C’est bon, c’est bio et c’est local. Bref, c’est «biocal». À Bègles, la commune s’investit depuis des années pour proposer, via sa cuisine centrale, une alimentation à la fois qualitative et «de proximité». Hors-normes au début, cette démarche se développe aujourd’hui, devant l’engouement croissant pour le «consommer local».
La ville de Bègles, dont il n’aura échappé à personne que la municipalité est dirigée par le Vert Noël Mamère, s’est engagée très tôt dans la démarche bio. En faisant le choix de conserver une cuisine centrale en régie municipale (c’est la ville qui la gère directement et non une société privée), elle a développé depuis dix ans la part du bio dans l’alimentation distribuée dans les cantines scolaires, le restaurant municipal ou les clubs de la commune. Ça n’a pas été simple, tant la complexité des démarches administratives et le système d’appels d’offres avec mise en concurrence rendaient ce positionnement difficile à tenir.
Mais sous l’impulsion de l’adjoint Cédric Dubosc, très impliqué dans la démarche, le bio s’est fait une belle place dans les frigos de la cuisine centrale, atteignant il y a cinq ans 15% des aliments achetés. «À ce moment-là, nous nous sommes posé la question de la suite à donner, se souvient Cédric Dubosc. Nous aurions pu continuer à faire grimper ce pourcentage en nous contentant du label “bio”, qui était en plein essor. Mais on retombait dans certains travers de l’agriculture conventionnelle : on nous fournissait des produits bio hors-saison, venus de l’autre bout du monde. En France aussi, les grands céréaliers se sont mis à nous proposer du bio produit avec les mêmes travers que ce qu’on peut reprocher au conventionnel. Ça n’avait pas de sens !» Quitte à ralentir le rythme, la ville a donc fait le choix de «développer la bio vertueuse», donc de proximité.
Producteurs locaux
Dans les appels d’offres, la provenance est devenue un critère aussi important que le prix. Quatre producteurs bio locaux ont été retenus pour l’année, mais ils sont mis en concurrence toutes les semaines en fonction des produits demandés. «C’est évidemment beaucoup plus de travail que le fonctionnement traditionnel, mais aussi une plus grande souplesse», affirme Cédric Dubosc, qui souligne la «relation humaine» établie avec ces producteurs qui livrent pour seulement deux ou trois jours. Mais ces partenaires ne sont pas faciles à trouver, car souvent trop «petits» pour être en capacité de répondre à des appels et tenir la comparaison avec les prix des grands groupes.
Mais sous l’égide de l’Arbio (Association des opérateurs du bio en Aquitaine), des producteurs se sont regroupés autour de la plateforme MBSO (Manger bio Sud-Ouest) qui leur permet de mutualiser certaines fonctions administratives, logistiques et commerciales. Et pouvoir ainsi rivaliser avec les «gros». «C’était essentiel, sans cela nous étions bloqués», explique Cédric Dubosc. Évidemment le coût reste un critère central pour la collectivité comme pour, in fine, des consommateurs au budget serré. L’élu affirme que, grâce au choix du maintien de la cuisine en régie municipale, qui a permis de mettre en place ce fonctionnement hors-normes, les prix sont finalement moins élevés que ceux pratiqués par un gestionnaire privé. • SL
Circuits courts: les grandes chaînes s’y mettent aussi
Comme d’autres, le groupe Casino a décidé de rallier la cause des circuits courts, qui séduisent de plus en plus de consommateurs. Associé à une quarantaine de producteurs locaux, il lance en ce moment dans les magasins girondins une nouvelle signature, «le meilleur d’ici». La première a eu lieu vendredi à Mérignac Arlac. Lou Gascoun, Abatilles, Jock, Jean d’Alos... que des noms représentatifs de la Gironde et d’un savoir-faire gastronomique bien connu sur le territoire. Si certains avaient déjà pignon sur rayonnage, d’autres n’avaient pas une exposition aussi forte. Le groupe Casino a décidé de mettre en valeur ces PME locales au travers d’une signature, «le meilleur d’ici».
«Nous avons sélectionné des producteurs qui ne sont pas plus éloignés de 80 km de notre hypermarché. Il y a de plus un cahier des charges garantissant la qualité des produits», explique Haingo Rabarinira, directrice de la grande surface de Mérignac Arlac. Un espace dédié garantit une bonne visibilité des produits, et la photo des producteurs est apposée près des conserves, fromages et autres produits sélectionnés. L’Ardia (Association régionale des industries alimentaires) a favorisé cette initiative. Ainsi Aliénor Chocolatier a rencontré le groupe Casino lors d’un show-room et propose désormais ses canelés en chocolat en hypermarché. Eva Bertrand, attachée commerciale de Tradition et Terroirs, entreprise de charcuterie de Villenave-d’Ornon, le certifie : «Nous avons reçu un super accueil et de plus, nos produits marchent bien.» Casino réaliserait 1% de son chiffre d’affaires hors vin avec cette nouvelle signature déjà lancée dans d’autres régions, selon Jean-Luc Fechner, en charge des relations extérieures du groupe. Cette association gagnant-gagnant devrait se développer avec plus d’une quarantaine de producteurs girondins.
Mais Casino n’est pas seul sur le créneau : Leclerc développe ainsi l’appellation «Les alliances locales», Carrefour multiplie les opérations locales... Selon une étude du cabinet Xerfi, les ventes en circuit court sont en croissance et devraient atteindre 2,8 milliards d’euros en 2015. Comme pour le créneau du bio il y a quelques années, la grande distribution ne pouvait donc passer à côté de ce marché du local, qui fonctionnait jusqu’ici par la vente à la ferme, les paniers Amap ou les coopératives. • JYSC
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