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Pour moi ce sera un peu de poésie… Et pour vous ?

Par Nada @nada

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Un paysage, un visage aimé, une musique, une chanson, qui n’a pas été au moins une fois dans sa vie submergé(e) par l’émotion ?

Souvent les mots nous manquent. Comment exprimer ce qui vibre en nous ? C’est là, palpable et inexplicable.

La poésie nous aide à comprendre, à prendre conscience de nos sentiments, elle est le lien entre le réel et l’imaginaire. Les poètes chantent, pleurent, s’insurgent et nous ravissent par leurs proses ou leurs vers si évocateurs. Par des poèmes ou chansons, depuis toujours l’homme rend grâce à la beauté et à l’amour.

Voici deux merveilleux poèmes, le premier de Sully Prudhomme (1839-1907), certes un peu moins connu que Baudelaire ou Hugo mais tout aussi talentueux, Le vase brisé, jolie métaphore d’un cœur brisé et  le second de Léo Ferré Avec le temps … tout est dit dans le titre.

Pour certain(e)s ces poèmes peuvent être perçus comme tristes et déprimants, quant à moi, sans nostalgie ni tristesse, je ne vois que la beauté du texte.

Le Vase brisé

Le vase où meurt cette verveine
D’un coup d’éventail fut fêlé ;
Le coup dut l’effleurer à peine :
Aucun bruit ne l’a révélé.

Mais la légère meurtrissure,
Mordant le cristal chaque jour,
D’une marche invisible et sûre,
En a fait lentement le tour.

Son eau fraîche a fui goutte à goutte,
Le suc des fleurs s’est épuisé ;
Personne encore ne s’en doute,
N’y touchez pas, il est brisé.

Souvent aussi la main qu’on aime,
Effleurant le cœur, le meurtrit ;
Puis le cœur se fend de lui-même,
La fleur de son amour périt ;

Toujours intact aux yeux du monde,
Il sent croître et pleurer tout bas
Sa blessure fine et profonde ;
Il est brisé, n’y touchez pas.

Sully Prudhomme

Avec le temps…

Avec le temps, va, tout s’en va
On oublie le visage et l’on oublie la voix
Le coeur, quand ça bat plus, c’est pas la peine d’aller
Chercher plus loin, faut laisser faire et c’est très bien

Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va

L’autre qu’on adorait, qu’on cherchait sous la pluie
L’autre qu’on devinait au détour d’un regard
Entre les mots, entre les lignes et sous le fard
D’un serment maquillé qui s’en va faire sa nuit
Avec le temps tout s’évanouit

Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va
Mêm’ les plus chouett’s souv’nirs ça t’as un’ de ces gueules
A la Gal’rie j’farfouille dans les rayons d’la mort
Le samedi soir quand la tendresse s’en va tout seule

Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va

L’autre à qui l’on croyait pour un rhume, pour un rien
L’autre à qui l’on donnait du vent et des bijoux
Pour qui l’on eût vendu son âme pour quelques sous
Devant quoi l’on s’traînait comme traînent les chiens
Avec le temps, va, tout va bien

Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va
On oublie les passions et l’on oublie les voix
Qui vous disaient tout bas les mots des pauvres gens
Ne rentre pas trop tard, surtout ne prends pas froid

Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va

Et l’on se sent blanchi comme un cheval fourbu
Et l’on se sent glacé dans un lit de hasard
Et l’on se sent tout seul peut-être mais peinard
Et l’on se sent floué par les années perdues
Alors vraiment
Avec le temps on n’aime plus.

Léo Ferré


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