(En pensant à William Burroughs)
Mix McCoy avait besoin de son fix.
Cela faisait-il trois fois qu'il se commandait un gros frite, une grosse liqueur?
Oui.
Si il ne se rappelait pas les avoir mangés, il se rappellait les avoir commandés.
Et les rebuts, ici et là, trainant sur la table, prouvaient qu'il les avaient aussi consommés.
Ça lui donnait faim des fois l'entre-deux fix.
Il attendait Floyd mais c'est une certaine Steffie qui s'était pointée comme ADL (agente de liaison).
"Pourquoi c'est pas Floyd qui est venu?"
"Je vais tu voir Floyd?"
"Floyd est-il d'accord avec ce remplacement?"
Il avait toujours eu Floyd comme ADL, cette jeune femme aux air germaniques qui lui proposait de le suivre allait-elle le faire tomber dans un guet-apens?
"Le boss ne veut que des femmes comme ADL, maintenant" s'était contentée de répondre Steffie.
La confiance de Mix ne semblait pas gagnée. Il resta assis et dit une dernière fois:
"Où est Floyd?"
Pas qu'il tenait à Floyd tant que ça mais dans un léger délire paranoiaque, il avait besoin d'être rassuré. Steffie ne lui répondit même pas et tourna les talons. Après avoir eu l'impression qu'on avait liquidé son ancien contact, Floyd, qu'il avait pris pour un grand gaillard aux airs de Sammy dans Scooby-Doo en lui parlant au téléphone mais découvert qu'au contraire c'était un petit homme noir à la moustache fine, il s'était presque pris d'affection pour le gars. C'est dur de gagner la confiance des autres dans ce milieu et là cette femme froide...
Il la suivit quand même. Elle le fit passer par la cour arrière de la succursale de restauration rapide, fait passé par un décor post-apocalyptique, puis par un sous-sol et un escalier en colimaçon qui les avaient fait monter comme à l'étage d'un hôtel désaffecté "T'es pas de la police hein?" s'entendit-il demander. Peut-être l'avait-il demandé quatre ou cinq fois déjà. Pour toute réponse, elle n'avait que souri. Mix tentait du regard de se trouver des pistes d'évasion en cas de bullshit. On entendait du Madonna dont les notes de musique paraissaient déformées et quatre danseuses, toutes asiatiques, se maquillaient dans une toilette pour homme tout près. Il était chez les tout-nus? Mix n'était pas fait en bois, il avait louché vers leurs culs avant d'entrer en collision avec celui de Steffie qui avait arrété de marcher dans le corridor sale.
"Qu'est-ce qui se passe?" demanda Mix
"C'est pas les seringues hein toi?"
"non, les roches"
"C'est de l'autre bord d'abord" Et Mix découvrit un tout nouveau corridor sur la droite dont il ne soupçonnait en rien l'existence. Mix lança un regard dans une pièce sur la gauche et y trouva une fille sanglée sur une table chirurgicale. Elle lui sourit rêveusement. Est-ce que c'était Mathilde? Il croyait qu'il venait de voir sa cousine. Georgieboy, son fournisseur, avait-il aussi coincé sa cousine dans sa toile? Il se savait dans un trip hallucinatoire mais tout semblait si réèl.
Assis sur un banc qui ressemblait à un banc d'école (d'ailleurs toute cette section lui rappelait un corridor d'école) il attendait que Steffie soit allé à la rencontre du dealer en question, Georgieboy, dans la pièce du fond du couloir. C'est fou ce qu'il avait besoin de cette roche, il tremblait, suait, tapait du pied. Il avait à peine remarqué le cadavre qui trainait 15 pieds plus loin. "Il dort" s'était-il menti.
Assis...
À regarder au fond du couloir...
Impatiemment...
Un corridor si propre...
Pas de Madonna ou de sons issus de nulle part...
Juste le bout d'un pied qu'il voyait au loin dépasser de l'endroit où s'était vautré "Steffie".
C'est là qu'il comprit, il fixa la fenêtre, pris son élan, passa au travers, tomba sur l'escalier de métal, le descendit en trombe, sauta le 5 pieds de distances entre l'escalier de secours et la rue et couru dans la nuit sans jamais s'arrêter, ni regarder derrière. Il saignait un peu à cause de la fenêtre. Il ne sentait aucune douleur.
Des bottes comme celles qu'il avait vu dans l'embrasure de la porte au loin ça ne pouvait qu'appartenir à un membre de l'escouade d'intervention.
Ce sont leurs cris qu'il entendait dans la nuit.
Il courait la bouche grande ouverte vers nulle part et les sons qu'il entendait c'était des agents qui lui avaient hurlé après peu de temps auparavant.
Il courait sans voix.
Sans fix.
Sans domicile fixe.
Sans fix.
Mix McCoy avait besoin de son fix.