Le créateur d’EasyJet se prépare à récidiver.
Ce sera FastJet, deux syllabes qui claquent, faciles à mémoriser, nouvelle low cost à vocation africaine, basée à Nairobi, et dont on imagine volontiers qu’elle s’implantera tôt ou tard en Europe. Son créateur, en effet, n’est autre que Stelios Haji-Ioannou, mi-grec, mi-anglais, comme son nom ne l’indique pas, Sir Stelios quand on est entre citoyens de sa grâcieuse Majesté. Un personnage !
Patron de l’Easy Group, une myriade de sociétés investies dans les domaines les plus divers, de la voiture de location à la pizza à bon marché, il reste le plus gros actionnaire d’EasyJet (qu’il a créée en 1995), en a cédé tous ses ses droits et, en 2011, au terme d’une violente polémique juridique, s’est engagé à ne plus se manifester sur le marché européen de l’aérien pendant 5 ans. D’où son soudain intérêt pour l’Afrique, excellent terrain d’action devant lui permettre de garder la main.
Pour mieux brûler les étapes, Sir Stelios vient de prendre le contrôle de la petite compagnie régionale Fly540 qui exploite des lignes courtes au Kenya, en Tanzanie, au Ghana et en Angola, 500.000 passagers par an. Une entreprise lilliputienne, rachetée pour l’équivalent de 87 millions de dollars environ, dont on devine d’ores et déjà qu’elle bousculera bientôt les habitudes et les forces commerciales en présence dès son nouveau départ, prévu pour l’automne.
Sir Stelios court après la prospérité, bien plus que la notoriété. Aussi n’est-on pas surpris d’apprendre qu’il empochera 0,5% du chiffre d’affaires de FastJet, ce qui contribuera à parfaire sa prospérité et son sourire. A terme, s’il franchit la Méditerranée, il ne cherchera sans doute pas à contrer directement EasyJet, dans la mesure où il en est copropriétaire. Mais il se heurtera sans doute à un beau cas de conscience tant est grande son envie de dire ses quatre vérités à Carolyn McCall, patronne d’EasyJet, qui poursuit une stratégie de croissance qui mettrait la rentabilité au second plan. Une querelle de famille, en quelque sorte.
Compte tenu du peu d’informations mises sur la place publique, il serait prématuré de s’interroger sur la viabilité du modèle économique de la nouvelle low cost africaine. Le contexte local n’a évidemment rien à voir avec celui qui prévaut en Europe. D’où la supposition que FastJet cherchera à élargir son champ d’action à partir de 2006. La grille tarifaire envisagée rappelle les prix pratiqués par les «no-frills» européens et américains mais toute comparaison est impossible, compte tenu de repères locaux évidemment différents.
Dans l’immédiat, des moyens opérationnels renforcés vont être mis en place, ATR 72 et Dash 8 actuellement en service n’étant pas à la hauteur des grandes ambitions de Sir Stelios. Lequel a vite compris que le moment est favorable pour acquérir des jets en location-bail, Airbus A319 ou Embraer E-190. Le choix, attendu avec impatience par les spécialistes, sera connu dans les jours à venir.
Tel Hannibal, voici donc Sir Stelios à la conquête de l’Afrique. Mais il ne prend pas de grands risques, aucun Scipion l’Africain ne risquant de lui barrer la route.
Pierre Sparaco - AeroMorning