Je voudrais dire un mot aujourd'hui de l'affaire de la rue Rampal qui défraie la chronique depuis une semaine. Près d'une école maternelle du XIXème arrondissement, des policiers ont interpellé plusieurs sans-papiers qui étaient sous le coup d'un arrêté d'expulsion, dont un chinois, qui attendait dans un bar voisin son petit-fils à la sortie de l'école. Des échauffourées ont eu lieu entre policiers et parents d'élèves, et finalement, la directrice de l'école a été mise en garde à vue.
Tout d'abord, je crois que l'on peut regretter dans cette affaire que les policiers aient opéré non seulement à proximité d'une école mais en fin de journée, peu avant la sortie des classes. Il ne faudrait pas que la police donne l'impression d'utiliser les écoles pour tendre des guet-apens aux immigrés sans-papiers : non seulement ce ne serait pas très moral (j'émets ce jugement en dehors de toutes considérations politiques) mais on traumatise inutilement de jeunes enfants. Je ne crois pas qu'il était dans l'intention de la police d'agir ainsi (d'ailleurs en cours d'année scolaire, les immigrés parents d'enfants scolarisés ne sont pas expulsables et le chinois en question a vite été relâché), mais, sur des questions aussi sensibles, on ne peut se contenter d'intentions.
N. Sarkozy a donc eu raison d'envoyer un télégramme aux préfets pour leur rappeler qu'une mesure d'éloignement des sans-papiers ne devait "en aucun cas donner lieu à des interpellations dans les écoles ou à leur proximité". Le procureur Philippe Maitre a expliqué que le parquet de Paris n'avait pas connaissance de cette instruction. On espère en tout cas que cette méconnaissance était involontaire et que ce genre de "bug" ne se reproduira plus.
Malgré tout, je ne cautionne pas l'attitude de la gauche, des syndicats et de S.O.S Racisme qui ont tout de suite crié au scandale après la mise en garde à vue de la directrice de l'école. Que cette dernière soit opposée à l'expulsion des sans-papiers, c'est son droit le plus strict, mais ses convictions ou son statut d'enseignante ne sauraient la placer au-dessus des lois. Suspectée "d'outrages et de dégradations de biens publics en réunion", il n'y a rien de choquant à ce qu'elle ait été placée un temps en garde à vue pour être interrogée.
Des enseignants qui manifestaient aujourd'hui devant le rectorat se sont dits choqués de ce que la hiérarchie de la directrice ne lui ait pas déclaré son soutien. Mais on voit mal, à vrai dire, pour quelle raison elle le ferait : d'une part s'interposer entre un immigré sans-papiers et la police ne relève légalement pas des compétences d'une directrice d'école et l'enseignante a agi à titre individuel ; d'autre part, un soutien de sa hiérarchie pourrait difficilement être interprété autrement que comme une prise de position politique, ce que le rectorat n'est pas autorisé à faire.
Je ne pense pas non plus qu'il y ait dans cette garde à vue, comme voudrait le faire croire L'Unsa éducation, une "tentative d'intimidation à l'encontre des enseignants qui protègent les élèves sans papiers". Il s'agit évidemment plus d'un fait divers que d'un plan d'action concerté (par qui d'ailleurs ?) et de toute façon, si des enseignants protègent des sans-papiers, ils le font en tant que citoyens et non en tant qu'enseignants.
Enfin, la réaction de S. Royal face à cette affaire a prouvé une fois de plus l'incompétence ou la démagogie (au choix) de la candidate du PS : tout en prônant une politique de régularisation au cas par cas, elle a estimé que "les parents d'enfants scolarisés en France devraient être régularisés". Une telle idée paraît généreuse, mais la scolarisation étant en France un droit sans condition, une telle logique conduirait à régulariser systématiquement tout étranger arrivant sur le territoire avec un enfant. On ne serait plus du tout dans une politique de régularisation au cas par cas comme le souhaite pourtant S. Royal, et la France ne contrôlerait absolument plus son immigration.