Mon fils fréquente une école de hockey dans le 418. Pour l'occasion, comme dans les trois dernières années, nous (Punkee, Monkee & me, l'amoureuse travaillant dans le 450 cette semaine-là) logions chez ma maman chérie qui habite tout juste en face de l'université où se trouve l'aréna.
Un véritable plaisir vacancier.
Pendant une semaine chaque été depuis trois ans, je traine mon travail chez ma mère, (toujours léger à cette période de l'année) et je deviens chauffeur officiel et assistant au jeune hockeyeur que devient mon fils.
L'école de hockey leur fait vivre l'expérience du vrai joueur professionnel alors que toutes leurs journées sont axées sur le hockey. Pratique tôt le matin, classe critique sur le hockey, matchs de volleyball, de ballon-chasseur, de drapeau, diner en groupe, pratique plus intense en après-midi, classe vidéo sur le hockey, piscine, match en fin de journée où les parents et amis peuvent y assister.
Des journées de 8h30 à 22h00 avec une seule chose en tête: le hockey. Et le plaisir intrinsèque.
De la belle fatigue. Et de beaux progrès du jeune homme.
Lors de la première journée cette année, mon regard a croisé celui d'une femme de mon âge, une maman de joueur. On s'est regardé très longtemps. L'occasion ne nous as pas donné la chance de se jaser, mais elle et moi on s'est reconnu.
Il a dû y avoir au moins 20 ans qui est passé entre nos deux regards. Je connaissais cette fille et vice-versa et nous nous étions vus la dernière fois il y a très longtemps. J'avais quand même la très forte impression que j'avais connu ce visage de très très près. Jadis, naguère.
J'avais approximativement situé la dernière fois où je l'avais peut-être vue en 1985 ou en 1987. Et je la voyais clairement plaintive. Quelles étaient donc les circonstances par contre?
Lors d'une journée suivante, c'est elle qui m'a abordé.
"Nous, on se connait!"
"Oui...mais de où donc?"
"Sherbrooke...Fanny Ponikarovsky?"
"OUI, oui..."
Et là tout m'est revenu.
1991. Elle était la leader de l'initiation universitaire lors de mon tout premier passage à 18 ans. Elle m'avait trouvé pas mal de son goût malgré mon costume de canard (obligatoire pour les nouveaux étudiants ce jour-là) et tous les mercredis soirs on se rencontrait dans le bar en résidence (le Bahut) pour déconner.
À la toute fin de cette journée d'initiation de 1991, alcool aidant, elle était très entreprenante à mon égard. Et, jeune bouc, je ne repoussais en rien ses avances. Je me souviens clairement d'une mélancolie qui était sienne plus la soirée avançait. C'est l'air plaintif dont je parlais plus haut.
Lors d'un moment où nous étions tous deux isolés en fin de soirée, elle avait soudainement changé de registre et tout juste avant que nos lèvres ne se collent les unes sur les autres elle avait presque pleuré en me disant: "...Je ne peux pas Hunter, je suis en couple et même si je suis très fortement tentée, je suis heureuse dans mon couple..." (je l'apprenais du coup)
Confusion entre amour et désir.
J'ai respecté tout ça et nous sommes restés bons amis le temps d'une année, la seule que j'ai passé à Sherbrooke.
On ne s'est pas rappelé ce moment précis à l'aréna ce soir-là mais moi c'était le souvenir le plus clair que j'avais gardé de Fanny Ponikarovsky. On s'est jasé des amis d'antan. Dans le courant de la semaine nos deux fils, sans savoir que sa mère et moi nous connaissions se lieraient même d'amitié. Mais ce lundi-là, ce n'est que vers la fin de la conversation que j'ai compris que son mari se tenait un peu plus loin. Quand elle me l'a présenté, il m'a aussitôt dit:
"Ben oui je me rappelle de toi, on avait soupé ensemble avec X pis Y..."
Wut?
C'était lui son chum en 1991?
J'allais le cocufier lui en 1991?
Le savait-il?
L'a-t-il su?
Gardait-il ses distances pour ça?
L'inconfort est devenu total pour le reste de la semaine.
Sa femme était encore agréable pour l'oeil.
Elle devait surement se rappeller ces épisodes momentanés de fin de journée d'initiation et de certains mercredis de 1991.
Nous étions étranges, ensemble, tous les trois cette semaine-là de 2012.