(Prévisible avant la fin août 2012)
"Il faut aller voir l'Europe et dire avec force que la BCE doit faire tourner la planche à billets. (…) Si elle n'accepte pas, on devrait avoir le courage de dire 'ciao, ciao' et abandonner l'euro, tout en restant dans l'UE, ou alors de dire à l'Allemagne qu'elle doit quitter la zone euro si elle n'est pas d'accord."
Déclarations de Silvio Berlusconi, ancien président du Conseil italien, sur sa page Facebook, le vendredi 01 juin 2012.
Le sauvetage des banques espagnoles par l’Europe au prix de 100 milliards d’euros a fait un vrai miracle. La veille sur les marchés, les taux des obligations espagnoles atteignaient 6,23%, le lendemain les taux sont montés à 6,52%...puis 6,80% le lendemain. L’effet du sauvetage européen a donc vécu ce que vivent les roses, l’espace d’un matin…
Entre 450 milliards et 600 milliards d’euros pour sauver l’Espagne
Le Fonds Européen de Stabilité Financière (FESF) dispose de 240 milliards d’euros disponibles dont 20 Milliards € déjà mis de côté pour le Portugal. Le FESF doit être remplacé le 30 juin 2013 par le Mécanisme Européen de Stabilité (MES) doté de 500 milliards d’euros mais l’Allemagne ne l’a pas encore ratifié.
Ce sera probablement fait à l’issue des discussions avec le Parti Social Démocrate, en principe avant les vacances du Bundestag prévues le 7 juillet 2012. Cela explique la souplesse de la Chancelière Angela Merkel qui ressemble à un verre de lampe : la position allemande est toujours le résultat d’un compromis donc impossible à modifier.
Après l’Espagne, l’Italie
Certes, la situation de l’Italie n’est pas comparable à l’Espagne. C’est la deuxième puissance industrielle de l’Europe, et si l’Etat est endetté pour 120 % du PIB, c’était déjà vrai en 1994, par contre les ménages italiens, endettés à 40 % du PIB (130 % pour les ménages espagnols) sont de vraies fourmis.Les banques italiennes sont bien gérées, leurs seuls actifs toxiques sont les obligations de l’Etat italien pour 259 milliards d’euros (depuis quand les obligations de l’Etat national sont-elles toxiques ?). Mais pour les marchés, l’Italie c’est la plus grosse cigale…un vrai dessert, quel délice !
Il paraît donc plus que vraisemblable qu’à partir de mi-août 2012, les investisseurs sur les marchés, dont le mandat est de fuir le risque vers la qualité, ne vont plus acquérir d’obligations italiennes. Déjà les gestionnaires de trésorerie des entreprises ferment leurs dépôts auprès des banques italiennes pour les transférer en Allemagne. Or, lorsque fin août ou à peine plus tard, l’Italie se présentera à l’Europe avec la robe safran et l’écuelle vide de riz réglementaire, toutes les disponibilités du MES seront déjà engagées pour l’Espagne.
Un canot de sauvetage, deux épaves
De plus, les enchères mensuelles sur les obligations italiennes à 12 mois ont été émises le mercredi 13 juin 2012 à un taux de 3,972 % contre 2,34 % pour le mois de mai 2012…alors que quand les investisseurs prêtent à l’Allemagne à 12 mois, c’est tout juste s’ils ne paient pas ! Le canot de sauvetage européen n’est donc pas loin pour l’Italie, l’ennui c’est qu’il est déjà entièrement occupé par l’Espagne…On peut toujours espérer un nouveau Traité européen…le hic est que le Traité portant MES n’est toujours pas ratifié par l’Allemagne. Le Président du Conseil, M. Mario Monti, sera donc contraint d’admettre qu’il n’aura pas d’euros pour financer les besoins de l’Etat, pas même peut-être pour payer les carabiniers. S’il n’y a pas d’euro, une seule sortie demeure : fermer les banques et interrompre internet l’espace d’un week-end pour remplacer les euros par des euro-lires !
Le départ de la Grèce de l’euro est une idée tellement à la mode qu’elle est devenue une sagesse convenue, mais fausse. Le premier pays à quitter la monnaie européenne ne sera pas la Grèce mais l’Italie, car l’Italie a les moyens de quitter l’euro. L’Italie reviendra à un euro-lire équivalent de la lire fondante qui avait soutenu avec succès la compétitivité des industries italiennes.
À propos des auteurs : Morad El Hattab et Philippe Jumel sont auteurs du livre Kriz, d’une crise à l’autre (Ed. Léo Scheer).