Romeo Dika : "Je viens de mettre sur le marché du disque un album qui est sorti en France et qui se porte plutôt bien"

Publié le 26 juin 2012 par Africahit

Par Mathurin Petsoko - 22/06/2012

«Je suis au regret de constater que ceux qui se plaignent que j’organise beaucoup de fêtes depuis des années n’ont rien pu faire malgré l’espace qui leur a été laissé»

© Journalducameroun.com Roméo Dika, artiste camerounais

L’année dernière vous avez embarqué tout le monde à Mvoméka, c’était un moment mémorable. Cette année apparemment vous n’êtes pas de la fête?
Le moment ne s’y prête pas. Vous savez qu’il y a beaucoup de gens qui se plaignent que j’organise beaucoup de fêtes depuis des années. C’est la raison pour laquelle j’ai bien voulu que la fête de la musique 2012 soit à leur charge. J’ai cru que les actions que le syndicat menait entrait dans l’ordre normal des choses, mais je me suis rendu compte que soit, mus par la jalousie, soit mus par des intérêts que je ne comprends pas beaucoup, il y a des gens qui se sont plaints. Alors j’ai dit que je vais laisser un peu que les autres essayent aussi de faire. Je suis simplement au grand regret de constater que malgré l’espace qui leur a été laissé, ils n’ont rien pu faire. 
Vous pensez que c'est un refrain qu’on aimerait entendre à l’occasion d’un évènement comme la fête de la musique?
Elle n’est pas agréable simplement parce qu’il y a certains qui ont pensé que quand on parle de la musique, ce n’est que la gestion du droit d’auteur. Moi je pense que la musique c’est quelque chose de plus large. Ceux qui font partie de mon état major, j’ai pu envoyer certains à l’étranger pour prester.

Vous ne prévoyez rien dans les salles ou dans les salons privés entre collègues?
Le syndicat et certains membres vont quand même se retrouver pour faire une petite fête très privée quelque part. Mais au lendemain de cette fête, c’est-à-dire entre le 22 et le 23, nous allons avoir une rencontre publique parce qu’il faudra bien que nous nous exprimions sur la question pour ne pas laisser que les gens continuent de tout mettre en œuvre pour tuer la musique camerounaise. 
Comment est-ce que vous trouvez l’offre musicale camerounaise aujourd’hui? Elle est capable d’être opposable aux sons que l’on écoute à l’international?
Moi je n’ai pas d’inquiétude pour la musique camerounaise puisque les albums des musiciens étrangers sont pour la plupart exécutés par des instrumentistes camerounais. Je pense qu’il n’y a pas eu meilleur bassiste que Richard Bona, Etienne Mappe etc. Dans la plupart des albums des musiciens ivoiriens et autres, les instrumentistes sont des camerounais. Personnellement moi je ne me plains pas. Je viens de mettre sur le marché du disque un album qui est sorti en France et qui se porte plutôt bien. Le problème de la musique à l’intérieur du Cameroun c’est plutôt cette guéguerre du droit d’auteur qui pourrit complètement la situation. Il faut à un moment donné que les ayants-droit prennent leurs responsabilités. 
En tant qu’artiste musicien de renommée internationale, vous faites partie de ses ayants-droit, ce qui signifie que vous êtes aussi impliqué.
Oui je suis impliqué et c’est la raison pour laquelle je suis en train de dire que nous allons prendre nos responsabilités. En ce qui me concerne, je m’engage pour que les choses reviennent un peu à la normale dans les semaines qui suivent.

Que pensez-vous de ces musiques dont l’inspiration se situe toujours en-dessous de la ceinture et qui inondent la scène musicale camerounaise?
Je voudrais tout simplement vous répondre en vous disant que ce sont malheureusement ces musiques qui marchent le mieux. Ce qui veut dire que la société camerounaise en redemande. 
Mais cela n’empêche pas quand même qu’on prenne de la hauteur dans les thématiques?
Oui je suis très gêné. Ça je ne peux pas le cacher. Mais puisque c’est ce qui marche, je dis qu’il y a un public qui se retrouve là-dedans. Maintenant, est-ce qu’il y a des moyens pour permettre à ces jeunes qui diffusent ce genre de musique de changer? Je pense qu’il y a des moyens. Pour qu’il y ait ces moyens, il faut déjà que les aînés prennent leurs responsabilités; parce que si les aînés se comportent eux-mêmes comme des négriers, il est tout à fait normal que perdus dans ce désert que constitue le monde de la musique, que la jeunesse ne puisse pas avoir des repère. Aujourd’hui, je pense que la perte des repères ne permet pas qu’il y ait une certaine création profonde et sincère. 
Dans les années 1999-2000, vous avez lancé une croisade contre la piraterie. Aujourd’hui vous avez baissé les bras, est-ce que vous vous avoué vaincu?
Nous ne pouvons pas être défaits. La piraterie est l’exploitation des formes. La forme physique et la forme numérique. Nous sommes d’abord en train de combattre sa forme numérique parce qu’elle rapporte gros. Nous avons déjà eu un petit succès et lorsque nous allons trouver entièrement du succès dans le domaine du numérique, nous allons nous déporter vers le domaine analogique. Mais il ne faut pas oublier une chose. Moi je l’ai toujours dis depuis dix ans que, tant que nous ne proposerons pas à l’Etat une solution de reconversion pour la centaine de milliers de jeunes camerounais qui trouvent leur pitance dans ce domaine, cela posera un problème. Je suis en train de réfléchir sur comment faire en sorte que nous puissions reconvertir ces compatriotes pour qu’ils puissent contribuer à élargir l’assiette de recettes de la consommation de la musique camerounaise au plan analogique.