurrents. Aujourd’hui encore, je dois encore plus poser mon regard autour de moi, sur ce quai bondé entre les personnes qui assurent leurs allers et retours business, pour un dossier comptable, pour une réunion de conseil en management, pour une réunion en province autour des ventes, et les autres vacanciers détendus, impolis, souvent déjà ailleurs dans leurs têtes, oubliant leurs grosses valises bloquantes.
Alors je suis las de cette situation, je décide de devenir léger en scrutant la mode autour de moi, en buvant ma bouteille d’eau.
Une étudiante, en fin de mastère, stressée des derniers jours d’examens, des dernières révisions, un mal de tête entre deux sujets à relire, encore et encore. Elle pose ses lunettes sur son jean noir, sa main tient ses sinus, son visage, elle tente une micro sieste malgré les jeunes enfants qui jouent à côté. La maman semble absente dans sa robe de presque vahiné. Les cheveux bouclés de la jeune femme tombe sur sa main, elle somnole, elle sourit dans ses rêves , c’est une attitude non maîtrisée, si féminine.
En face d’elle une autre jeune femme, tendue par le retard, par sa correspondance non assurée vers un autre lieu, elle boit nerveusement. Son legging noir moule ses jambes vers ses tropéziennes argentées, vers cette jupe, plutôt ce bandeau noir sur ses hanches, vers ce pull long noir lui aussi. Un petit collier de ficelle et de perles multicolores pour égayer sa tenue, elle pourrait être soleil, sans cette angoisse sur son visage, je lui souris, elle aussi. Elle parle, nous échangeons pour évacuer un peu ses maux.
Une femme arrive, s’installe, elle n’a pas de place, enfin elle en avait une ailleurs, car les joueurs inconscients de cette compagnie de train, ont changé l’ordre du train en retard quand celui-ci est enfin arrivé en gare. Imaginez le bazar, entre valises et sacs, entre enfants et téléphones portables. Elle porte une jupe bleue, en coton, sans forme, des sandales de cuir, un petit pull beige, une quinqua avec un visage d’ange. Une coiffure impeccable, des cheveux blonds parfaitement dans leur mouvement, un maquillage simple, une grâce naturelle qui attire le regard. Rien ne semble avoir été retouché, elle resplendit avec ce collier de perles fines, ses lèvres doucement roses. Elle sort un long foulard pour entourer son cou, un geste d’une élégance qui ne peut que me séduire. Quelle beauté !
Une autre banquette, une femme avec un carré brun, de longs cils entourant des yeux gris un peu tristes, elle semble ailleurs, elle compte le retard avec un œil sur sa montre en céramique blanche. Sur son autre poignet, des bracelets, un rang de perles blanches, un range de perles grises, deux lacets de cuir noir, un fin lien avec des perles de petite fille, un cadeau de fête des mamans peut-être, un autre bijou de perles noires brillantes, en plastique, une belle alchimie qui accompagne sa tunique en fin voile gris sur sa lourde poitrine. Elle est enceinte, un ventre rond, et sur son leggings des feuilles de travail, elle les annote. Ballerines en tissu gris avec des broches de bijoux, des perles maxi format et des strass encore plus gros, elle est une future maman mode. Elle est fatiguée, encore plus par cette attente supplémentaire. Je lui propose de l’eau, nous parlons de la météo, de cette soirée écourtée, de nos déplacements.
Les paysages défilent à nouveau, des champs de blés récemment fauchés, des plaines avec quelques arbres, des bœufs charolais, le tgv file maintenant, enfin.
Je m’endors, en pensant à vous, chères lectrices.
Lyon-Paris
Nylonement