Ames suspendues, deTouhfat Mouhtare

Par Liss
Première œuvre de Touhfat Mouhtare, Âmes suspendues est un recueil de neuf nouvelles que l’on déguste avec gourmandise, elles sont si délicieuses ! L’auteure les a préparées avec soin, elle y a mis ce quelque chose qui vous fait reconnaître tout de suite le savoir-faire et vous pousse irrésistiblement à répondre à une future invitation. Espérons seulement que ce sera plus copieux, car pour l’instant, Touhfat Mouhtare ne fait que nous mettre en appétit, elle ne va pas plus loin, comme si elle craignait de ne pas plaire au lecteur, comme si elle voulait d’abord tester le public en lui présentant un échantillon de ce qu’elle est capable de faire. Je me permets de répondre au nom de tous les amoureux de la littérature : le test est réussi !

Ces nouvelles sont portées par un souffle poétique : le texte est mélodieux, il se murmure ou se chante, sur un air triste ou enthousiaste, c’est selon. Mais il est surtout marqué par la fraîcheur de la nuit, dominante dans les nouvelles. La nuit est le cadre de presque toutes les nouvelles, elle en devient même un des personnages : complice de ceux qui savent se taire et écouter, elle recèle tant de beautés, mais surtout tant de secrets ! Elle est l’oreille à qui on confie ses peines, l’amie auprès de laquelle on se réfugie pour protéger sa pudeur.
Le recueil met en avant le thème de l’amour, qui « est à la fois une arme et un mal » (p. 60), qui meurtrit et qui protège, l’amour auquel nul ne peut échapper. Les personnages, majoritairement féminins, séduisent par leur détermination. Mais ceux masculins ne le sont pas moins, comme « le vieil homme » qui tient bon, malgré l’ingratitude de la vie qu’il mène, et ce grâce à sa force intérieure. C’est encore une fois une force intérieure qui prend le visage de l’amour.
Bref, le recueil Ames suspendues, de Touhfat Mouhtare, nous présente des âmes suspendues à l’espoir de lendemains meilleurs, ces âmes qui espèrent qu’un sésame leur ouvrira les portes d’une vie conforme à leurs rêves, à leurs désirs, désir d’amour, désir de réussite, désir de reconnaissance.
Parmi les neuf nouvelles, mes préférées sont « Shhh », pour son pouvoir de suggestion : cette nouvelle raconte tout un drame, tout un roman mais en à peine quelques pages ! Et « I », parce qu’elle montre toute la violence à laquelle est confrontée la jeune femme, la femme tout simplement, violence de la misère qui livre celle-ci à la violence de la société.
Touhfat Mouhtare, Ames suspendues, Nouvelles, Editions Coelanthe, 2012, 72 pages, 10 €.
On a autant de plaisir à lire l'auteure qu'à l'acouter : voici ci-dessous le lien vers l'émission que Gangoueus lui a consacrée.
http://www.sudplateau-tv.fr/litteratures/item/842-les-lectures-de-gangoueus-invit%C3%A9-touhtfa-mouhtare