J’aimerais pouvoir affirmer que « Meurtre Mystérieux à Manhattan » est le premier Woody Allen que j’ai vu au cinéma, mais je suis loin d’en être sûr alors que je me souviens distinctement y avoir vu « Coups de feu sur Broadway », que je me dois donc de considérer officiellement comme mon premier Woody sur grand écran. Avec son rendement de métronome, le réalisateur a appris au cinéphile en herbe que j’étais dans les années 90 qu’il est des rendez-vous qui ne se manquent pas et bercent le rythme régulier des saisons cinématographiques. Dans « Woody Allen : a documentary » de Robert B. Weide, Woody Allen dit que s’il s’évertue à réaliser un film par an, c’est parce que plus il en fait, plus il a de chances d’en concocter un bon de temps en temps. Même si l’on peut penser qu’en faisant cela, il agrandit plutôt ses chances d’en faire des dispensables… Sa modestie transparaît à l’écran, autant que ses doutes dans ses capacités à faire de grands films. Il parle même comme s’il n’en avait jamais réalisé.
Dans le documentaire, un de ses collaborateurs dit que même dans ses films les moins réussis, il y a quelque chose, une patte qui justifie toujours le déplacement. A l’évidence, celui-là n’a jamais vu « Anything Else » pour oser affirmer cela. « Woody Allen : a documentary » ressemble parfois trop à une hagiographie du cinéaste, se contentant souvent de faire intervenir des acteurs ayant travaillé pour lui et venant dire à tour de rôle, face caméra, à quel point Woody Allen est un réalisateur exceeeeptionnel, un directeur d’acteurs hors pair, un génie comique i-né-ga-lable… On aimerait que le documentaire ose frayer plus hors de ces violons intempestifs, mais il remplit au moins une fonction essentielle : celle de donner envie de replonger dans les films de Woody.
Alors non Woody, je n’ai pas grandi dans le Brooklyn des années 40, mais quelque part, toi et moi, on a grandi ensemble, parfois pour le meilleur, d’autres pour le pire, mais avec suffisamment de bonheur le long du chemin pour que je reste fidèle, vaille que vaille.