Les communistes ont donc tranché : ce sera non au gouvernement ; oui à l’approfondissement du Front de Gauche. Le vote des militants est sans appel. « On a un parti uni », me dit Marie-Pierre Vieu, ma camarade des années UEC Toulouse. Car, oui, j’étais mercredi 20 juin au Palais de la Mutualité à Paris, accrédité presse pour la conférence nationale extraordinaire du PCF. J’y ai retrouvé des vieux complices à l’image de « Mapi », comme nous l’appelons. Des plus récents, même si ça date quand même : Alain Hayot, de nos combats vitrollais. Il y a aussi Lilianne Pierre, conseillère générale de Fontenay-sous-Bois avec qui mes rapports se sont améliorés dans la période Front de Gauche. Bref, je suis allé voir l’état d’esprit de mes camarades du PCF.
D’abord, j’y retrouve Laurent, l’ami d’Ariège, rencontré via twitter. L’ancien membre de la LCR participe à son premier grand raout PCF, qu’il a rejoint il y a neuf mois. L’occasion de lui demander comment il ressort de cette conférence nationale qui avait pour but d’approfondir l’analyse de la séquence entamée fin 2008 avec la création du Front de gauche et conclue par les élections présidentielles et législatives. Au soleil, Laurent rassemble ses esprits, un peu « saoulé » par la succession d’interventions. « Moi, j’étais venu pour faire le point avec mon parti, voir un peu où on en était, collectivement », précise celui qui aime se définir comme membre de la meute, dans le bon sens du terme. Chez les militants, on retrouve ça : le besoin d’appartenir, d’être partie prenante d’un truc plus grand que soi, qui nous rend aussi plus forts.
Laurent a un besoin, qu’il m’exprime net et sans bavure. « Il faut qu’on redéfinisse notre ligne politique, qu’on l’affirme. Les libéraux, eux, sont clairs avec ce qu’ils sont, ce qu’ils défendent. Nous, j’ai pas toujours l’impression. » Et la conférence nationale, de ce point de vue, ne lui a pas refilé la pêche. Faut dire que, à gauche, nos grand-messes de congrès, conférences nationales et autres, ne sont pas des moments de formation mais plutôt d’affirmation. Pourtant, aux terrasses des cafés voisins, ça échange dru, ça débat. Par petits groupes, peut être un peu beaucoup par affinités géographiques. En bref, on se mélange peu.
En cheminant, je retrouve Jean-Charles Nègre, conseiller général de Montreuil. Evidemment, cet homme de l’ombre rechigne à causer dans le poste, préférant s’effacer devant cette « génération Front de Gauche » qui grandit au sein du PCF. Mais on se connaît avec Jean-Charles et il finit par me parler bien que je tienne mon carnet de notes à la main. Il précise, en bon cadre, la nature du vote des communistes : « Les camarades ont validé notre non participation au gouvernement tout en observant une attitude constructive chaque fois que des mesures pourront améliorer le sort des gens. » Et de conclure cette tirade par un sourire comme je les aime chez lui : « En même temps, nous sommes lucides ». Marie-Pierre Vieu complète le propos : « Notre refus d’aller au gouvernement n’est pas une ligne de gauchiste. Nous voulons élargir la dynamique du Front de Gauche pour participer aux “bougés” qui peuvent faire réussir la gauche ».
Côté communistes, on est assez convaincu qu’un nouvel échec du parti qui a concentré le vote majoritaire, même si c’est une majorité relative, de la gauche aurait des conséquences lourdes pour l’ensemble des forces de gauche. Pour autant, Mapi ne cache pas les difficultés : « Il y a un rapprochement entre la social-démocratie et la droite sur la pseudo “nécessité” de l’austérité. Dans ce cadre, le Front de Gauche dérange ». Le PS s’est donné les moyens d’être majoritaire seul, y compris en s’attaquant aux députés Front de Gauche sortant. Résultat des courses : le FDG progresse en voix mais perd quasi 10 députés. L’analyse devra être poursuivie.
Surtout, nos amis communistes veulent mener une réflexion sur les objectifs politiques. « Nous devons rendre crédible l’idée de l’alternative, résume le Toulousain Pierre Lacaze. L’Humain d’abord nous a permis de marquer des points dans cette perspective. Il faut aussi se pencher sur le rapport des forces. » En clair, comment rendre possible le fait que le Front de Gauche devienne demain la composante politique majoritaire à gauche, devant le PS ? Côté cocos, on parle d’abord de renforcement. « 6 000 adhésions pendant la campagne, se félicite Jean-Charles Nègre. Surtout des jeunes. » Et comme les militants communistes sont généreux, ils proposent que toutes les composantes du Front de gauche fassent de même.
Se pose la question du Front de gauche, dans lequel les militants comme Françoise de Noisy-le-Grand « se sent(ent) bien ». Jean-Marc Coppola, l’ancien cheminot marseillais, que j’ai connu patron des communistes des Bouches-du-Rhône, résume les débats à sa manière. « On a bâti ensemble. Aujourd’hui, on a de belles fondations. Il faut aller plus loin. C’est notamment ceux qui sont revenus à la politique grâce au Front de gauche, ceux qui nous ont rejoint dans ces deux campagnes ». Et si le Front de Gauche devenait à la fois le moyen et la fin ? Marie-Pierre Vieu met néanmoins en garde ses propres camarades : « Attention ! Le Front de gauche n’est pas là pour soigner les maux du PCF. Notre parti doit continuer à se transformer ». Premier acquis donc, le Front de Gauche se nourrira des évolutions de chacun.
Maintenant, au-delà des composantes actuelles, comment les militants du PCF voient la place de ces milliers de citoyennes et de citoyens qui se sont impliqués dans nos campagnes mais ne veulent rejoindre aucune organisation ? Mon ami Montreuilllois, Jean-Charles, apporte sa réponse : « L’adhésion individuelle n’est pas une bonne solution. Il faut que nous créions ensemble de nouvelles formes d’implication. Osons le pari de l’intelligence ! » Pour les camarades, l’action sera aussi le moyen de cimenter cette implication. Françoise, l’amie de Noisy qui a participé activement à la campagne de ma Riva, tranche : « Nous avons besoin de mobilisations sur la 6e République, sur les droits des salariés, sur les salaires ». C’est aussi elle qui me file une information essentielle : non content de se prononcer pour la poursuite des assemblées citoyennes, les communistes ont mis au pot commun du Front de Gauche les ateliers législatifs pour associer les citoyens à l’écriture des propositions de loi que porteront les dix députés Front de Gauche. Merci Françoise et à bientôt ! Mes amitiés à Daniel.
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Françoise, c’est la blonde assise à droite de la photo (à gauche de l’orateur donc)
Post scriptum : à l’occasion de cette conférence nationale, j’ai eu un long échange avec Didier Le Reste, sur le Front de gauche en général et le Front des luttes en particulier. Comme cette question me tient à cœur, j’y reviendrai dans une note à part la semaine prochaine.
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Bonus vidéo : Kristin Hersh “Hope (live)”