Milkymee est une artiste qu’on a tendance à bien souvent classer dans la catégorie folk. Cependant au delà d’un certain genre où le paysage semble se contenter de lisser une agréable image dite “féminine”, Milkymee nous emmène dans un univers plus subtil : celui de ses origines venant du punk rock, des riot girls, des années 90.
Avec une voix toute particulière, et un charisme d’exception, elle raconte ses propres expériences où se mêlent grâce, mélodies mélancoliques et vaporeuses, parfois sombres et bien souvent intimement énervées.
Après deux albums « Songs For Herr Nicke » en 2006 et « To All the Ladies in the Place with Style & Grace » en 2010, Milkymee nous entraîne dans ses rêveries gracieusement mélancoliques, aux multiples sonorités électroniques souvent mêlées de rage et de douceur avec un troisième album « Borders » qui sortira très bientôt ! (Le single A Little bit too Fast est disponible sur Itunes : itunes.apple.com/fr/album/a-little-bit-too-fast-single/id512324565).
Rencontrer Milkymee, c’est plus qu’agréable, non seulement tu découvres une artiste intéressante et passionnée mais il y a eu cette petite étincelle que j’ai toujours aimé retrouver chez certains artistes. Milkymee est authentique, simple et agréable, passionnée et talentueuse, et puis un sourire à te faire oublier Winona Ryder !
Crédit Photo : Sarah Bastin
Au lieu de te présenter, j’aimerai bien que tu me parles plutôt de ton éducation musicale. Quand on est la petite soeur des talentueux dDamage, c’est un peu dur de trouver sa place ?
Je dirai que ça été différent niveau éducation musicale (sourire). On a grandi dans une petite maison, ma chambre était juste à coté de celle de mes frères (dDamage) et je devais supporter un peu leur univers musicale de l’époque qui n’était pas vraiment le mien. Il y avait pas mal de hip-hop, de rock, de punk, de musique noise, etc. Ils écoutaient donc leur musique très fort et je dois dire que ça m’a beaucoup influencé (rires).
Mais à aucun moment mes deux frères m’ont appris à jouer de la musique ou m’ont mis un instrument entre les mains, j’ai dû apprendre toute seule. J’ai commencé sur le tard à jouer de la guitare, vers 16-17 ans, mais sans aucun but précis. J’ai même joué dans quelques formations grunge ou punk où je criais très fort (rires).
Par contre tu as joué sur un des albums de tes frères, non ?
J’ai chanté sur le second album de mes frères, dDamage, Harsh Reality Of Daily Life qui est sorti en 2001.
Et avant « Songs For Herr Nicke » en 2006, y a eu d’autres collaborations ?
Avant mon premier album « Songs For Herr Nicke » chez Tsunami-addiction, j’ai sorti en 2002 une chanson sur une compilation chez cette même maison de disque. C’était sur la compilation « Toxic Girls ! » et j’avais participé avec ma chanson Snowballing, que j’ai faite avec mon frère JB.
Ce que je trouve désolant avec ton premier album, qui je dois bien avouer ce fut une agréable claque sonore et une de mes plus belles découvertes musicales, c’est qu’on t’avait étiqueté « artiste folk » et finalement tu fais tout sauf de la folk …
Artwork by Event10 – Photography: Charlotte Leduc
Il y a eu ce truc de quelqu’un qui prend une guitare et qui raconte une histoire basée sur sa propre expérience, on a dit de moi que j’étais une troubadour parce que je racontais ma vie avec ma guitare (sourire). En vérité, j’écoute énormément de choses et quand tu ouvres grand tes oreilles et tu écoutes mes morceaux ben ce n’est absolument pas folk ! Mais je n’essaye pas de me démarquer ou de rentrer dans une case, je fais de la musique selon mes envies.
Par contre, tu es bien d’accord avec moi qu’on retrouve un petit paradoxe dans ta musique, entre la douceur de tes mélodies et le côté rageur des paroles ?
C’est inhérent chez moi, je ne maîtrise pas en fait. Je fais de la musique douce qui ne l’est pas (sourire), surtout quand tu lis les paroles. ça sort comme ça vient, je ne contrôle pas (rires).
Avec Milkymee, l’inspiration vient d’ailleurs ?
Le premier album »Songs For Herr Nicke » mais aussi « To All the Ladies in the Place, with Style & Grace » ont été composés en Suède, le nouvel album quant à lui est né au Japon. Tu as ce besoin d’être ailleurs pour écrire et composer ?
Quand j’étais plus jeune, j’avais aussi cette impression que le monde était grand (enfin je l’ai toujours cette impression), qu’il faut aller voir ailleurs parce que c’est important de casser ses habitudes, de côtoyer d’autres cultures d’autres personnes, c’était et c’est toujours une grande inspiration pour ma musique.
Aujourd’hui, je suis arrivée à un point où je me dis que c’est très important de trouver un chez soi, chez moi c’est Paris (sourire). Donc concernant les compositions futures, je pense que j’aurai de moins en moins envie de voyager pour créer de nouvelles chansons.
Mis à part les lieux de composition, j’ai remarqué aussi une évolution musicale depuis le premier album. »Songs For Herr Nicke » s’inscrivait dans une tradition folk, avec « To All the Ladies in the Place, with Style & Grace« on a eu affaire à plusieurs facettes de Milkymee mais aussi de belles expérimentations sonores.
Effectivement, plus tu grandis et plus tu baisses la garde (rires). J’ai aussi l’impression que je regarde mieux en face mes émotions et que j’arrive finalement à me dévoiler de plus en plus. Mais je ne crois pas à cette mention d’album de maturité, j’espère faire 20 albums dans ma vie et on verra comment ils évolueront (sourire).
Il y a aussi un petit quelque chose dans la voix …
Ouais pas faux, je pousse ma voix beaucoup plus, il y a quelque chose de plus « lâchée » en fait !
Burn Don’t Freeze et son côté Undergound …
Ce qui m’a toujours plu chez toi, c’est aussi ce coté authentique, pas de formatage et tu vas au culot souvent. Exemple avec Burn Don’t Freeze que tu avais mise en téléchargement gratuit. C’était de belles démos avec de fausses notes et des guitares désacordées !
(rires) Je voulais montrer aux gens que ça commençait avec cela, dans une chambre avec une guitare mal accordée ! Je trouve que cette première étape de travail est hyper intéressante, avec toutes mes démos crapoteuses et leurs fausses notes, les mots tous pétés qui n’intéresseront pas beaucoup de personnes, ça ne passera jamais à la radio mais elles témoignent d’un acte créatif initial, c’est authentique et vrai !
« Borders », un mélange de douleur et de sublime ?
Photographe : Kira Bunse
Styliste : Tanja Reisch
Make-Up & Hair : Sariye Kozan
Le prochain album s’appelera BORDERS, un clin d’oeil au travail de l’artiste israélienne Sigalit Landau ?
Je suis tombée il y a un an et demi, dans une expo, sur cette fameuse vidéo BARBED HULA, une spectaculaire mise en scène où Sigalit Landau pratique nue du Hula Hoop en fil barbelé sur une plage israélienne. Je me suis prise cela en plein fouet, ça me parlait vachement parce qu’il est question de frontières que ça soit sur une carte, ou une frontière humaine etc.
Il n’y a pas que la musique dans tes inspirations ?
Je parlais avec mon grand frère et il me racontait son dernier concert qu’il avait vu et qui l’avait énormément inspiré. Il m’a demandé à son tour si j’avais pris des claques musicales dernièrement. En vérité, tout ce qui m’inspire ne vient pas de la musique. C’est plus l’art vidéo, la peinture, la photographie, la politique, le quotidien, etc.
Revenons à Borders, l’écriture de cet album a commencé quand ?
J’ai commencé l’écriture de l’album en 2010, je suis partie en résidence par le biais du ministère de la culture. J’ai été sélectionnée par la Villa Kujoyama à Kyoto, qui se veut l’équivalent de la Villa Médicis mais au Japon. Ce que j’ai voulu faire à la base c’est composer, écrire et mélanger mes sonorités avec celles des instruments traditionnels japonais. J’ai monté un groupe éphémère là-bas et on a fait une tournée (sourire). On a utilisé du Koto, une sorte de harpe japonaise, du shamisen, c’était très plaisant comme expérience.
Et donc Borders sera un mélange de ton univers et ces sonorités japonaises ?
Pas vraiment, mais par contre quand j’étais au Japon, j’ai enregistré énormément de sons de la rue, des sons de voitures, des sons de pluie, de feux d’artifices et j’ai intégré cela dans mon album (grand sourire).
Avant la sortie de cet album tant attendu, tu nous offres un bel EP Before The Truth, 6 titres sur lequel on retrouve ton dernier single A Little Bit Too Fast
Je trouvais cela intéressant de sortir un EP avant, il y a des remix de groupes que j’aiment beaucoup dont un qui s’appelle Battant. Il y a aussi Kid North, des jeunes parisiennes qui signeront sur le label Tsunami-addiction bientôt. Ils ont interprété mon travail d’une manière très intéressante et on va sortir ce bel EP sous format vinyle, je t’assure ça sera vraiment très beau !
Ce qui s’est passé aussi c’est que j’ai signé une licence avec Sony, c’est une très très bonne nouvelle mais comme il y a un nouveau partenaire, on voit les choses à plus grande échelle et on a dû ralentir un peu le processus. Mais Borders sera dans les bacs en octobre 2012, un peu de patience.
Dernière question : Avec Borders, tu as eu ce désir de ne pas te répéter ?
J’ai voulu mettre de la délicatesse, des sons qui sont issus de mon quotidien mais que j’ai complètement démoli et détruit à travers des effets (sourire), j’essaye vraiment de dynamiter les lois du genre et du style en faisant ma musique sans penser à l’étiquette folk. J’espère aller plus loin et dépasser mes limites.
Je ne suis pas journaliste, si je continue à parler je vais mal défendre mon album (rires), je te laisse cette opportunité (rires).
ça marche (sourire), je vais essayer de pas trop dire du mal de Borders !
Pour fêter la sortie de l’ EP- 6 titres BEFORE THE TRUTH, incluant des remixes inédits de BATTANT et KID NORTH, Milkymee investit le Point Ephémère (avec une toute nouvelle formation avec guitare, batterie, synthé, …) en invitant ces deux groupes à se joindre à elle pour sa release party.
En exclu et pour ouvrir le bal, les 5 garçons de KID NORTH nous feront découvrir leur univers indé-éléctro-rock, pour la première fois au Point Ephémère. Au départ projet solo de Mathieu Artu (RQTN), KID NORTH devient rapidement une réelle entité avec l’arrivée d’Axel Dallou (Radius System) à la basse, Gregory Hoepffner (Radius System, Dawnshape) à la batterie, Gary Royant (Admiral’s Arms) à la guitare et Antoine Ollivier (Dawnshape) aux claviers en Octobre 2011.
http://kidnorth.net/
Les anglais de BATTANT, groupe phare du label Kill the Dj, dont le dernier album AS I RIDE WITH NO HORSES est un concentré de rock à l’état sensible et fiévreux, se feront quant à eux la mission de clôturer cette soirée comme il se doit.
Plus de deux ans après le très énervé No Head, Chloé Raunet revient sur scène pour défendre As I ride with No Horse le nouvel album rageur et rêveur de Battant. Tempo ralenti, Battant semble avoir trouvé le calme après la tempête… Méfiance, car si les nerfs sont domptés, la tension est toujours élevée.
http://www.myspace.com/battantbattant
Rendez-vous donc le 27 juin au Point Éphémère pour cette excellente soirée et fêter le nouvel EP de Milkymee comme il se doit !
14 euros en prévente (conseillée)
15 euros sur place.http://www.digitick.com/battant-milkymee-kid-north-vinyle-de-milkymee-offert-concert-point-ephemere-paris-27-juin-2012-css5-pointephemere-pg101-ri1255247.html
Remerciements : Jeremy Richet, Brigitte Batcave et l’enivrante Milkymee
Crédit Photo : Sarah Bastin