Marcell Coetzee, ici ballon en main, incarne cette nouvelle génération très prometteuse de jeunes joueurs de l’Hémisphère Sud - Crédits: Getty Images
Il n’aura suffi que de quelques matchs pour qu’un bon nombre d’entre eux séduise leur staff. Quelques uns même semblent déjà postuler pour une place de titulaire dans leur équipe respective avec seulement deux ou trois matchs au compteur…
Eben Etzebeth forme avec Juandre Kruger une deuxième ligne irrésistible
A commencer chez les Springboks. En deuxième ligne, on pouvait craindre le trou béant que laissaient Bakkies Botha et Victor Matfield à leur départ. On « pouvait » car on a très vite été rassuré par leurs successeurs : Eben Etzebeth des Stormers (20 ans) et Juandre Kruger des Bulls (26 ans). Ils ont tout deux livré des prestations hauts de gamme. Ils ont systématiquement été alignés dans le XV de départ sud-africain et au moins un des deux a à chaque fois joué le match en intégralité. Ils affichent d’ailleurs une complémentarité qui n’est pas sans nous rappeler celle du duo Botha-Matfield aligné 62 fois ensemble sous le maillot des Boks… Etzebeth est intraitable dans le jeu au contact, dans les rucks comme pouvait l’être Botha et Kruger lui semble plus doué pour ce qui est de la touche tel que Matfield pouvait l’être, expert en la matière. Cet attelage promet beaucoup, surtout quand on se dit que Etzebeth n’a que 20 ans. Pas sûr qu’Andries Bekker – quand il en aura finit avec sa blessure – récupère une place de titulaire au sein du collectif Springbok.
Marcell Coetzee, flanker des Sharks impressionne tout autant, si ce n’est plus. A seulement 21 ans, il s’impose comme une valeur sûre du pack sud-africain et dieu sait comme ce pack est étoffé. Son explosivité, sa mobilité et sa niaque impressionnent, tant en attaque qu’en défense. Sur l’ensemble des trois tests, il tourne à 13 plaquages par match et en moyenne plus de 66 m d’avancée, effarant (il avance en moyenne sur 6 m à chaque impact !). Il a aussi su profiter de la blessure de Schalk Burger et de l’absence voulue (et critiquée) par Heineke Meyer de Heinrich Brussow. Il n’aura loupé que 8 min sur les trois tests. Et pourtant, bien qu’il soit devenu un des meilleurs arguments du pack Springbok, sa place de titulaire n’est pas garantie pour le Four-Nations. La raison à cela ? Une concurrence sans merci à ce poste en Afrique du Sud.
Coenie Oosthuizen, le grand espoir en première ligne
Jacques Potgieter (26 ans), lui aussi troisième ligne, montre bien le vivier présent en Afrique du Sud à ce poste. Pour sa première cape, le joueur des Bulls a clairement épaté, avec notamment 11 plaquages à son actif (deuxième meilleur plaqueur côté sud-africain). Il n’aura joué que le dernier match. A revoir très vite. On aurait aussi aimer revoir le grand espoir sud-africain au poste de pilier qu’est Coenie Oosthuizen (23 ans), une blessure nous en aura empêché, « Shrek » avait fait une rentrée prometteuse lors du premier test-match. Elton Jantjies (21 ans), ouvreur des Lions et révélation en Super Rugby, bien que présent sur la feuille du 3ème match n’aura pas eu la chance d’honorer sa première sélection chez les Boks. Du moins pas encore.
En Nouvelle-Zélande, le triomphe quasi systématique des Baby Blacks ces dernières années en coupe du monde des -20 ans (on rappelle qu’ils restaient sur quatre succès avant leur défaite le week-end dernier en finale face aux jeunes Boks), a fort logiquement amené son lot de nouveaux joueurs talentueux sur la scène internationale. Parmi eux, Brodie Rettalick, Sam Cane, Beauden Barrett, Julian Savea et même Ben Tameifuna. Rien que ça.
Brodie Retallick après être devenu un leader du pack des Chiefs s’est désormais imposé chez les Blacks.
Brodie Retallick (seulement 21 ans), deuxième ligne, a tapé dans l’œil de Steve Hansen après des performances plus que convaincantes avec les Chiefs. Force est de constater que le coach néo-zélandais et son staff avaient vu juste. Retallick a été dur au plaquage, au contact, a fait du bon boulot au déblayage et s’est avéré intéressant dans le registre offensif même si c’est sans doute là que sa marge de progression reste la plus grande. Avec Sam Whitelock (qui n’a que 23 ans rappelons-le), il forme un attelage idéal, notamment en touche où ils ont été brillants : c’est simple, les Blacks n’ont perdu aucun ballon en touche sur leurs propres lancers sur l’ensemble des trois tests. Il pourrait former avec Sam Whitelock une deuxième ligne qui s’inscrirait dans la durée, étant donné la jeunesse inouïe de ces deux là à un poste aussi exigent que celui deuxième ligne.
Mais Luke Romano (26 ans), deuxième ligne des Crusaders, compte bien empêcher Retallick de faire son nid dans l’effectif néo-zed. Titulaire lors du dernier match, Romano aura bien montré en 80 min ce dont il était capable et ce qu’on avait très bien entrevue en Super Rugby. Avec deux là, Brad Thorn peut dormir tranquille…
Sam Cane ou la nouvelle génération de 3ème ligne
Sam Cane (21 ans), successeur annoncé de Richie McCaw, a lui aussi découvert le niveau international, et avec franche réussite. Rentré à la pause lors du deuxième match, il aura en une mi-temps fait ce que McCaw aura fait en deux ! Auteur de 11 plaquages (et aucun loupé) et de 25 m d’avancée ballon en main, il aura clairement réussit son baptême de feu. Mais le meilleur restait à venir. Titulaire lors du dernier test, il aura complètement crevé l’écran. Avec 20 plaquages à son actif, 2 essais, quasiment 8m d’avancée ballon en main en moyenne, 2 passes après contact et même une passe décisive, il aura sans doute été l’avant le plus entreprenant avec McCaw justement, « relégué » en n°8, Cane prenant comme maillot le légendaire n°7 de son aîné. Avec un Jérome Kaino blessé puis en partance pour le Japon, il pourrait bien s’installer comme nouveau titulaire. A voir.
Derrière, Julian Savea (21 ans) aura lui-aussi crevé l’écran, c’était cette fois-ci lors du premier match. Pour sa 1ère sélection, il n’a rien trouvé d’autre à faire que de planter trois essais. Son physique hors normes, sa vitesse et sa férocité en défense ne sont pas sans nous rappeler les qualités d’un certain Jonah Lomu… A suivre donc. Beauden Barrett (21 ans lui-aussi), partenaire de Savea chez les Hurricanes, aura également fait sa première apparition sous le maillot frappé de la fougère d’argent. Il aura bien géré le jeu après la sortie prématurée d’Aaron Cruden, mais moins bien que l’avait pu faire le gourou des Chiefs en début de match.
Aaron Smith, nouvel animateur épatant des Blacks
Mais soyons clair, celui qui a sans doute le plus marqué les esprits chez les Blacks, c’est bien Aaron Smith. Légèrement plus âgé (26 ans), c’est en toute logique qu’il devenait titulaire chez les Blacks après un début de saison éblouissant qui l’avait vu reléguer sur le banc Jimmy Cowan. On n’a pas été déçus, sa vivacité de passe exceptionnelle, sa gestion sans faute et son sens de l’alternance en ont fait le parfait animateur des Blacks, particulièrement lors du troisième et dernier test. Il s’avère aussi très costaud en défense. C’est déjà presque une référence mondiale à son poste. On n’est pas près de l’oublier… Le centre des Highlanders Tamati Ellison (29 ans) aura joué une vingtaine de minutes lors du dernier match sans qu’on y découvre vraiment l’étendue de son talent (il aura quand même mit un beau raffut à O’Driscoll). Ben Tameifuna (tout juste 20 ans), pilier des Chiefs au combien prometteur n’aura pas été testé.
Michael Hooper aura certainement trop peu joué sous le maillot des Wallabies
En Australie, ça aura été une toute autre affaire. Sur le squad de 41 sélectionné, neuf joueurs, tous néophytes au niveau international n’ont joué la moindre minute sur les quatre tests joués par les Wallabies. On a de quoi s’interroger sur l’utilité de sélectionner un groupe aussi large si autant de jeunes ne jouent pas par la suite. Très curieux! On pouvait croiser des garçons comme Hugh Pyle des Rebels (23 ans), Dominic Shipperley des Reds (21 ans) ou encore Jesse Mogg des Brumbies (23 ans), joueurs qui méritaient tout à fait de découvrir le haut niveau international. Les autres nouveaux ? Ils ont joué mais peu, trop peu. Un garçon comme Michael Hooper des Brumbies (20 ans), très bon flanker dans le style d’un Pocock n’a eu le droit qu’a moins de 40 minutes cumulées sur les quatre tests. Il fut de même pour David Dennis des Waratahs (26 ans) et Joseph Tomane des Brumbies (22 ans). Chez les Boks ou les Blacks, des joueurs proportionnellement du même calibre auront, eux, été testés. Bien dommage que de se priver d’un vivier de la sorte alors que Robbie Deans a justement très bien su par le passé tirer profit du réservoir impressionnant présent en Australie.
Michael Harris aura réussit la pénalité de la gagne lors du deuxième match contre les Gallois
Finalement, seuls Michael Harris des Reds (23 ans) et Cooper Vuna des Rebels (24 ans) ont tiré leurs épingles du jeu, et encore. Harris aura donné la victoire aux siens grâce à une pénalité excentrée dans les arrêts de jeu du deuxième match face au Pays de Galles. Lors de son seul match en tant que titulaire face à l’Ecosse, il n’aura pas été aidé par la météo dans son rôle de buteur (d’où un 2/4 dans ses tentatives). Dommage car en n°12, Pat McCabe n’aura rien fait d’extraordinaire. Pour le Four-Nations, Quade Cooper aura sans doute repris tous ses moyens et on imagine bien Berrick Barnes glisser en premier centre et ainsi barrer la route à Harris. Une place de titulaire semble compliquée à décrocher pour lui. Quant à Vuna, il se sera plus distinguer par un carton jaune pour plaquage dangereux lors du deuxième match face aux Gallois qu’autre chose. L’ancien treiziste aura en vérité touché peu de ballon avec pourtant deux matchs en tant que titulaire. Liam Gill (seulement 19 ans), s’il n’avait été pris avec la sélection des -20 ans dont il était d’ailleurs le capitaine aurait pu honorer sa première cape. Ce sera pour bientôt, tant ses qualités de plaqueur/gratteur font mouche avec les Reds.
En Argentine, on aura fait le choix de faire jouer beaucoup de jeunes dans le but d’avoir un groupe le plus compétitif possible pour le prochain Four-Nations qui s’annonce relevé pour eux. Choix qui s’est avéré très payant à en croire les deux premiers succès face à l’Italie mais surtout la France, moins dans le second test face aux Bleus.
La politique bien sudiste en tout cas de lancer des jeunes dans le grand bain rapidement est bel et bien source de satisfaction, tant par les performances de ces jeunes joueurs (on pense à Aaron Smith, Marcel Coetzee, etc.) que par les résultats probants de l’hémisphère Sud dans cette tournée estivale. Mieux que ça, ce choix audacieux de donner la chance aux jeunes est en total cohérence avec ce qu’on peut voire dans le Super Rugby. La formation et ce qui en suit semble très au point dans le Sud, notamment en Nouvelle-Zélande et en Afrique du Sud. Une politique dont les nations du Nord feraient bien se s’inspirer. En effet, très peu de joueurs étaient nouveaux dans les XV de départ irlandais, gallois et anglais.
Quoi qu’il en soit, tous ces « petits » nouveaux devraient pour la plupart participer au Four-Nations et ainsi tenter de se faire une place dans des effectifs à (très) forte concurrence. C’est en tout cas tout le mal qu’on leur souhaite.