Jouvence

Par Deathpoe

J'étais à la fenêtre de ma chambre, les lumières éteintes, le soleil qui se couche. J'écoutais l'album The Soft Parade en savourant pour une fois ma cigarette. La fumée faisait des détours devant mes yeux avant de s'échapper en arcs de cercles. Et surtout, cette invraisemblable impression d'être à l'aube de mes dix-huit ans.
Tout était purgé, expédié, oublié. Un visage de poupée, chevelure de lumière, je levais le nez de mon libre à la bibliothèque universitaire et ne pouvais m'empêcher de me concentrer sur sa nuque et sa gorge, délicatement dessinées, des courbes sur une route que l'on prend tranquillement, sans se presser et en les savourant. Je remarquai son air légèrement pincé de profil et le fait qu'elle soit gauchère. Et je pourrai aller lui dire que c'est la plu belle des filles présentes, mais qu'est-ce que ça m'apporterait, et comment je le ferais; et pourquoi; et qu'est-ce que ça lui apporterait? Et même que je ne l'oublierai pas comme les autres jamais vraiment oubliées mais ça ne sert à rien de s'encombrer l'esprit avec ces visages qui n'ont apporté que du vent ou des silex. Elle grimace parce que quelqu'un fait du bruit et d'un coup elle est beaucoup moins belle, et surtout, ça doit être aussi être une emmerdeuse, une de plus.
Ils révisent et je suis un étranger. Parce que je m'en fous, j'écris, j'essaie, je vois son profil, son épaule gauche, j'écris, je tape sur les touches comme si c'était important, comme si j'allais oublier, je m'en fous, je ne sais pas, j'ai oublié, j'ai rêve d'elle, j'ai envie de fumer, je vends, peut-être que, pas de virgules maintenant comme toujours balancer ça comme un train dans un mur: j'écris je vends je vis je souffre je m'en fous je suis seul tu viens (?) ce qu'on fait c'est du baratin de commerce du baratin de buraliste et de la mort aux rats à mettre sur notre CV le dernier jour.
L'impression d'être à l'aube de mes dix-huit ans. Le verbe n'existe plus parce que j'ai écrit l'avenir.