Je l'avoue, j'ai cette année caressé l'espoir, en me calant sur un rythme de quatre séances de dédicaces (de 8 heures chacune) par mois, de pouvoir laisser tomber mon travail alimentaire pour me consacrer à plein temps à l'autoédition. L'expérience me prouve que mes revenus d'écriture, quoique en augmentation régulière année après année, ne sont pas suffisants pour cela. Et puis j'ai beau être un commercial, je me sens davantage auteur que vendeur. L'envie d'écrire me démange. "Connais-toi toi-même", dit le proverbe. Je me sentirais beaucoup plus équilibré, plus proche de ce que je suis en repassant à deux séances par mois. Ce sera le cas à partir du mois prochain (juillet). (Cela dit, je ne m'interdis pas de repasser à trois ou quatre pendant la période du lancement du troisième tome d'Ardalia en 2013.)
Questions-réponses :
Qu'en est-il du temps de travail alimentaire ?
Je reste à 3/5ème sur mon boulot alimentaire.
Il va donc y avoir une baisse de revenus ?
Oui, mais cela reste acceptable.
Cette décision s'explique-t-elle par des ventes insuffisantes ?
En 2011, j'ai vendu 821 livres papier et 93 ebooks. En 2012, j'en suis à 486 livres papier et 569 ebooks en un peu moins de 6 mois. C'est bien, mais cela reste insuffisant pour en vivre. Je ne suis pas prêt à faire les sacrifices pour vendre plus en papier, ou même pour maintenir ce niveau de vente.
La raison principale reste le désir d'écrire plus, et de satisfaire les quelques 300 lecteurs des deux premiers tomes d'Ardalia (plus de 1500 pour le premier) en sortant le troisième dès que possible en 2013.
Les ventes d'ebooks ne permettent donc pas de compléter suffisamment le papier ?
Pas en ce qui me concerne. Je vends mes romans à 2,99 € pour promouvoir l'ebook en tant que mode de lecture tant que les liseuses électroniques ne seront pas suffisamment bien implantées en France (à noter que les Cultura vont à présent vendre des Bookeen Odyssey). J'en vendrais moins si j'augmentais les prix.
Les ventes d'ebooks ont-elles baissé dernièrement ?
Oui, en ce qui me concerne. Elles ont été divisées par deux entre avril et mai et se stabilisent en juin (en gros, je passe d'une centaine d'ebooks par mois à une cinquantaine).
Y a-t-il lieu de s'inquiéter à ce sujet ?
Il faut regarder les chiffres sur l'année et non mois après mois. La tendance globale va vers un attrait plus grand de l'ebook, y compris en France. Les ventes d'ebooks vont remonter en fin d'année et début 2013.
La reprise du recueil SF Les Explorateurs a-t-elle permis de meilleures ventes ?
L'autoédition des Explorateurs a en effet permis de meilleures ventes, et notamment de compenser une baisse du nombre des deux premiers tomes du cycle d'Ardalia écoulés en version papier. Depuis que j'ai récupéré les droits des Explorateurs en novembre 2011, j'ai vendu 128 exemplaires de ce recueil en version papier. C'est plus du double des 61 ventes pour les dix premiers mois de 2011 de mon ancien éditeur, Lokomodo.
Cette décision de dédicacer moins remet-elle en cause l'autoédition comme mode de publication ?
Absolument pas.
Vaut-il mieux écrire le plus possible comme le conseille l'écrivain Dean Wesley Smith, ou bien écrire beaucoup mais mettre l'accent sur la promotion comme le fait l'auteur Joe Konrath ?
Cela dépend de la sensibilité de chacun. Si vous mettez tout ce que vous avez sur la promo, vous risquez de vous dégoûter de l'autoédition. D'éteindre la flamme. Je pense que la promotion est importante au début. Ensuite... Une base de lecteurs de 300 personnes me permettra-t-elle de faire connaître mes prochains romans ? L'avenir le dira. Mais mieux vaut ne pas trop les faire attendre.
Quant au rythme d'écriture, je me sens bien incapable d'écrire aussi vite que Joe Konrath ou Dean Wesley Smith. Mais j'essaie de ne pas trop me comparer aux autres, en règle générale.
Qu'en est-il des libraires et de l'opération de remise à 45% pour dix livres achetés ?
Aucune commande de ce côté, en dépit des conditions de livraison très favorables (livraison gratuite en trois jours après règlement, effectuée par DHL). Les libraires qui me passent commande le font à la requête expresse des lecteurs. Je continue à vendre 98% de mes livres papier en dédicace.
Mais il y a des libraires indépendants en France ? Pourquoi ne passeraient-ils pas par des auteurs indépendants ?
Ils n'y sont pas encore prêts. Dans l'esprit de 90% des libraires indépendants en France, auteur autoédité = moins que rien. Pour les 10% restants, ils ne sont pas prêts non plus à travailler en compte ferme, même avec des remises aussi importantes que 45%.
Aux Etats-Unis en revanche, les libraires indépendants commencent à accepter de travailler avec des autoédités. Ils ont compris que l'impression à la demande (POD) donnait à présent des livres de qualité similaire à ceux produits en offset. Et ils sont ouverts à l'idée que des autoédités puissent écrire aussi bien que leurs pairs édités, et avoir une démarche professionnelle. C'est prometteur.
Pour la France, malgré tout, je ne désespère pas au sujet des libraires. Il est possible que les choses deviennent un peu plus favorables de ce côté, à condition que j'augmente la diversité des ouvrages, et que je continue à faire appel à des illustrateurs talentueux. Comme on le voit, tout me ramène à une chose : écrire davantage.