Titre original : Safe
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Boaz Yakin
Distribution : Jason Statham, Catherine Chan, Robert John Burke, Chris Sarandon, Anson Mount, James Hong, Reggie Lee, Sandor Tecsy, Joseph Sikora…
Genre : Action/Policier
Date de sortie : 27 juin 2012
Le Pitch :
Luke Wright, un ancien flic tombé en disgrâce, croise par hasard la route d’une petite fille convoitée par la mafia russe et les triades chinoises. Cette dernière, dotée d’une mémoire exceptionnelle, détient en effet le code d’un mystérieux coffre-fort. Luke décide de protéger la gamine et de régler quelques comptes au passage, auprès des assassins de sa femme, qui se trouvent impliqués dans l’affaire…
La Critique :
« - T’as de sacrées couilles Luke !
- Ouais, mes cuisses se touchent pas. »
Difficile d’exprimer le bonheur qui accompagne de telles répliques quand on est soit-même un fervent amateur d’un certain cinéma d’action qui, au cœur des glorieuses années 80, régnait en maitre sur le box office. On appelle ça des punchlines. Des bons mots qui suivent ou qui précèdent les coups de boule et autres exécutions sommaires, que l’on trouve souvent dans des longs-métrages jubilatoires. Tous les fans du genre gardent en tête, les « considère ça comme un divorce ! » (Total Recall), les « aiguise-moi ça ! » (Predator) ou encore les « j’ai vidé quelques chargeurs » (Rambo 3). Des missives verbales qui claquent autant que des coups de feu, assénés par des héros de cinéma salement burnés, aficionados d’un humour jouissif et décalé.
Les années 80 ont vu fleurir de nombreux maitres étalons de la discipline. Commando, Cobra, Rambo 3 ou Double Détente, les exemples sont nombreux et réveillent bien souvent des souvenirs émus chez ceux qui ont bâti leur cinéphilie là-dessus. Aujourd’hui, difficile de trouver son bonheur dans un cinéma d’action étrangement aseptisé, riche en effets numériques et autres bagarres cablées encombrantes. Une grande majorité des productions modernes sont dépourvues de saveur et semblent avoir perdu la recette des ces punchlines qui tuent (et de tout ce que cela comprend).
On peut ainsi compter les grands films d’action de ces dix dernières années sur les doigts d’une seule main. Et Safe en fait partie.
À vrai dire, Safe est à ce jour, l’un des meilleurs films d’action de l’année. Moins démonstratif que The Raid et plus subtil (si, si), le film de Boaz Yakin démontre non seulement d’un savoir-faire flagrant, mais met en avant un profond désir sincère de rameuter l’état d’esprit des œuvres précédemment citées. Ce qui renvoi à la réplique qui ouvre cette critique. Une réplique phare pour un film qui n’y va pas par quatre chemins et qui, dans son genre, est loin d’être la seule. C’est bien simple : Safe est un pur festival de punchlines ! Toujours judicieusement placées par le héros, ces dernières font mouche à tous les coups. On se retrouve alors à rire de bon cœur tout en prenant les coups de latte de Statham en pleine poire. Du spectacle comme on l’aime. Sans cynisme et respectueux. Quand certains pourront jeter sur Safe un regard plein de mépris et de condescendance, préférant se complaire devant le dernier trip intello alambiqué, les autres, ceux qui ne considèrent pas le genre comme une sous-catégorie négligeable, prendront leur pied comme rarement.
Boaz Yakin réalise ici un petit bijou du genre. Il impressionne grâce à une caméra toujours pertinente dans ses placements et par une écriture plus fine que prévu. Niveau spectacle, Safe jouit d’un montage virtuose, toujours en adéquation avec l’action et avec son propos (merci Frédéric Thoraval, qui a entre autres bossé sur Taken). La lisibilité est parfaite, même lors des scènes où les coups de feu et de poing partent dans tous les sens. C’est très bien vu et complètement raccord avec les intentions d’un pitch furieusement efficace.
Car non content d’emballer son film avec hargne et énergie, Boaz Yakin a aussi tenu à peaufiner son histoire. Classique certes mais plutôt bien amené, le scénario de Safe prend le temps de poser le décors, de présenter les personnages, et ne perd jamais de vu ses enjeux. Luke Wright, le personnage de Statham est un bourrin adepte de la castagne, mais pas seulement. Ses motivations font de lui un héros urbain torturé, mais adepte de la gaudriole fatale. Sa verve n’a d’égal que ses tourments, et la relation qu’il entretient avec la gamine qu’il tente de protéger pendant une partie du métrage de conférer au script une profondeur insoupçonnée et juste. Safe ne sonne pas si creux que cela. Une épaisseur qui fait office de bonus et qui fait plaisir à voir. Du début à la fin, Yakin prouve quel fan de cinéma d’action il est. Il ne perd jamais le fil et se soucie en permanence de concilier le spectaculaire des bastons et des gunfights, à l’émotion qui peut se dégager de son scénario.
Difficile de ne pas s’incliner bien bas quand on a grandi avec Tango & Cash, Le Contrat et Justice Sauvage. C’est un fait, Safe est une réussite !
Un hit instantané qui jouit de la présence magnétique d’un Statham au top de sa forme et de son charisme. À la fois utilisé pour la nuance dont il peut faire preuve quand il est bien dirigé et pour ses capacités physiques bien burinées, le comédien anglais porte Safe à bout de bras et met en valeur ses partenaires. De Catherine Chan, la petite fille, très juste à Chris Sarandon (Vampire vous avez dit vampire ?), visiblement content de se retrouver au premier plan, tout le monde est à la fête. Comme si l’intégralité de la distribution avait saisi le respect du réalisateur. Ici, c’est la fête à la claque mais pas que. Sur tous les plans, Safe touche au but, modestement et justement tout en s’assumant à 100%. Et punaise, ça fait du bien !
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Lawrence Bender Productions