Aujourd’hui je vous présente Magali, une française expatriée en Espagne qui partage avec nous son expérience comme maman de 2 petites filles trilingues français-espagnol-valencien.
Foto par rafa_uoc
Racontez-nous un peu sur vous…
Je suis française, de la région nantaise. Toute ma famille est de la région, entre Pays de Loire et Bretagne. Mes parents nous ont toujours transmis, à moi et à ma sœur, le goût des voyages. Rien d’étonnant alors à ce que toutes les deux nous ayons choisi de terminer nos études à l’étranger et, en ce qui me concerne, en Espagne. Après avoir résidé dans plusieurs villes comme Barcelone ou Madrid, je suis finalement arrivée à Castellón, aussi bien pour des raisons professionnelles que personnelles. Je réside en Espagne depuis maintenant 10 ans. Castellón, en pleine région valencienne, où sont nées mes deux filles de 5 et 6 ans.
Quelles langues parlez-vous à la maison ? Avez-vous une règle ? Quand-vous êtes dans la rue, ou avec des gens qui ne parlent pas le français (ou l’espagnol ou le valencien) dans quelle langue parlez-vous à vos enfants ?
Ufffffff…… difficile….. Nous sommes en Espagne, mais dans la région de Valence. Dans la rue ou à l’école, on parle donc aussi bien « espagnol » que « valencien ».
A la maison, j’ai opté pour parler français et à vrai dire, c’est aujourd’hui pour moi un réel défi ! Mon environnement normal (aussi bien personnel que professionnel) est espagnol, on peut dire que je me suis intégrée complètement. Je ne parle donc français qu’à mes filles ou à ma famille, par téléphone. Mais en règle générale, je parle français à mes filles, qu’on soit avec des personnes qui parlent le français ou pas d’ailleurs. Si j’en éprouve le besoin je fais une traduction aux personnes présentes.
Leur père leur parle en général espagnol, sauf quand il rend visite à sa famille qui parle plutôt valencien ou catalan. Il est d’un petit village proche de la Catalogne et la langue habituelle là-bas, c’est le valencien.
Les filles passent de l’une à l’autre sans s’en rendre compte ou traduise instantanément ce que je viens de leur dire à une autre langue. Les conversations avec des tiers sont souvent d’ailleurs assez amusantes. Je crois qu’on oublie la plupart du temps dans quelle langue on parle.
Est-il important pour vous de transmettre votre langue maternelle et votre culture à vos enfants ?
Important non, primordial. Ce que je peux transmettre à mes filles ce n’est pas seulement une langue mais toute une culture. Quand on parle espagnol et français, si on est un peu attentif, on se rend compte que les intonations sont différentes, les sons « chantent » d’une manière différente dans chacune des langues. Je réside en Espagne mais je suis et elles sont françaises. C’est une richesse qu’elles peuvent obtenir avec un effort minimum. Elles en ont également besoin pour pouvoir communiquer avec leurs grands-parents ou leurs cousins, même si eux aussi font l’effort de se mettre à l’espagnol. Et je crois aussi que pratiquer cette « gymnastique » de changement de langue leur facilite sans doute l’apprentissage de l’anglais qu’elles font aussi à l’école. Et qui sait si demain elles ne décideront pas de faire le chemin inverse et d’aller s’installer en France, ou ailleurs !
Que faites-vous pour vous assurez que vos filles utilisent toutes leurs langues ?
Je n’ai mis en place aucune règle précise ou activité particulière. Avec moi, le français. Avec leur père ou sa famille, l’espagnol ou le valencien. A l’école, elles apprennent aussi bien l’espagnol que le valencien et l’anglais. Le plus difficile dans le contexte actuel correspond à la pratique de la langue française. J’essaie de leur parler le plus possible et de les laisser de temps en temps avec ma famille, pour qu’elles s’habituent à parler et écouter.
Finalement, quel conseil donneriez-vous aux parents qui s’embarquent dans l’aventure d’éduquer dans deux langues et deux cultures ?
Plusieurs…… Tout d’abord, parler et parler avec ses enfants. Ça ce n’est pas seulement valable dans le cas de bilinguisme mais c’est très important. En grandissant les enfants perdent petit à petit leur capacité à émettre certains sons. Il faut donc qu’ils les prononcent le plus « tôt » possible. Et pour les prononcer, ils doivent les entendre.
Je crois aussi qu’il faut être constant et patient. Les enfants bilingues ont besoin d’un peu de temps pour tout mettre en place et restituer toute l’information reçue. Quand mes filles étaient plus petites elles avaient tendance à mélanger les langues ou à faire des phrases « mixtes ». Ce n’est pas important, ce qui compte c’est toute l’information accumulée qui sera restituée le moment venu.
Il faut aussi leur expliquer que ce n’est pas seulement une langue mais toute une culture qu’ils ont à leur disposition. C’est une grande ouverture d’esprit, une chance de connaître autre chose, sans grand effort.
Et je dirais que le plus important, et ce qui me paraît le plus difficile, dans mon cas en tout cas (quand on devient soi-même bilingue), c’est de respecter les « normes » et de toujours s’adresser aux enfants dans une même langue…. Plus ils grandissent et plus le poids de l’environnement est lourd. Il est plus facile pour eux de parler dans leur langue de tous les jours. C’est là qu’il faut renforcer la ou les langues minoritaires….
Je tiens à remercier Magali pour le temps consacré à ce petit échange. Si vous voulez partager, vous aussi, votre expérience comme parent d’une famille bilingue/biculturel n’hésitez pas à me contacter !