L'échec cuisant de Mélenchon suscite aujourd'hui de nombreuses analyses. A-t-il commis une erreur tactique en allant, sans préparation ni organisation locale, affronter Marine Le Pen sur des terres que le FN laboure depuis des années? ou a-t-il commis une erreur stratégique en développant en direction des classes populaires un argumentaire plutôt destiné à la petite bourgeoisie intellectuelle comme le suggère Laurent Joffrin lorsqu'il écrit qu'un "candidat qui proclame à tous vents que l’immigration ne pose aucun problème ne saurait remporter un grand succès auprès des ouvriers et des employés, qui craignent la concurrence d’une main d’œuvre sous-payée et corvéable à merci."? Sans doute les deux.
Cet échec ne doit cependant pas être surestimé. Mélenchon ne sera pas député, mais il s'est créé un espace politique qu'il pourra continuer d'occuper. Ce qu'il fera sans doute, une fois passé le goût amer de la défaite. Il est de tous les hommes politiques le seul à avoir su remettre les débats sur l'immigration à leur juste place, celle de l'usine à fantasmes et il faut qu'il poursuive ce combat et qu'il continue à nourrir le débat politique de ses analyses souvent très fines, bien plus fines que ne le suggère ses attaques désolantes à l'égard des médias.
Ce n'est pas évident. On peut craindre que sous couvert de réalisme le Front de Gauche et le PC remisent ce théme comme semble le leur suggérer Joffrin. Ce serait tout simplement désolant. On peut faire de la politique sans être élu. Et Mélenchon aura dans les années qui viennent un rôle à jouer. Il peut contribuer à faire évoluer le débat démocratique sur une des questions qui le minent depuis des années. Il doit continuer pour rendre confiance à tous ceux qui ne se satisfont pas de la stigmatisation des étrangers. Surtout chez les ouvriers et les employés qui ne sont pas tous convaincus, tant s'en faut, que l'immigration est la mère de leurs difficultés.