Ces nouvelles sont portées par un souffle poétique : le texte est mélodieux, il se murmure ou se chante, sur un air triste ou enthousiaste, c’est selon. Mais il est surtout marqué par la fraîcheur de la nuit, dominante dans les nouvelles. La nuit est le cadre de presque toutes les nouvelles, elle en devient même un des personnages : complice de ceux qui savent se taire et écouter, elle recèle tant de beautés, mais surtout tant de secrets ! Elle est l’oreille à qui on confie ses peines, l’amie auprès de laquelle on se réfugie pour protéger sa pudeur.
Le recueil met en avant le thème de l’amour, qui « est à la fois une arme et un mal » (p. 60), qui meurtrit et qui protège, l’amour auquel nul ne peut échapper. Les personnages, majoritairement féminins, séduisent par leur détermination. Mais ceux masculins ne le sont pas moins, comme « le vieil homme » qui tient bon, malgré l’ingratitude de la vie qu’il mène, et ce grâce à sa force intérieure. C’est encore une fois une force intérieure qui prend le visage de l’amour.
Bref, le recueil Ames suspendues, de Touhfat Mouhtare, nous présente des âmes suspendues à l’espoir de lendemains meilleurs, ces âmes qui espèrent qu’un sésame leur ouvrira les portes d’une vie conforme à leurs rêves, à leurs désirs, désir d’amour, désir de réussite, désir de reconnaissance.
Parmi les neuf nouvelles, mes préférées sont « Shhh », pour son pouvoir de suggestion : cette nouvelle raconte tout un drame, tout un roman mais en à peine quelques pages ! Et « I », parce qu’elle montre toute la violence à laquelle est confrontée la jeune femme, la femme tout simplement, violence de la misère qui livre celle-ci à la violence de la société.
Touhfat Mouhtare, Ames suspendues, Nouvelles, Editions Coelanthe, 2012, 72 pages, 10 €.
On a autant de plaisir à lire l'auteure qu'à l'acouter : voici ci-dessous le lien vers l'émission que Gangoueus lui a consacrée.
http://www.sudplateau-tv.fr/litteratures/item/842-les-lectures-de-gangoueus-invit%C3%A9-touhtfa-mouhtare