J'ai lu récemment dans un commentaire le témoignage d'un enseignant qui écrit sous le pseudonyme de John Keating. Je pense qu'il vaut vraiment d'être lu...
Croire que le problème principal de l'école d'aujourd'hui c'est le rythme scolaire ou la date et la durée des vacances est tout bonnement hallucinant. Et pourquoi pas la couleur des salles, le vouvoiement des élèves l'uniforme et le tchador.
On ne veut pas voir l'état catastrophique de l'école (Collège surtout) dont les missions sont tellement multiples qu'elles sont par avance vouées à l'échec. Le découragement, les dépressions, les suicides de nombreux profs (des chiffres vont bientôt sortir et France Telecom à côté c'est Bisounoursville) qui sont au front tous les jours avec des élèves odieux insultants menaçants méprisants et soutenus par des parents vindicatifs et fiers de leur médiocrité et de leur vulgarité histoire de donner l'exemple à leurs rejetons. Et nous obligés de comprendre, pardonner, excuser car ils sont jeunes et en construction; sinon on arrête le métier. De toute façon faut bien les garder jusqu'à 16 ans, mêmes les pires crapules soupçonnées de racket, vols et j'en passe.
Les rapports de force qui s'établissent dans certains quartiers avec la police ou les pompiers on les retrouve dans les classes; tout ce qui représente l'Etat et l'autorité est rejeté avec force. L'instruction est minimale pourtant c'est le coeur du métier
L'échec est tellement immense qu'on en est réduit à accepter l'inacceptable pour un brin de paix sociale et se contenter du minimum c'est-à-dire qu'au moins dans la classe personne ne s'égorge ou se balance des compas dans la figure. Le prof devient un maton mais il est seul pour faire parfois face à des mutineries quand les exigences simple civisme sont trop élevées. La hiérarchie ferme les yeux fait semblant de ne pas voir et se décharge de toute responsabilité.
Ce constat alarmant n'est certes pas le même partout loin de là et varie du tout au tout selon les filières, les villes, les régions, mais dans les établissements les pires on en est aux caméras de surveillances, on parque les élèves dans la cour pour éviter les dégradations des locaux, la police intervient de plus en plus souvent, des profs font régulièrement des mains courantes car menacés par des élèves ou des parents.
Ah oui mais c'est vrai un prof peut rien dire parce qu'il a des vacances, qu'il travaille 3h par jour (entendu sur i-télé par un "expert")...pardon j'ai blasphémé. Et en plus le métier est une vocation donc il faut se la fermer sinon on avait qu'a en choisir un autre. Désolé. De toute façon si je vous dis que seulement 2 semaines de vacances nous sont payées vous ne me croiriez pas. Que dans mon cas je bosse tous les soirs après 22h, tous les WE entre 5 et 10h, pendant la moitié des vacances car l'autre moitié je tiens à la partager avec mes gosses.
Mais pourquoi le métier de prof n'attire plus dit-on dans les salons parisiens bien-pensants ? Pourtant ils sont payés plus que le SMIC ils n'ont pas à se plaindre ces branleurs.
Pourquoi je continue? Parce qu'enseigner c'est ce que je sais faire de mieux, parce que parfois on réussit qqch d'incroyable...on allume la flamme, on crée l'envie, la curiosité.
Donc pour moi rester 1 ou 2 ou 3 semaines de plus ou de moins je m'en contrefout. La semaine de 4,5 ou 9 jours même et bien soit pourquoi pas mais ça ne changera rien.
La société est gravement malade on a cru que l'école pourrait la soigner mais elle agonise de récupérer des blessés graves qui ne veulent pas guérir et d'être sans cesse accusée d'être la cause de la maladie.
Vive le capitalisme, l'individualisme qu'il engendre et l'argent comme valeur première.
Un prof furieux et réaliste mais qui résiste.