Du pain et des jeux : cette célébre citation latine fut historiquement prononcée dans l'idée que la nourriture et les jeux du Cirque étaient en quelque sorte l'opium d'un peuple romain soumis à ses dictateurs.
Ces mots furent adressés par Juvénal (Satires, X, 81) aux Romains incapables de s'intéresser à d'autres choses qu'aux distributions gratuites de blé et aux jeux du cirque.
Dopage répétitif, argent roi du sponsoring, corruption et matchs truqués, scéances de "bunga-bunga", transferts mirobolants, salaires excessifs, grand cirque de la F1 à Bahrein, caravane publicitaire etc..
- Environ 13 000 personnes sont sans domicile fixe à Athènes, dont 1500 vivent dans les rues et 11.500 dans des squats, selon les chiffres de l'organisation non gouvernementale grecque Praksis, publiés jeudi dans le quotidien Kathimérini.
- Peu de monde est au courant de la tenue du 5ème sommet sur le développement durable, Rio+20, censé établir un bilan de vingt ans d'application du concept de Développement Durable et un agenda pour les dix prochaines années à l'échelle globale. Ca commence aujourd'hui. Ceux qui savent ne croient plus à ces "grands machins". Tout le monde s'en fout, c'est pour les escrolos.
- Plus d'un millier de supporters polonais et russes ont été interpellés et 10 personnes blessées légèrement lors d'accrochages hier soir avant et après le match de l'Euro-2012.
Eté 2012. Le peuple va attraper des escarres, des durillons au pouce et des kilos : Roland-Garros, Coupe d’Europe de football en Pologne/Ukraine, Wimbledon, Jeux-olympiques de Londres, Tour de France, Grands prix de formule 1, championnats du monde de natation etc. L'overdose nous guette..., et avec le sourire bovin de Jean-Pierre Pernaut au journal de midi de TF1, trop, c'est trop. Relisez cet article D'Hervé Kempf paru dans le Monde.
Le sport, ça suffit !
par Hervé Kempt
Le sport est devenu un tabou plus indiscutable encore que la croissance. Pour être rangé parmi les asociaux demi-fous et sans doute dangereux, il suffit de bâiller devant Roland-Garros, de déplorer la prostitution pécuniaire du rugby, de s'ennuyer des matchs de football répétitifs. "La critique est devenue impossible, dit Marc Perelman, auteur du Sport barbare (Michalon, 208 p., 16 €). Le sport est devenu une seconde nature, c'est comme le soleil, on ne critique pas le soleil."
Les valeurs de compétition, d'avidité, de triche, de corruption peuvent donc être répandues sans complexe ni remords. En Italie, vient de révéler la police, l'encadrement médical de plusieurs équipes de football a drogué ses propres joueurs pour qu'ils perdent des matchs, moyen de garantir l'issue des paris sportifs.
Le sport est devenu l'opium des classes moyennes, la morphine des classes populaires. Mais si Marx jugeait que la religion était l'opium du peuple (dans sa Contribution à la critique de la philosophie du droit de Hegel), du moins notait-il qu'elle exprimait aussi une "protestation contre la détresse". Le sport n'exprime aucune protestation, seulement la soumission à l'ordre établi. Celui-ci, d'ailleurs, s'en sert contre le peuple. Le gouvernement québécois accuse les étudiants d'incivisme, parce qu'ils pourraient perturber le Grand Prix de Montréal - la formule 1, d'ailleurs, n'est au fond qu'une entreprise favorable au changement climatique.
Si le sport est une des plus vicieuses pollutions mentales, il détruit aussi l'environnement par ses installations monumentales. A Lille, le Grand Stade est suspecté de menacer la nappe phréatique par les matériaux utilisés - un recours est par ailleurs engagé contre la procédure de passation des marchés, qui serait déloyale. A Lyon, le maire veut urbaniser 50 hectares agricoles pour un autre Grand Stade, avec moult fonds publics destinés à un Olympique lyonnais déclinant. A Paris, les courts de Roland-Garros veulent s'étendre sur les magnifiques serres d'Auteuil. La Fédération de rugby rêve d'un stade géant, alors que le Stade de France, notoirement sous-utilisé, est déjà en déficit - couvert par les finances publiques, bien sûr.
Que les pseudo-sportifs animés par l'esprit de lucre continuent leur commerce de lavage de cerveau, on n'y peut mais. Du moins est-il temps de les empêcher de bétonner les abords des métropoles.
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Hervé Kempf