C’est une proposition « choc ». L’Association nationale des Directeurs des Ressources Humaines (ANDRH) va soumettre au ministre du Travail requête visant supprimer trois jours fériés « chrétiens », en échange de trois autres jours de congés à poser librement, selon les informations d’Europe 1.L’ANDRH propose ainsi de conserver comme jours fériés Noël, le lundi de Pâques et le jour de la Toussaint, car « ces fêtes revêtent désormais une forte dimension sociétale », assure l’association, selon on ne sait trop quels critères ni quels arguments. L’objectif est de respecter la diversité de chacun dans les entreprises. L’idée serait ainsi “pour les salariés musulmans ou juifs de poser ces jours fériés lors des fêtes liées à leur religion.”. En bref, si les catholiques veulent chômer ils prennent un jour. Pour les autres ça n’a aucun sens. Chacun fait comme il veut. Chaque communauté s’imposera ses propres jours et ses propres fêtes. La commauté des communautés, la République française, n’est plus qu’une entité froidement gestionnaire des individualités de chacun.
La “diversité” prend donc le pas sur l’histoire et la cohésion française. Le multiculturalisme joue alors contre la culture, le “progrès” contre l’histoire et la différence contre l’identité. Il aura suffit de 30 ans d’immigration massive conjuguée à un siècle de déchristianisation pour changer totalement de cap, et s’enfoncer dans une idéologie humaniste dépourvue de liens terrestres, incarnés, sociaux. Qu’est-ce qui assure le lien social, sinon le ciment d’un en-commun partageable, fait de religiosité et de mythologie populaire ? Comment, alors même que les défis de notre civilisation sont ceux de la ré-harmonisation de la vie des citoyens, frapper encore dans le ciment traditionnel de la société ? Le vieux combat droite/gauche se trouve cristallisé dans cette question des jours fériés : combat idéologique entre l’enracinement culturel (défendu par la droite) et l’émancipation déconstructrice (défendue par la gauche).
L’idée de République est une fine dialectique entre l’enracinement et l’émancipation, entre les traditions populaires empreintes de religiosité et une libération des personnes. Cependant rien ne saurait fonctionner sans une identité fonctionelle et une cohésion d’ensemble. “Pour être confirmé dans mon identité, je dépends entièrement des autres“, disait Hannah Arendt, ce qui suppose qu’il y ait des autres. Lorsqu’une société se dissout totalement dans un universalisme abscont, elle ne saurait avoir des autres : elle n’est plus rien, puisqu’elle est tout ; elle n’est plus un corps social, puisqu’elle n’a pas la continuité temporelle (destruction de l’histoire) et spatiale (frontières grandes ouvertes) que requiert le concept philosophique de “corps social”.
Tant au plan spirituel qu’au plan somatique, nul ne peux vivre en conflit avec soi-même. L’identité d’une nation est une question incessante, ininterrompue. Mais elle dit un certain rapport à soi apaisé, où l’on se reconnaît comme soi. Lorsque la discontinuité historique et épistémologique prend le pas sur l’effort d’harmonie générale et de cohésion sociale, le corps en question est gravement malade. L’“enrichissement” apportées par les différentes cultures s’impose comme un progrès humaniste, mais suivant une apologie ininterrogée du multiple, qui, de la dispersion communautairiste et individualiste des valeurs, se tisse une contre-finalité : celle du relativisme individualiste qui s’oppose à la cohésion culturelle bien pesée d’une société civile.Les Anciens grecs, l’autre voix du double choeur de notre civilisation occidentale, bien au fait du problème politique qui est celui du vivre-ensemble, ont conceptualisé la République et la démocratie à partir d’un destin commun : « ce n’est pas seulement pour vivre ensemble, dit Aristote, c’est pour bien vivre ensemble que l’on s’est mis en communauté ». Expression maitresse oublié aujourd’hui, le “bien-vivre-ensemble” ne saurait s’exempter ni de son histoire, dans laquelle elle s’enracine, ni de sa finalité commune : le bonheur.