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Bartolone au perchoir, le reniement c’est maintenant

Publié le 22 juin 2012 par Lecridupeuple @cridupeuple

Alors, comme ça, Claude Bartolone est élu au “perchoir” : président de l’Assemblée nationale. Je ne sais plus quel héraut du Parti dit « sérieux » a osé tweeter, relatant sa probable élection, la candidature d’Elisabeth Guigou et la présidence du groupe PS à l’Assemblée pour Bruno Le Roux : « discrimination positive en faveur du 9-3 ». J’ai quand même failli m’étrangler en lisant cela, mon café en grains de la machine a soudain eu du mal à trouver le bon passage. Je ne vais pas m’étendre sur le parachutage en direct du Vaucluse de « Babeth » après son échec relatif là-bas. Ce serait laisser accroire que mon département est devenu au PS ce qu’il fut au PCF pendant longtemps : une zone d’atterrissage aisée pour barons en devenir.

Bartolone au perchoir, le reniement c’est maintenant

Je vais plutôt m’attacher sur Claude Bartolone, gentiment surnommé « le parrain » dans les couloirs du conseil général de la Seine-Saint-Denis ou ceux de la fédération départementale du parti dit « sérieux ». Le petit Claude, militant socialiste aux dents longues, grandi en Seine-Saint-Denis, au Pré-Saint-Gervais, sous la protection du maire d’alors, un bon vieux cacique comme on les aime –  ou pas. En 1981, à la faveur de la « vague rose », il devient député. Il ne va plus guère quitter les bancs de l’assemblée grâce à une circonscription assez taillée sur mesure. La gentrification qu’il mène en tant que maire à partir de 1995 aide bien à conforter son assise électorale.

Passons sur les divers épisodes de la vie politique du capo, lesquels sont relativement inintéressants tant que l’on n’est pas un spécialiste de la fabiusie dont il est un des piliers. La fabiusie, en passant, c’est ce système non idéologique bâti par un ancien premier ministre où, en échange de la fidélité au chef on est assuré de son soutien indéfectible et de quelques prébendes toujours gratifiantes quand le militantisme est si aléatoire. En Seine-Saint-Denis, Barto caporalise la fédération socialiste avec un projet : mettre la main sur le conseil général en dézinguant les communistes qui y restent solidement accrochés. L’objectif sera atteint en 2008… Michel Pajon, député-maire de Noisy-le-Grand, rocardien devenu bartoloniste par la force des choses, résume : « Faut bien reconnaître que Claude est un garçon efficace ». Traduire : tout le petit monde socialiste du 93 lui doit quelque chose. Je ne ferai pas l’injure de demander à Frédéric Molossi, conseiller général de Montreuil et salarié de la fédération départementale PS, ce qu’il en pense…

Bartolone au perchoir, le reniement c’est maintenant

Claude Bartolone s’embarrasse peu de manières. Avec lui, il n’y a pas de problèmes, il n’y a que des solutions. Qui n’a pas en tête ce genre de scène. Il faut payer la salle louée pour tenir une réunion politique, les caisses de l’organisation sont vides. Un coup de fil à « Claude », qui vous reçoit dans son bureau de la mairie du Pré-Saint-Gervais, à côté de celui du maire en titre. Souriant, affable, « assied-toi mon camarade. Comment ça va ? La famille ? » Il fouille dans son tiroir et en extrait un beau billet de 200 euros. La salle est payée.

Suite à quelques retours de lecteurs, je dois préciser qu’il n’y a absolument rien d’illégal dans ce geste. Je pensais que les choses étaient claires mais vus vos retours, je tiens à clarifier.

Idem pour se faire réélire. Le redécoupage ciselé par Alain Marleix le met dans une situation délicate : sa circonscription est charcutée. L’essentiel du territoire est passé là où est élue Guigou. Qu’importe : pousse-toi de là que je m’y mette. Et voilà notre Barto réélu face au FN au 2e tour de la législative de 2012. Mais c’est qu’il est désormais atteint par le cumul des mandats, de son propre aveu. Je me suis souvenu, hier, lorsque je l’ai vu pérorer devant les caméras pour expliquer sa candidature au perchoir, d’un engagement pas si lointain. Je suis allé chercher et j’ai trouvé :

« En 2012, à l’occasion des élections législatives, je serai concerné par la règle de non-cumul des mandats. Il faudra donc choisir. Là, j’écouterai ce que me diront mes camarades et j’irai là où je serai le plus utile aux Français. Ou bien la gauche remporte l’élection présidentielle et redonne toute leur autonomie aux collectivités locales : dans cette hypothèse, je serais bien plus utile à la présidence du Conseil général de Seine-Saint-Denis. Ou bien la droite est reconduite à l’Elysée et acte définitivement la fin des départements : je serais alors plus utile comme député. »

Bartolone au perchoir, le reniement c’est maintenant

C’est ballot quand même quand on ne se souvient plus de ce que l’on a eu la stupidité d’écrire. Comme disaient les Romains : verbae volant, scriptae manent. Les paroles s’envolent, les écrits restent. Oh ! Je sais bien, Pasqua l’a résumé d’une formule restée fameuse : « En politique, les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent ». D’autres, plus attachés à l’éthique ou la parole donnée, pourraient dire : avec Bartolone, le reniement c’est maintenant. Connaissant le bonhomme, ce n’est pas parce qu’il va aller crécher au Palais-Bourbon qu’il ne gardera pas la main sur l’hôtel du département installé à Bobigny. Stéphane Troussel sait à quoi s’en tenir.

N’en reste pas moins que, pour moi, voir élu président de l’Assemblée nationale celui qui a mené la progression du parti dit « sérieux » en Seine-Saint-Denis contre le Parti Communiste puis contre le Front de Gauche, sonne comme une insulte personnelle.

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Bonus vidéo : Muttonheads “Trust You Again (Feat. Eden Martin)”   <– En vrai, j’aime beaucoup ce titre

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