Depuis quelques temps, il y a dans l'air québécois comme une atmosphère de léger découragement.
Serait-ce la faute de ces records de neige battus depuis une semaine (plus de 5m en ville, du jamais enregistré de mémoire de caribou) ? Bercés par la symphonie des toits qui s'effondrent les uns après les autres sous les conséquents amas de flocons, les Québécois déambulent dans les rues en évitant de glisser tous les deux mètres, et répètent aux étrangers que c'est pas dieu possible, tout ce bastringue, on sortira jamais de cet hiver, c'est certainement la faute des libéraux ou d'Ottawa.
J'ai beau leur dire: hé, c'est magnifique ! Regardez-moi ces arbres timburtoniens qui ploient comme Caïn sous le péché. Et c'est bon quand c'est frette ! Faut pas se plaindre : les Français, quand ils marchent dans la neige pour se rendre au boulot, c'est qu'ils bossent à Courchevel (vous souvenez-vous d'un véritable hiver, Parisiens mes amis ? Je ne parle pas de cette fine gelée grisâtre qui paralyse le métro une fois tous les trois ans). Allons, ce n'est pas un petit -30°C fin mars qui va nous empêcher de batifoler dans les parcs et d'avaler le bon vent fou comme nous le faisions étant gosses, lors de nos camps scouts en Sibérie ! Ah, les rudes marches pieds et torse nus, le hurlement des loups, tout ça.
Mais bizarrement, bien que mon visage avenant et mes yeux clairs expriment la joie la plus béate, je ne m'attire en retour que des regards de haine.
Je vais vous le dire : après avoir vécu le plus long et le plus dru des hivers québécois, nous ne pouvons que partir en quête d'autres records. Vivement l'été le plus humide de l'Amazonie et les meilleures sécheresses d'Afrique ! Merci, global warming !