Paul Thorel, Isola sommersa, 2008
Paul Thorel, Grande colloquio laterale n°2, 2010
Les photographies de Paul Thorel à la MEP (jusqu’au 26 août) semblent d’abord être des images qu’il faut déchiffrer, en se plaçant à la bonne distance, en clignant les yeux, en bougeant d’un pas de côté, pour enfin être en mesure de discerner ici un œil, là une bouche. Mais il est tout aussi intéressant de les regarder comme des compositions abstraites, en ne se posant plus la question de la représentation, en s’abstenant de lire les titres, trop explicites, en ne se préoccupant pas trop du processus de fabrication de l’image (Thorel a été un des pionniers de l’art numérique) et en se satisfaisant d’y voir simplement des formes, des surfaces, des plis, des ruptures, des tensions, des flux d’énergie, parfois des fulgurances de couleur au milieu de ces mers de gris de toutes nuances.
Paul Thorel, Cairo Crowd N°21, 2011
Paul Thorel, Leda e il Cigno N°2, 2012
Le rapport à la peinture non-figurative devient alors évident, les paysages stériles et inhumains évoquent un Tanguy débarrassé de ses petits homuncules, la foule ondulante et révolutionnaire (ou en prière) fait penser aux dynamiques de Boccioni (et aussi à un vibrionnement cathodique) , les corps des danseuses ont le même rendu que les formes cylindriques ombrées de Malevitch ou de Gromaire. Déchiffrer le corps de ces danseuses (et ce n’est pas le titre ‘Léda et le cygne’ qui nous éclairera), y déceler des membres tendus et des formes alanguies, plonger dans ces plis surgis d’on ne sait où et s’enivrer de ces touches de couleur qui pénètrent la composition, là est le plaisir de la contemplation des ces grandes toiles, qui sont pourtant des photographies. Les petits formats sont moins fascinants, moins énigmatiques, moins propices à la méditation.
Paul Thorel, Danse de pauvreté et de parfait amour, 2012
Jérémie Nassif, Gioia Masala, 2010
D’autres danseuses au rez-de chaussée de la MEP, dans la salle reculée souvent la plus intéressante de la maison : ici Jérémie Nassif présente des photographies qui semblent dessinées, peintes, diluées. Là aussi le corps se dilue, se contourne, s’étire, se soumet à l’éclatement, à la distorsion. Les corps des danseurs deviennent mouvement. Ce ne sont plus des formes posées comme chez Thorel, ce sont des éclats, des explosions, des feux d’artifice.
Le reste de la MEP en ce moment (à part les vidéos israéliennes, à voir absolument) : people et pub, la très belle Charlotte Rampling et Madame Helmut Newton. Passons.
Photos courtoisie des artistes et de la MEP.
Jérémie Nassif, Mimoza Koike, 2010