Les résultats en trompe-l’œil du dernier G20 laissent une impression de tour de passe-passe qui veut nous faire croire que les tourmentes de la zone euro sont derrière nous. La meilleure preuve en est le projet (ce n’est donc pas une certitude !) de 120 milliards d’investissement pour la relance de la croissance. La zone euro compte 17 pays, ce qui représente 7 milliards pour chacun. Rappelons-nous que le « grand emprunt » souscrit par le dernier gouvernement Fillon a été de 37 milliards d’euros pour la seule France ! De plus, ces 120 milliards comprennent des fonds structurels existants et des « project bonds » destinés à financer de grands chantiers (vieille idée de J.Delors qui prônait l’Europe des grands projets), non précisés jusqu’à présent. Cela relativise fortement l’impression de victoire suscitée par ces 120 milliards ! Par contre, la certitude existe que les divergences entre l’Allemagne et la France persistent et contribuent à distendre les relations entre ces deux pays. Deux conceptions s’affrontent sans que l’on puisse dire aujourd’hui si un compromis véritablement opératoire est à l’horizon. Sous la pression des « nonistes », F. Hollande met l’accent prioritaire sur la reprise de la croissance et sur la solidarité européenne au détriment de l’intégration européenne qui nécessite la perte d’une partie de la souveraineté nationale. N’oublions pas, en effet, que le PS comporte, en son sein, des « nonistes » dont le plus éminent est l’actuel ministre des Affaires Etrangères, et qui sont, pour partie, souverainistes. Encore faut-il s’entendre sur ce terme. En effet, il existe deux souverainismes bien différents : celui qui se traduit par la souveraineté du peuple et celui qui veut dire la souveraineté de la Nation. Le premier se nomme démocratie, le second se nomme nationalisme. Les « nonistes » socialistes sont les défenseurs de la souveraineté de la Nation quitte à jouer avec le feu et provoquer (souhaiter ?) l’éclatement de la zone euro. En ce sens, ils se comportent en alliés objectifs des marchés spéculatifs qui font le même pari. L’Allemagne, principal contributeur de la zone euro et attachée à une monnaie forte et à une inflation faible, donne pour ces raisons la priorité à une intégration européenne plus forte, c’est-à-dire à un contrôle budgétaire des pays « dépensiers » (dont la France fait partie) avant de consentir à toute dépense dite d’investissement supplémentaire. Cette intransigeance allemande tient au fédéralisme et au fait que la Chancelière est obligée d’obtenir l’accord du Bundestag sur toute décision qu’elle pourrait prendre. Or, les eurosceptiques sont de plus en plus nombreux en Allemagne. Bref, malgré l’autosatisfaction française et l’apparente euphorie de la Bourse (nécessairement éphémère), la situation n’a, en réalité, guère évolué et l’Europe n’est pas sortie de ses difficultés. N’est-il pas étrange que plus personne ne parle de la Grèce alors que sa situation est toujours aussi catastrophique ? De même que le capitaine Haddock perd le sommeil pour ne savoir décider s’il doit dormir avec la barbe sur ou sous les draps, les responsables politiques européens se demandent s’il faut en priorité plus d’intégration ou plus de croissance. Le seul constat qui s’impose est que l’Europe n’a pas de grand leader.