Je ne vais pas vous raconter ma vie - pas maintenant - mais les médias sociaux m'aident à supporter une étrange solitude, celle d'un poisson rouge dans un bocal. Solitude muette, camisole invisible, emprisonnement comme ces trainspotters assis sur une chaise et qui regardent les trains qui passent. Facebook ou Twitter ne seraient pas là que ce serait invivable. Je ne vais pas vous raconter ce mal de vivre de n'être plus rien qu'un inconnu à qui l'on octroie des broutilles insignifiantes, des miettes de social sans attaches, sans lien. Alors je suis là, présent, mais absent car je tisse ma toile ailleurs et c'est bougrement salutaire. Dans les médias sociaux, je me reconnais, ils me reconnaissent. Pour ce que je suis, pour ce que je vaux. Pour mon histoire aussi. Tandis qu'ici, de reconnaissance, je n'en n'ai aucune sinon des sourires de pitié compassée, d'éphémères compatissances. Ici, je suis asocial, sans attache, sans lien, suspendu dans le vide opaque d'une triste indifférence de hall de gare. Je vais sur Facebook, sur Twitter, la tête dans l'écran à partager, tricoter, relier, papillonner. Un retweet, un Like, un poke, un repin sont autant de petites bulles d'oxygène nécessaires à ma survie. Alors on dira ce qu'on veut des geeks, des nolife, des nerds et autres solitaires qui passent leur vie sur la toile, mais en ce qui me concerne, actuellement, je vis cette situation comme du pain bénit, un secours, un...beignet.