POUR QUE CE SOIT UNE AUBADE
Tu souhaiterais sans doute le prosème dans son défaut de profusion, sa tenue de réserve, ses lacunes, son aplomb de fût, l’enfiévrant effeuillage pour accroître la soleillade sur les pulpes, depuis le cœur le plus secret jusqu’au cinabre le plus tendre. Tu le préfèrerais dans son nu d’avant-guipures, tout tension, des piments oiseaux rouges seul décor au mur blanc. Tu voudrais la fonte des glaces, la collision, le choc. Tu refuses les caresses mornes, les bluettes chagrines, l’allégresse tourment. Tu voudrais le prosème juste, et sans cesse plus ténu, comme fibrille d’assemblage à languette et encoche.
Sans doute voudrais-tu le prosème contus, moins musical encore qu’un perchis sans ramage ; qui susurrerait le désir, à mi-voix rauque un peu brouillée. De lui, tu attends à bon droit de vibrantes saccades, des spasmes de vie, tu répugnes aux croupissures. Sans doute l’aimerais-tu les mains pleines d’humus entre les lignes et les doigts dans tes boucles peuplées des senteurs d’hosanna, quatre-temps et rameaux ; un prosème de vent neuf, une secouée de brûlement.
Alors, peut-être, le prosème impulserait une infime convulsion qui, s’amplifiant, se transmettrait jusqu’à la nuque, point de fuite vers le zénith.
François Laur.