S'évader par la lecture plutôt que par les armes. L'idée a séduit les autorités brésiliennes, qui proposeront bientôt aux détenus de quatre prisons fédérales surpeuplées une remise de peine de quatre jours pour chaque livre lu. Une douzaine d'œuvres littéraires, philosophiques, scientifiques ou classiques seront mises à disposition des prisonniers, qui pourront, en s'y plongeant, réduire leur temps de détention de quarante-huit jours maximum chaque année.
Ce programme, baptisé "La rédemption par la lecture", est aussi avantageux qu'exigeant. Les participants, sélectionnés par une commission spéciale, auront quatre semaines pour lire chaque ouvrage. Ils devront ensuite rédiger une dissertation "respectant l'usage des paragraphes, de l'orthographe, des marges et lisiblement présentée", d'après le Journal officiel brésilien.
La méthode a déjà fait ses preuves aux Etats-Unis, où, depuis 1991, des détenus – récidivistes de préférence – se retrouvent régulièrement sur le campus de
l'université de Dartmouth pour y parler littérature. John Steinbeck, Jack London... Le corpus étudié est riche, la parole libre. Juges et conseillers d'insertion y participent.
Réduire la récidive
"En acceptant de lire six livres en douze semaines, et d'en discuter, le prévenu échappe à la prison ferme ou sort de prison avant terme. Il peut aussi, à la discrétion du juge, bénéficier d'une remise de peine supplémentaire à l'issue du programme", explique Philippe Boulet-Gercourt dans Le Nouvel Observateur. Mais attention : la lecture des ouvrages est obligatoire
Inauguré par Robert Waxler, professeur à l'université du Massachussets, le projet s'est installé dans la durée et a essaimé jusqu'au Texas. Ses résultats sont indéniables : d'après une étude menée par les universitaires, "un échantillon type de délinquants affiche un taux de récidive de 45 %. Les participants au programme ? Moins de deux fois moins", note le reporter du Nouvel Observateur.
Lire aiderait donc à la réinsertion ? C'est en tout cas la conviction de François-Régis Hutin, le PDG d'Ouest-France
qui a décidé, en 2006, de distribuer gratuitement son journal à des
milliers de détenus de Bretagne, Pays de la Loire et Basse-Normandie. "La distribution du journal a changé miraculeusement l'atmosphère de la prison", expliquait en 2007
l'ancien directeur de la maison d'arrêt de Rennes Pascal Vion à une journaliste du Monde.
source: Le Monde