Comme un coup du sort, l'INSEE a publié de terribles prévisions pour le reste de l'année. Cette note de conjoncture n'était qu'un portrait, à l'avance, d'une année ratée.
Avec deux mois de retard, l'INSEE dévoilait que combien le dernier plan d'augmentation d'impôts du gouvernement Sarkozy/Fillon allait plomber le pouvoir d'achat des ménages, d'une ampleur inégalée depuis 1984 !
Il n'avait échappé à personne que Nicolas Sarkozy n'est plus président. Il serait injuste d'accuser sa gestion trop longtemps des difficultés à venir du pays. Mais il est tout autant hors de question de s'exonérer d'un bilan. Pour l'heure, ce dernier est loin d'être achevé, et nous n'avons pas encore collectivement payé l'addition des années sarkozystes.
La gauche n'est en rien responsable de cette mauvaise séquence. Sarkozy nous a doublement gâché l'année.
Pourquoi l'INSEE abaisse-t-elle ses prévisions ?
Avant d'écouter les cris d'orfraie de quelques ex-Sarkofans contre un prétendu effet Hollande négatif sur notre conjoncture, il convenait de lire dans le détail les explications de l'INSEE.
Sa précédente note date de mars dernier. Les modifications entre cette livraison et la dernière publiée le 26 juin sont les suivantes:
- Le premier trimestre 2012 s'est révélé globalement conforme aux prévisions, grâce à un regain de dépenses publiques plus important que prévu : «L’investissement des entreprises non financières a reculé plus qu’attendu, mais par ailleurs la consommation publique a été plus dynamique que prévu ». Et la croissance des exportations a été « plus faible qu’attendu ».
- Au second trimestre 2012, la demande intérieure ne s'est pas redressée: « la demande intérieure finale hors stocks progresserait moins que prévu précédemment, ne contribuant pas à la croissance de l’activité, contre +0,2 point prévu en mars ». Plus précisément, la consommation des ménages se replierait au deuxième trimestre (-0,2 %).
La faute à la conjoncture ?
L'INSEE a bâti ses prévisions sur le contexte économique de la zone euro mais aussi sur les mesures du gouvernement Fillon/Sarkozy. La croissance économique, nulle aux deux premiers trimestres de l'année, ne redécollerait que « légèrement au second semestre » en France.
En cause, « un coup de frein sur les échanges mondiaux au deuxième trimestre ». Mais l'INSEE distingue la zone euro du reste des pays développés: l'institut prévoit une légère reprise de l'activité au second semestre, surtout dans les pays émergents grâce à une « impulsion budgétaire et monétaire dans les pays émergents ».
En fait, c'est la zone euro qui, une fois de plus, est pointée du doigt: « La différence de dynamisme entre les États-Unis (+0,6 % par trimestre) et le Japon (+0,4 % puis +0,5 %) d’un côté, et la zone euro (0,0 % puis + 0,1 %) de l’autre, resterait marquée. » On se souvient combien Nicolas Sarkozy, quand il était président, formait un merveilleux couple avec Angela Merkel. Ce couple damné ou condamnable, baptisé Merkozy, a plaidé l'écrasement des pays fautifs d'endettement et déficits par une austérité qui n'a que mieux précipiter notre chute collective. La zone euro, exceptée l'Allemagne, est en vrac. Certes, convaincre l'Union, et la zone euro en particulier, de privilégier la croissance n'est pas chose aisée. François Hollande le savait, et le réalise tous les jours. Mais Nicolas Sarkozy n'a même pas eut cette audace. Intérieurement, il n'était peut-être pas convaincu de cette spirale déflationniste et rigoriste. Mais pour sauver sa peau politique, il croyait que ramper devant sa voisine germanique lui serait d'une grande utilité. Il a perdu.
Aurait-il un jour résister pour plaider une autre voie, que nous aurions été contraints de l'exonérer de toute responsabilité dans cette prolongation de crise qui plombe l'exercice 2012.
Car l'INSEE, donc, nous prévoit le pire, ou presque.
Malgré le net ralentissement des prix à la consommation, les ménages européens verraient leur pouvoir d’achat reculer tout au long de l’année et réduiraient leurs dépenses de consommation.
L'Allemagne, évidemment, profiterait mieux que la France de ce rebond économique à l'étranger, grâce au dynamisme de ses exportations: « En Allemagne, l’activité marquerait le pas au deuxième trimestre (0,0 %) mais retrouverait ensuite un certain dynamisme (+0,3 % par trimestre) soutenue par la consommation des ménages et le redressement de la demande asiatique.» Cinq années de sarkozysme industriel n'ont servi qu'à vendre quelques navires Mistral à la Russie de Poutine.
Pour le reste, c'est bel et bien la Berezina.
... ou à Sarkozy ?
En matière de croissance, les prévisions sont donc légèrement revues à la baisse (+0,4% au lieu de +0,5% dans les éditions précédentes). La vraie nouveauté de cette note concerne le pouvoir d'achat des ménages.
Le revenu disponible brut des ménages, qui agrège tous les revenus, progresserait trop légèrement pour dépasser l'inflation: « En 2012, le revenu disponible brut (RDB) des ménages ralentirait sensiblement (+1,3 % après +2,6 %) ». Compte tenu de l'inflation susnommée, le pouvoir d'achat sera donc en baisse de 0,6%, une ampleur inégalée depuis 1984!
L'INSEE identifie deux causes à cette dégradation historique du pouvoir d'achat.
1. Les revenus avant impôt progresseront peu.
Les salaires nominaux augmenteraient de 2,5%, après 2,4 % en 2011. A noter que l'INSEE inclue l'effet du coup de pouce gouvernemental annoncé mardi. Mais l'inflation générale serait également faible, à 1,9%. Au final, les salaires réels augmenteraient donc très légèrement. Dans la Fonction publique, ils seraient carrément en baisse: « En termes réels, le salaire moyen par tête accentuerait son recul (-0,7 % en 2012 après -0,3 % en 2011)».
Les revenus de propriété vont également stagner: +0,2 % en 2012, contre +3,7 % en 2011. Mais pourquoi donc ? L'INSEE livre peu d'explications. Faut-il y voir un effet tardif de la crise du logement ?
Les prestations sociales versées aux ménages augmenteraient d'un même taux que l'an passé (+3,4%). Mais c'est l'effet combiné d'une réduction des prestations maladie et familiales décidées sous Sarkozy, et d'un gonflement des indemnités chômage (à cause de la progression continue du chômage!): « Les prestations d’assurance maladie seraient freinées par la modification du plafonnement des indemnités journalières. Par ailleurs, la revalorisation des allocations familiales a été limitée à 1 % et n’est intervenue cette année qu’au 1er avril au lieu du 1er janvier les années précédentes. » L'INSEE note que la « forte revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire à l’été » (+25 % soit 340 millions d’euros au second semestre), décidé par le gouvernement Ayrault, « dynamiserait également les prestations au second semestre 2012 ».
Globalement, les revenus avant impôts (salaires, capital, prestations) augmenteraient ainsi de 2,3% (contre 3,1% en 2011 et 2,0% en 2010).
2. La vraie dégradation provient des hausses d'impôts décidées sous Sarkozy: +6,7% de prélèvements sociaux et fiscaux en 2012, contre +5% en 2011 et +2,5% en 2010. Entre autres, l'INSEE prévoit une augmentation des impôts sur le revenu et le patrimoine de 10,1% en 2012, après une hausse de 6,6% en 2011, et 2,8% en 2010. La droite sarkozyste, qui criait au matraquage fiscal de la gauche revenue au pouvoir, avait une raison de plus de se taire. Non seulement les comptes publics nécessitaient d'être redressés, mais en plus leur ancien mentor avait été généreux en hausses des impôts juste avant de quitter l'Elysée.
Cette augmentation des taxes est d'autant plus fameuse qu'elle n'inclue pas la hausse de la TVA !
Conséquence logique, le revenu disponible brut n'augmenterait que de 1,3% cette année. Inflation déduite, les ménages devraient perdre 0,6% de pouvoir d'achat...
C'était donc officiellement confirmé, le pouvoir d'achat des ménages sera amputé par les dernières mesures du gouvernement Sarkozy/Fillon. Il fallut attendre 2012 pour constater les derniers dégâts du président du « travailler plus pour gagner plus » avait bien stabilisé le pouvoir d'achat « statistique » entre 2008 et 2011. Combien de temps encore allions-nous devoir faire ces bilans posthumes ?
Ce mercredi 27 juin, premier jour des soldes en France, François Hollande recevait Angela Merkel à l'Elysée, quelques heures avant un sommet européen que l'on prédit tendu. Il y avait des sourires de circonstances. La chancelière est crispée tant le président français lui résiste.
Mais pourquoi donc devrait-il se coucher ?
Pour imiter Sarko ?