Hollande-Ayrault : alors, heureux ?

Publié le 10 juillet 2012 par Copeau @Contrepoints

Entre martèlement fiscal, refus autiste d'envisager toute baisse de la dépense publique, maintien de la culture bling-bling, absence de retour sur les mesures liberticides de Sarkozy, et réveil de la Françafrique, que peut-on trouver à sauver dans les premières semaines du duo Hollande-Ayrault ?
Un article du Parisien Libéral.

Osons une question iconoclaste au sein de la sphère centriste et libérale démocrate. Et si on pouvait être contents de Hollande-Ayrault ? Certes, Hollande a tenu une posture destinée à gagner les élections. Mais comme le notent Françoise Fressoz ou Résultat d'Exploitation (s), la parenthèse électorale est finie, et la rigueur arrive.

Du coup, peut-on, comme l'Hérétique, juger que le gouvernement a plutôt d'assez bons débuts et qu'il y a pas mal de choses auxquelles on peut agréer largement ?

La réponse est non. Il ne suffit pas, comme le font Hollande et Ayrault, de prendre la suite de la politique Sarkozy-Fillon (non remplacement systématique des fonctionnaires partant en retraite, création ou hausse d’impôts et de taxes, expulsions d'immigrés clandestins) pour être libéral.

Pourquoi critiquer Hollande et Ayrault ?

Ayrault et Hollande

Déjà, il y a la forme. Les observateurs, ainsi que les degôches, que ce soit la gauchosphère ou les bobos, se plaisent à dire que le bling bling, c'est fini.

Quelle douce plaisanterie. Est-ce que Hollande a renoncé à l'Airbus présidentiel que Sarkozy s'était fait aménagé à grands frais ? Est-ce que leS jetS privéS Tulle-Paris n'étaient pas une faute majeure ? Hollande a t-il décidé de rendre l'usage du pavillon de la Lanterne, à Versailles, au Premier Ministre comme c'était l'usage auparavant ? Les ministres font-ils preuve de sobriété orale, automobile et vestimentaire ou bien se payent-ils des sorties fiscales non contrôlées, des DS5 Hybride Diesel et des tenues qui font concurrence à celles d'autres claudettes de la république ? Pourquoi l'affaire du déjeuner chez Laurent ne fait-elle pas plus la Une de la presse ? Chacun peut pourtant constater que le menu découverte coûte 85 euros au Fouquet's et 170 euros chez Laurent. De même, quel sympathisant de Hollande ira lui demander si un français "normal" dépense 1500 euros par costume ?

Sur la forme, on le voit bien, rien n'a changé entre l'équipe précédente et celle actuellement au pouvoir, si ce n'est l'hypocrisie vis-à-vis de l'argent, ainsi que la confusion familiale accentuée par le rôle de la compagne de Hollande.

Ensuite, il y a le fond. La politique budgétaire est-elle la bonne ? A t-on cessé de recevoir des dictateurs symboles de la Françafrique chez nous ? La République est-elle irréprochable ?

Pendant un mois, Hollande et Ayrault ont répété le sketch de l'audit de la Cour des Comptes. Son contenu n'était pas une surprise, puisque la Cour des Comptes certifie les comptes publics et tient le même discours depuis des années : il faut réduire la dépense publique et surtout en améliorer l'efficacité. Malgré le fait que la Cour des Comptes ait déclaré que l'équipe précédente avait laissé des comptes clairs (c'est-à-dire en déficit de 100 milliards, ce qui veut dire que quand la France dépense 1 euro, elle emprunte 40 centimes), Hollande et Ayrault ont tenté le coup de dépenses budgétées mais non financées. Ils ont comme ça identifié 10 milliards. Outre le fait que la moitié de ces 10 milliards soient liés à la dégradation de la conjoncture économique, on ne peut, en fait, que sourire devant un tel raisonnement. Il manque 10 milliards ? (en fait, 100). Alors que fait le gouvernement ? Il crée de nouvelles taxes.

Pas à un seul instant il ne se demande si on ne pouvait pas, plutôt, supprimer 10 ou 100 milliards d'euros de dépenses. Pas une fois Hollande et Ayrault ne s'interrogent sur la nécessité qu'a l’État de faire autre chose que de la police, de la justice, de la diplomatie et de la défense, de préférence au niveau fédéral Européen. On le voit donc clairement, même si Hollande et Ayrault affichent une certaine forme de sérieux budgétaire (le même sérieux que Fillon, en fait), l'idée même de vouloir préserver le périmètre étatique est inacceptable, et, en réalité, ultra étatiste et ultra socialiste. Même l'objectif de "justice fiscale" affiché est contestable.

Si les gens à fort revenu ou à fort patrimoine tirent leurs biens d'activités injustes et illégales, qu'on les poursuive ! En quoi la fiscalité devrait être juste alors que la vie ne l'est pas, au sens égalitariste du terme ? Pourquoi ne pas appliquer à tout le monde une flat tax de 15% des revenus, plutôt que cet IRPP progressif que la moitié des ménages  français ne payent pas ?

Sur le plan des libertés civiles, le décalage entre l'image des socialistes et la réalité est encore pire. Durant le quinquennat précédent, on avait beaucoup critiqué (à raison) les lois liberticides, la débauche de moyens policiers lors des visites de terrain du gouvernement, etc. Que font Hollande et Ayrault ? Ont-ils défait la fusion entre les Renseignements Généraux et la Direction de la Sûreté du Territoire ? Ont-ils demandé à Jean-Paul Huchon, président socialiste du CR Île de France, de suivre l'avis consultatif de la CNIL et d'anonymiser le Pass Navigo RFID ? Ont-ils demandé à Bertrand Delanoé, maire socialiste de Paris, de stopper la vidéo surveillance (ou alors de rendre l'accès aux images 100% public, par Internet) ? Ont-ils demandé à Martine Aubry, maire socialiste de Lille, ce que les Roms expulsés le 19 Juillet 2010 étaient devenus ? Ont-ils demandé à Manuel Valls pourquoi des mineurs sans papiers étaient encore placés en centre de rétention ? Ont-ils questionné Najat Belkacem sur la compatibilité entre sa volonté de faire disparaître la prostitution et l'objectif d'aider les victimes de la prostitution ?

Sur le plan de la politique étrangère, les sympathisants socialistes doivent être rouges de honte. Ils voulaient en finir avec la Françafrique, ils se retrouvent avec Hollande recevant le 11 juin Mahamadou Issoufou, le président du Niger, une belle démocratie minière, et le 5 juillet, Ali Bongo. RFI, pourtant la voix de la France, écrit "Calée entre les visites d'Alpha Condé et de Macky Sall, cette rencontre n'allait pas de soi. Alors qu'il était encore candidat, François Hollande avait estimé que l'élection d'Ali Bongo ne répondait pas aux critères démocratiques".

La normalie semble bien s'accomoder de la real politik Sarkozyste...

La réponse est donc claire. Les centristes, libéraux démocrates ne peuvent pas être satisfaits de la politique jacobine, cynique et ultra étatiste menée par Hollande et Ayrault, tout comme ils étaient mécontents de la politique ultra socialiste du précédent gouvernement. La "rigueur budgétaire" que Hollande et Ayrault affichent est une plaisanterie, et les libéraux n'en font d'ailleurs pas une fin mais un moyen. Le but n'est pas tant de réduire la dépense publique (ça n'est pas fait) que de réduire l'emprise de l’État sur le pays (ça n'est pas fait non plus) afin de laisser les gens s'organiser librement et localement.

Pourtant, moins et mieux d’État sont non seulement possibles mais surtout souhaitables. Jusqu'où les français vont-ils accepter que l’État se mêle de leurs vies ? Mystère.

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