Tombouctou sous l'assaut des barbares
Dans Tombouctou interdite depuis que les groupes armés salafistes l'ont envahie début avril, les destructions de mausolées et de lieux saints de l'islam se poursuivent à huis clos. Les Touareg ont fui, journalistes, travailleurs humanitaires et observateurs étrangers sont indésirables, les habitants se terrent chez eux, trop effrayés pour oser témoigner par téléphone sous leur nom.
Dotée de la prestigieuse université coranique de Sankoré et d'autres medersa, Tombouctou était aux XVe et XVIe siècles une capitale intellectuelle et spirituelle et un centre de propagation de l'islam en Afrique. Ses trois grandes mosquées (Djingareyber, Sankoré et Sidi Yahia) témoignent de son âge d'or. Bien que restaurés au XVIe siècle, ces monuments sont aujourd'hui menacés par l'avancée du sable.
BAMAKO - Des islamistes d'Ansar Dine, un des groupes armés contrôlant le nord du Mali, ont démoli samedi des mausolées de saints musulmans dans la ville mythique de Tombouctou, classée patrimoine mondial en péril, et Bamako a dénoncé "la furie destructrice" de ces actes assimilables "à des crimes de guerre".
"Ansar Dine va détruire aujourd'hui tous les mausolées de la ville. Tous les mausolées sans exception", a déclaré à travers un interprète Sanda Ould Boumama, porte-parole d'Ansar Dine à Tombouctou joint par l'AFP depuis Bamako.
"Dieu, il est unique. Tout ça, c'est +haram+ (interdit en islam). Nous, nous sommes musulmans. L'Unesco, c'est quoi'", a-t-il dit, ajoutant que Ansar Dine réagissait "au nom de Dieu".
"Certains avaient des armes. Ils n'ont pas tiré. Alors, ils ont commencé par crier: +Allah akbar!, Allah akbar+ (Dieu est grand! Dieu est grand!) et avec des pioches et des houes, ils ont commencé par casser le mausolée. Quand un grand bloc du mausolée est tombé sur la tombe, ils ont commencé par crier encore +Allah Akbar!+ et après, ils sont allés vers un autre mausolée", a ajouté cet homme sous couvert d'anonymat.
"Furie destructrice"
A Bamako, le gouvernement a dénoncé "la furie destructrice assimilable à des crimes de guerre" du groupe islamiste armé Ansar Dine et menacé les auteurs de ces destructions de poursuites au Mali et à l'étranger.
Tombouctou compte 16 cimetières et mausolées qui étaient des composantes essentielles du système religieux dans la mesure où, selon la croyance populaire, ils étaient le rempart qui protégeait la ville de tous les dangers.
"Nous venons juste d'apprendre la nouvelle tragique des dégâts sans raison causés au mausolée de Sidi Mahmoud, dans le nord du Mali", a déclaré Alissandra Cummins, présidente de l'Unesco, dans un communiqué à l'AFP, appelant toutes les parties impliquées dans le conflit à Tombouctou à "exercer leurs responsabilités".
En plus de Tombouctou, Gao et Kidal (nord-est), les trois régions formant le nord du Mali, sont sous le contrôle des islamistes de divers groupes armés qui ont profité de la confusion créée à Bamako par un coup d'Etat militaire le 22 mars.
Au moins 35 personnes, dont des civils, ont été tuées dans les violents combats ayant opposé cette semaine des islamistes et des rebelles touareg à Gao, selon un nouveau bilan communiqué samedi à l'AFP par une source hospitalière.
Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), un des groupes armés contrôlant le nord du Mali, agira "avec fermeté et détermination" contre ceux qui collaboreront avec une force militaire appelée à intervenir dans la région, a menacé samedi de son côté un de ses chefs, Mokhtar Belmokhtar.
La démolition des mausolées de Tombouctou par les islamistes rappelle le sort d'autres ouvrages du patrimoine mondial, dont les Bouddhas de Bamyan, dans le centre de l'Afghanistan, détruits en mars 2001 par les talibans et leurs alliés d'Al-Qaïda.
En Afrique de l'Est, les islamistes somaliens shebab ont détruit de nombreux mausolées de mystiques soufis dont la mémoire était vénérée par les populations locales.
Source la Presse Française et mes souvenirs de collectionneur de timbre.