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Le fait de rouler aux antipodes, la tête à l’envers n’a pas chamboulé les habitudes du championnat. Un championnat ou le suspense est aux abonnés absents. Une fois de plus le déroulement de la course fut le même, le podium connu dès le soir du premier jour.
Comme à l’accoutumé, les pilotes Ford ont anéanti leurs chances dès le premier jour. Pour la deuxième fois en 2 rallyes consécutifs, Solberg a fait un choix pneumatique à la gomme ! Il est parti en pneus durs sur une surface souple arrosée par les pluies. Le Viking se condamnait une énième fois cette saison, dès le début, à une course-poursuite. Quelle idiotie, car s’en est une, quel pari a-t-il voulu tenté ? Comment lui et l’équipe ont-ils pu se planter encore une fois. Ils ont été les seuls parmi les tops à faire l’erreur.
Latvala fut fidèle à lui-même, une fois de plus. Parti sur un bon rythme, il s’emmêla les roues dans une corde dès la première étape, bis repetitae, et empêtré dans du barbelé en prime ! Bref, Solberg et Latvala accusaient respectivement 1’39 et 4’56 de retard dès le premier soir.
Et comme d’habitude, Citroën avaient déjà fait le trou, Loeb devant Hirvonen pour 4’’, Novikov 3è à déjà 1’31. Course fini, tirez le rideau. Sauf que voilà, une fois n’est pas coutume, chez Citroën on s’est rappelé qu’on est en rallye pour aussi faire du sport. Yves Matton a annoncé qu’il laisserait ses pilotes se battre pour la victoire lors de la 2è journée. Ils avaient vraiment la tête à l’envers !
Mais voilà, mon esprit retord n’y croyait pas, doutait. Les pilotes Citroën étaient les seuls qui jouaient encore quelque chose à l’aurore de la 2è journée. Solberg ne ferait qu’une bouchée de Novikov, pour ensuite rallier l’arrivée en 3è position, comme d’hab’ quoi ! Donc si les chevrons devaient vraiment se battre, logiquement ils auraient dû accaparer les scratches et creuser l’écart sur le 3è. Bein pas vraiment en fait ! Au cours des 7 spéciales de samedi, Loeb, Lavala et Solberg ont chacun signé 2 meilleurs temps, un seul petit pour Hirvonen (le dernier du jour). La veille, Loeb en avait signé 5 contre 2 pour son homme lige. Au soir de cette 2è journée, Loeb devançait Monsieur Numéro Deux de 6’’4, Solberg 3è avait même repris un peu de temps alors qu’il n’avait plus rien à espérer, et était à 1’33. Donc je pense que malgré les déclarations de Matton, les positions étaient figées depuis vendredi soir. CQFD. C’est le scénario immuable de la saison, une journée de course, le temps que Loeb prenne l’avantage sur son écuyer, et que Ford se soit fait hara-kiri. Le reste se résume à une procession vers l’arrivée.
Encore une fois, le samedi et le dimanche étaient dédiés aux jeunes pousses, Novikov, Neuville et Tanak. Car depuis le début de saison, il n’y a que ces 3 chiffonniers pour animer les 2è et 3è étapes, au gré de certains chronos flatteurs (lorsque devant ça n’attaque plus vraiment), et quelques erreurs et passages par le rallye2. Des trois, le plus expérimenté est Novikov, son style est généreux, un peu trop même, laissant au passage de précieuses secondes dans ses travers trop prononcés. Mais c’est aussi le plus consistant. Il s’est acheté une conduite cette saison. Fini l’amalgame vitesse et précipitation, le voilà plus réfléchi. Il a perdu en panache, mais son compteur point le remercie. Tanak et Neuville sont un peu plus brouillons. Ils alternent bon chronos, et passages par la case rallye2. Mais ce weekend ils ont livré un rallye plus consistant. La lutte entre Tanak et Neuville valait le détour. Il semble bien que depuis quelques rallyes, le pilote Citroën prend l’ascendant sur l’espoir M-Sport. Neuville a commencé son dimanche de bon pied, par 2 scratches, mais Tanak semblait néanmoins difficilement prenable. Jeunesse doit se faire, dit-on, et en rallye ça passe par des tonneaux. Tanak est donc parti à la faute dans la 20è ES. C’est bien dommage, car sa course avait été excellente, et il ne lui restait que 2 ES à boucler, dont la Power Stage. Le protégé de Martin semble quelque peu perméable à la pression. Il n’en reste pas moins que leur duel fut beau. Il est a noté que les quelques secondes qui manquaient à Neuville pour vraiment être devant Tanak furent sans doute perdu le premier jour derrière ce flâneur de Nobre, quasi systématiquement rattrapé en spéciale !
Nous voici arrivé à une particularité bien risible et triste du WRC ; sa 3è division composée de chauffeurs. Leur lenteur, l’absence totale de la moindre technique de pilotage interdit qu’on leur accorde le titre de pilote. Ce sont donc des conducteurs du dimanche, fortunés, souhaitant faire villégiature à travers les plus belles routes mondiales. J’ai nommé les Block (qui n’y est jamais !), Nobre, Villagra et consorts. Ce n’est pas la première fois que le sympathique mais incroyablement mauvais Nobre gène ses suivants en spéciales. Il faudrait vraiment le faire partir systématiquement dernier des WRC, avec 3-4 minutes d’avance sur les SWRC suivantes. Ce petit groupe de joyeux drille est là pour accomplir leur hobby, rien de plus. Un point à sauver pour l’américain, de par sa renommée, sa communication moderne et énergique il participe à une certaine médiatisation de la discipline. Il est le plus populaire sur les bords de routes. Il est également vrai que c’est là qu’il y passe le plus clair de son temps ! Sa vidéo de gymkhana fut la plus visionnée sur YouTube l’an dernier. Il prouve qu’il y’a un potentiel médiatique pour le rallye, mais qu’il est incroyablement mal exploité.
Nous voilà donc à mi-parcours du championnat. Prochain rallye en Finlande, où Hirvonen, s’il s’en donne la peine, devrait être récompensé de sa loyauté sans faille par l’autorisation de gagner. A moins que Latvala et Solberg nous réservent une bonne surprise, un sursaut d’orgueil, de fierté et d’intelligence de course.
Paul Huertas.