Stéphane Taillat (auteur de l'excellent blog En vérité) mentionnait l'autre jour cette citation de Marcus Jones (à propose de Bismarck):
« dans un monde où les résultats restent indéterminés, une stratégie compétente ne consiste pas à fixer des objectifs de long terme et à structurer systématiquement des procédures pour les réaliser, mais plutôt dans une appréhension claire de ses propres principes et priorités associée à une approche flexible et créative afin de produire des gains cumulatifs sur le court terme ».
(in Marcus Jones, « Strategy as character : Bismarck and the Prusso-German Question 1862-1878 » in Williamson Murray, Richard Hart Sinnreich, James Lacey, The Shaping of Grand Strategy: Policy, Diplomacy and War, Cambridge: Cambridge University Press, 2011, p.108.)
Le même Stéphane ajoute cette citation de W Churchill : "Agissez comme si il était impossible d'échouer".
Cela amène plusieurs commentaires :
- la stratégie est-elle toujours "de long terme" ? et d'ailleurs, qu'est-ce que ce "long-terme" ?
- M. Jones explique qu'en fait, il faut chercher à cumuler des gains de court terme : autrement dit, être opportuniste. Là résiderait la vraie stratégie : puisque je suis dans un environnement incertain, autant adopter la seule "stratégie" qui est de ne pas en avoir, et d'être uniquement réactif.
Mais Jones ajoute une précision : l'appréhension claire de ses propres principes et priorités. Cette restriction, en apparence petite, change beaucoup. Elle suggère deux choses :
- la "conscience" (et donc le retour sur soi, qui appartient, je pense, à la stratégie)
- mais aussi des "principes et priorités" qui permettent, au fond, de dépasser le court-termisme : la permanence suggérée par ces principes revient à réintroduire le long terme.
Dès lors, définir des principes et priorités constitue la vraie stratégie. On agit non pas en fonction d'un but, vers l'avant, mais à partir d'une cause, qui détermine de l'arrière. Cela change la façon de concevoir l'opportunisme.
O. Kempf