Nous connaissons ce jour la réponse à la question posée dans notre dernier post: quel sera le substitut au mot « rigueur » qui est tabou? Le Pt Hollande a répondu ce matin 9/7 en ouvrant la conférence sociale: ce sera « souveraineté ». Bien vu. La dette nous place sous la tutelle des créanciers; en la diminuant(?) ou au moins en la stabilisant par le retour à l’équilibre des comptes publics de fonctionnement, nous défendons notre liberté. Bon travail de sémantique politique…. Il prouve que l’ autorité publique a compris l’enjeu et relègue ses « fous furieux » de la relance dans une opposition stérile qui ne pourra se manifester avant la loi de finances pour 2014. Et encore, la majorité de l’ Assemblée n’a pas besoin d’eux comme on vient déjà de le voir. Du temps pour travailler.
Même prise de conscience dans toute l’Europe et bientôt aux Etats Unis. Le déficit sans fin et, jusqu’à 2009 sans pleurs (pour reprendre l’expression de J. Rueff) est fini dans le monde atlantique. L’équilibre des budgets redevient une vertu et une nécessité.
Mais entre temps….
Il faut faire face au « double dip ». La théorie économique le prévoyait et les lois de l’économie, comme celles de la médecine, sont imparables. Ce matin, la Banque de France annonce la stagnation. Espagne ou Italie malgré l’économie parallèle, sont en crise grave. L’Allemagne ne fait guère mieux que la France. L’Asie et les autres BRIC se heurtent aux goulots d’étranglement classiques de la pénurie de main d’oeuvre qualifiée, d’infrastructures, d’inflation etc, et ralentissent; le Brésil n’ a connu que 3% de croissance en 2011. Tous baissent leurs taux pour avoir un atterrissage en douceur, mais la tempête est là. Nos exportations vont en souffrir.
La reprise de la croissance n’aura lieu qu’après avoir purgé nos excès de dette. Ou au moins de l’avoir stabilisée. Mais elle est trop importante pour que nous puissions la rembourser seuls. D’autant moins que la rigueur selon le PS ne s’attaque pas (encore?)aux dépenses. Les fortes hausses d’impôt risquent de faire baisser les recettes fiscales. Car l’effet Laffer va jouer à plein pour les riches et assimilés, les PME vont tomber avec le marché intérieur, et les classes moyennes supporteront comme toujours le gros des hausses d’impôt aux dépens de leur consommation, donc des recettes de TVA: même les dépenses d’essence et de péages autoroutiers diminuent en Europe! Il nous faudra un ré-échelonnement international. Ce sera l’intérêt bien compris des créanciers. Comme après la guerre de 1914 (rappel: les derniers arrérages du plan Young de 1922 furent payés vers 1976); ou celle de 1939. La condition préalable à un ré-échelonnement est que cette dette soit stabilisée et donc que les comptes publics soient revenus à l’équilibre. Pas avant 2015.
Même situation aux USA. Tous les signaux annoncent leur retour en récession: chômage, indices d’activité précurseurs et instantanés, immobilier et maintenant la bourse qui anticipe toujours. Seuls depuis 1943 à pouvoir imposer leur monnaie et à l’imprimer sans limites, leur principal créancier, la Chine, s’y oppose publiquement. Elle en a les moyens. Il n’y aura donc pas de QE3 pour retarder les échéances comme en 2008 dans l’intérêt des divers groupes de pression (dont le complexe militaro-industriel déjà dénoncé par le Pt Eisenhower dans son discours d’adieu au peuple américain). Certes, le plan de « souveraineté » ne pourra être politiquement possible qu’après l’élection de novembre, mais il doit déjà être prêt dans les services du Trésor, comme chez nous avant Juin dernier.
Rien de bon pour les cours de bourse. Le sauvetage du système bancaire espagnol après celui de l’Irlande et en attendant d’autres avait fait monter les cours des banques de 10 à 20% en 3 séances; simple réaction de vendeurs obligés de se racheter en panique. Les cours des multinationales souffrent du ralentissement des BRIC. Heureusement, leurs bilans sont très sains au point qu’elles peuvent émettre mieux que les Etats sur les marchés internationaux. Elles ne sont plus dans la situation tendue où le premier « dip » les avait trouvées en 2007. Elles, elles avaient compris.
Le prochain creux boursier est à venir. En théorie économique, il serait le dernier. Comme celui de 1975 à Wall Street qui marqua le creux de la dépression séculaire commencée en 1968. Il faut donc garder son cash à l’abri pour investir à ce moment qui sera, comme toujours, marqué par un profond désespoir et la capitulation des intermédiaires boursiers. C’est ce qu’enseigne l’expérience…
A noter: la meilleure tenue des utilities Vivendi et France telecom. Il semble que le ministre et la commission européenne commencent à comprendre que les prix très bas et l’introduction de concurrents tournés vers le seul court terme sont dangereux pour l’emploi et l’investissement. Licenciements chez SFR et Bouygues, et panne d’Orange ce weekend vont dans le même sens: le consommateur ne serait gagnant qu’à court terme. Seuls des groupes industriels puissants et prospères peuvent investir lourdement dans les nouvelles technologies. Un sujet de méditation pour les gérants, surtout avec les rendements dividendes actuels même après 3% d’impôts.