Je n'ai pas la prétention d'apporter une solution au cas des sans-papiers mais il me faut bien avouer que l'interview donnée au Monde ce 28 juin par notre ministre de l'Intérieur me laisse perplexe.
Certes, on peut y relever de bonnes intentions : " Les régularisations doivent se faire en s'appuyant sur des critères précis, objectifs, compréhensibles [...] Ils ont été interprétés de manière beaucoup trop restrictive et n'ont pas été appliqués de manière uniforme sur l'ensemble du territoire par le précédent gouvernement. Une circulaire pour les préciser est donc en préparation ". Seul l'examen de cette circulaire permettra d'apprécier ces nouvelles conditions de régularisation.
Toutefois, dès à présent, il est possible de se poser des questions. En effet, les critères énoncés sont : " les années de présence en France, la situation par rapport au travail, les attaches familiales, la scolarisation des enfants ". Comment détermineront-ils une décision de régularisation ? Seront-ils considérés isolément, ou bien combinés avec des pondérations savantes ?
Fonctionneront-ils sur le mode feu rouge, feu vert, un travail ou des enfants scolarisés valant régularisation, ou bien seront-ils plus raffinés, avec pour le travail, seuls certains métiers ou, pour des enfants scolarisés, des conditions de nombre, d'âge, de niveau ? Et comment un sans-papier peut-il faire la preuve d'une présence continue en France ?
Cette politique comporte un ver dans le fruit. A la question de son interlocuteur : " La précision des critères pourrait-elle vous amener à un volet de régularisations plus ample que celui du gouvernement Fillon, qui était d'environ 30 000 par an ? ", Manuel Valls répond : " Non, je ne le crois pas ". Comment faire qu'une sélection sur des critères conduise à un volume défini à l'avance ? Nous butons là sur la différence qu'il y a entre un examen et un concours. Un examen ne permet pas de déterminer à l'avance combien il y aura de lauréats. La seule façon de limiter les élus est de mettre en place un concours, de classer les candidats et d'attribuer les places disponibles aux mieux classés.
Outre la difficulté qu'il y aurait à attribuer à chaque sans-papier une note d'aptitude à la régularisation, comment pourra-t-on mettre en place un mécanisme équitable sur tout le territoire et à toute période de l'année ?