Hier soir, enfin ! Je me rendais au théâtre éphémère de la Comédie Française pour y voir le fameux vaudeville de Feydeau, dont j'avais tellement entendu parlé, notamment au Masque et la Plume où, quand ils s'y mettent, les critiques ne tarissent plus d'éloge pour la pièce, celle qu'ils ont élu "meilleure de l'année".
J'adore le théâtre éphémère, j'adore la Comédie Française et ses comédiens, par contre Feydeau, j'adore moins. Alors voilà, c'était drôle, pleins de rebondissements, avec un jeu excellent - on était au théâtre, au "vrai" théâtre, celui de l'imaginaire collectif (je viens d'associer vrai et imaginaire et ainsi de nombreuses et stupides réflexions philosophiques viennent peupler mon esprit). C'est pourquoi j'ai eu l'impression que cette pièce aurait pu être jouée à l'identique ou presque il y a soixante-dix-ans. Et ça m'a déçue.
Aujourd'hui le théâtre, même à la Comédie Française et peut-être surtout à la Comédie Française, pourrait se permettre d'aller chercher un peu plus loin. Pour Amphitryon, par exemple, sans aller dans l'expérimentation, le metteur en scène Jacques Vincey s'est amusé avec un décor machiné moderne et des costumes extravagants qui renouvelaient la pièce.
Mais dans Un fil à la patte, les costumes et les décors sont d'époque (oui, enfin presque). Le rideau s'ouvre, se ferme entre chaque acte. Les gags se suivent et se ressemblent. A un seul moment, et par le seul comédien (dont je deviens fan, il est aussi magnifique dans Amphitryon : Christian Hecq, le clerc ci-dessus et récompensé d'un Molière pour son rôle dans cette pièce) ayant ajouté du grotesque et du drôle à son personnage, le théâtre est mis en abîme, et la scène se retrouve brusquement en contact avec le public. Mais c'est tout ! Et ça m'a déçue.
Peut-être que j'en demande beaucoup, mais il me semble qu'aujourd'hui on peut faire bien plus et bien mieux au théâtre, après toutes ces années. Quand je lis Peter Brook et puis que je regarde cette pièce, j'ai l'impression que rien a été fait. En forçant un peu le trait, c'est comme lire du Camus et du Sartre... et puis lire un Marc Levy : on se dit que tout ça n'a servi à rien.
Peut-être aussi que je ne vais pas au bon endroit pour ce que je recherche. Et puis, le divertissement n'est-il pas aussi une mission du théâtre et du roman ? Sans doute; je crois cependant qu'il n'y a pas que cela, et que si on croit au théâtre, on ne peut pas se contenter du vaudeville respecté à la lettre.
Ca ne m'empêchera pas de retourner dans les salles de la Comédie Française à la rentrée car pour rien au monde je ne manquerai Antigone, Dom Juan et surtout, surtout, Cyrano de Bergerac.