je suis arrivée pleine de bonne volonté dans une ferme 30 km au nord de Catane, près de Giarre. Pas au bon moment, malheureusement. Dans la description de la ferme, ils parlent de communauté de 6 personnes qui vivent comme une grande famille ; dans les faits, il n'y avait qu'un couple sur les 6 personnes, ainsi que 2 jeunes wwoofers italiens longue durée super motivés, et Sara, une jeune Suédoise arrivée depuis peu. Cette dernière a eu le même sentiment que moi : nous n'étions pas les bienvenues et notre travail n'était aucunement récompensé. Non seulement la « chef » ne nous traitait pas bien (le stress explique mais n'excuse pas) mais il n'y avait rien dans le frigo(en grande partie parce que le couple partait à un salon de l'agriculture et nous laissait la ferme quelques jours)... certes nous n'avons pas dépéri, mais les pâtes à l'huile et aux légumes du jardin midi et soir, ça va un moment. Bref, on avait l'impression de se faire exploiter. Du coup, la situation m'a fait me rapprocher rapidement de Sara. A défaut de pouvoir pratiquer l'italien, nous avons revisité la langue anglaise. Jamais je n'ai autant ramé pour speak English, forcément, dans un environnement italophone, rien ne me venait en anglais. Nos conversations étaient de véritables spectacles composés d'approximations grotesques, de gestes (pour les verbes), de périphrases (pour les noms),de grands « ARRRRGGGG » de frustration et de trépignements rageurs. Parfois même, on tentait le mot allemand (moi) ou suédois (elle)... et ça marchait ! (la compréhension). Ou pas. Enfin bref. On réussissait à peu près à se comprendre.
Bon alors, et le boulot ? Mis à part le fait qu'il fallait commencer aux aurores (7h) pour éviter les heures de canicule, c'était vraiment plaisant. La majeure partie du temps, nous avons travaillé dans les vignes. Je ne sais pas combien d'hectares il y en avait. Beaucoup en tout cas, ce qui leur permet de produire et commercialiser leur propre vin. Le cadre de travail était idyllique,
avec vue non seulement sur la montagne mais aussi sur la mer !
Notre tâche consistait à attacher les jeunes plants de vignes à leurs tuteurs avec de la ficelle. Certains, peu nombreux, comprenaient tout seuls autour de quoi il fallait s'entortiller, d'autres avaient plus de mal.
Dans le pire des cas, ils allaient enlacer le plant voisin : j'avais impression de séparer des amoureux, ça me fendait presque le cœur. Mais ce n'était rien à côté de la désolidarisation des carottes (qu'il faut arracher et replanter plus loin car trop serrées): certaines avaient poussé romantiquement (voire érotiquement) enroulées l'une autour de l'autre, mais comment pouvais-je savoir avant de les arracher impitoyablement de terre ? Heureusement que je n'ai pas eu autant d'états d'âme lors de la récolte des boutons de capucines.
Peut-être que vous le savez déjà, mais c'est comestible et ça ressemble beaucoup aux câpres ! Bon sinon, j'ai vu mes premières clémentines sur l'arbre.
Dommage, elles n'étaient pas bonnes (toutes sèches), mais les abricots cueillis (et dévorés) encore gorgés de soleil compensaient cette déception.
Et les couchers de soleil... mamma mia.
Une mention spéciale au chien Curva qui aura été l'être le plus hospitalier de la maison : c'est le seul qui nous a accompagnées jusqu'à la gare (enfin, la fameuse station de circumetnea) le jour de notre départ. Plus d'un kilomètre, quand même !
Le pauvre, non seulement il a un nom de fille, mais en plus ça veut dire « pute » (injure) dans plusieurs langues slaves ! (je précise qu'il y avait un travailleur polonais à la ferme)
Pour terminer, rubrique nécrologique : j'ai le regret de vous annoncer la mort de mon pantalon fétiche qui m'aura accompagnée dans bien des voyages et sera passé du marron foncé à une couleur lavasse infâme. Il aura traversé 4 continents, survécu aux intempéries écossaises, à la poussière thaïlandaise, à l'autostop en Nouvelle-Zélande, aux travaux dans les champs, et j'en oublie. A tout, sauf à l'expansion de mon gros popotin. Crac, en plein dans les vignes. Toujours moins pire qu'en plein bus, remarquez (cf post 127).