Je lis sur un article d’Europe 1 une histoire à dormir debout. La fausse experte passe derrière la barre (14 juin 2012). Assiya Hamza y relate que Régine Labeur a travaillé comme experte psychologue - alors qu’elle avait fourni de faux diplômes - entre 2005 et 2009 auprès de plusieurs tribunaux, notamment à Périgueux où elle résidait mais également la Cour d’appel de Bordeaux. Raison pour laquelle l’instruction et le procès - elle est poursuivie pour « usurpation de titre et exercice illégal de la profession de psychologue » - ont été dépaysés à Toulouse car « trop de juges d’instruction et de magistrats avaient eu affaire à la prévenue à Bordeaux pour juger sereinement » selon Guillaume Roussel, président du tribunal correctionnel.
Effarant ! J’ai beau savoir qu’il est de plus en plus facile de fabriquer ou faire fabriquer de faux diplômes grâce aux photocopieuses et laser, je ne comprends pas que l’authenticité de ces diplômes n’ait jamais été vérifiée. Alors qu’elle avait quitté l’école sans passer son bac.
Encore, que la Direction départementale des affaires sociales de Périgueux n’ait procédé à aucun contrôle quand elle s’est fait immatriculer en 2003 comme psychologue, je veux bien. Mais pour l’inscrire en 2005 sur la liste des experts psychologues… s’il suffit de deux années de pratique pour devenir expert ! Et que l’on ne me dise surtout pas qu’il n’existe pas des listes ou des publications officielles enregistrant les diplômes.
Pourquoi a-t-elle jeté son dévolu sur la profession de psychologue ? Je vous la donne en mille : elle est « passionnée par la psychologie car un de ses compagnons avait abusé de sa fille »… J’avais déjà rencontré de - vrais - étudiant(e)s en psycho qui avaient choisi cette discipline en espérant régler leurs problèmes, allant le plus souvent vers des échecs, mais celle-là, on ne me l’avait jamais encore faite ! Je m’intéresse pourtant depuis très longtemps à la psychologie et à la psychanalyse mais n’aurais jamais la prétention d’exercer de quelque manière que ce fût. Je suis seulement ex-infirmière. Point barre. Chacun son métier et les malades seront mieux soignés.
400 expertises judiciaires en 4 ans ! « Qui ont parfois brisé des vies »… Quand bien même - tout en reconnaissant « avoir fait du mal à beaucoup de gens » prétendrait-elle « avoir été impartiale » dans ses expertises. Un avis que ne partage pas le Syndicat national des psychologues qui s’est porté partie civile avec 24 personnes.
La fausse experte a ainsi traité toutes sortes de dossiers et ses expertises ont pesé sur des décisions parfois très graves comme le retrait des enfants du foyer familial. Comme le souligne M° Sylvie Noachovitch, avocate d’une des parties civiles « Il a fallu quatre ans pour que ma cliente puisse retrouver la garde de ses enfants, le préjudice est énorme ».
C’est en effet dramatique lorsque l’on connaît les énormes dégâts psychologiques entraînés chez les enfants par une telle décision, même quand elle est justifiée. Si elle avait été vraiment psychologue clinicienne, elle aurait mesuré la portée de ses conclusions.
Certes, les vrais psychologues et même les psychiatres peuvent commettre également des erreurs, on l’a bien vu lors du procès d’Outreau car la parole des enfants ne doit pas être prise pour argent comptant. Il faut savoir faire la part du fantasme ou du non-dit. Selon les autres avocats, « d'autres expertises en matière de délits sexuels ont accablé des innocents ou au contraire discrédité la parole de victimes ».