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Ni-ni

Publié le 12 juin 2012 par Malesherbes

L’an dernier, on évoquait pour le premier tour de l’élection présidentielle 2012 l’éventualité d’un 21 avril à l’envers. Suivant cette inversion, j’avais alors intitulé Livra12 mon billet de l'époque. Les auteurs de cette formule signalaient le risque de voir la droite éliminée au premier tour, laissant face à face le Front national et le Parti socialiste. Pour ma part, j’exprimais dans ce billet mes craintes de voir l’inversion s’aggraver au second tour, la droite répugnant alors à reporter ses suffrages sur le PS, tandis qu’en 2002 les électeurs socialistes avaient eux voté massivement pour Jacques Chirac, lui assurant un score à la Ben Ali (82%) !

L’attitude présente de l’UMP permet de constater que cette inquiétude avait quelques fondements. La droite adopte la position dite du « ni-ni ». Rappelons au passage que c’est une formule mitterrandienne, désignant un choix de politique économique (ni nationalisations, ni privatisations) et sans positionnement sur des valeurs. Gérer, c’est d’abord décider.  On se discrédite, quand on aspire à diriger un pays, en refusant de choisir. L’UMP prétend vouloir tenir la balance égale entre extrême droite et extrême gauche. Il n’en est rien, ce que l’on peut qualifier d’extrême gauche ayant réuni à peine 8% des votes quand l’extrême droite se situe aux alentours de 14%.

Nombreux sont les candidats UMP en difficulté qui affirment partager les valeurs du FN. Appeler la haine de l’étranger, la diminution de la protection sociale, seul rempart contre l’explosion d’une société minée par la crise, des valeurs, c’est vider les mots de leur sens. La droite ne partage pas, espérons-le, les valeurs du FN. Elle se les approprie, pour capter le vote de l’électorat FN. Le parti de Marine Le Pen ne s’y trompe d’ailleurs pas, recommandant à son tour le « ni-ni ». En plaçant ainsi sur le même pied UMP et PS, blocs de tailles voisines, avec des valeurs différentes mais toujours républicaines, elle se désigne ainsi délibérément comme une force radicalement opposée, extrême, celle que les électeurs PS avaient su écarter en 2002.

Une autre subtilité langagière de ceux qui s’appliquent à faire le jeu de l’extrême droite consiste à dire qu’il ne s’agit pas d’un accord avec le FN mais plutôt d’un appel à ceux qui ont voté pour le FN. Argutie désolante. Ce qui fait vivre un parti, ce sont ses électeurs. Comment  le Parti communiste, reéunissant sous la quatrième République un quart des votants, a-t-il connu le triste sort qui est le sien ? En étant déserté par ses électeurs. S’il peut exister à un moment des différences entre la direction d’un parti et ses électeurs, à terme c’est la direction qui est remplacée ou les électeurs qui ont fui. Tenter de capturer les voix des électeurs FN, c’est leur dire : « viens chez nous, il y a du feu ». En d’autres termes : « nous avons les mêmes objectifs mais nous sommes bien plus puissants, avec des députés par centaines et, en votant pour nous, tu pourras voir ces objectifs atteints ». Le problème, c’est qu’avec ces nouveaux électeurs, on change un peu le parti.

Nini, peut-être, mais surtout peau d’chien ! 


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