Maintenant qu'il n'y a plus de visites à gratter en postant sur l'affaire Princen "l'oeil de Sarkozy sur le web", qui a donné un peu de célébrité inattendue à des blogs méritants et a fait exploser quelques sitemeters, sans même essayer imaginer ce qui a dû arriver à ceux de Dagrouik et Peuples, maintenant que la fièvre est retombée un peu, on peut se demander ce qu'il en est de la comm' élyséenne.
Le flicage du Net paraît inefficace, plus ou moins impossible. Sarkozy n'arrive même pas à faire condamner le Nouvel'Obs pour l'histoire du SMS et s'en trouve réduit à envoyer son épouse à le défendre au Monde dans une tribune maladroite et naïve. On imagine mal comment il pourrait espérer mieux s'en tirer en s'attaquant aux rois du "buzz" que sont nos Boulets. Ou avec toute autre forme de "contre-attaque". Mais là c'était le sujet du billet d'hier.
Les pros de la veille signalent une énorme erreur de communication : il ne faut pas dire que l'on surveille si l'on veut surveiller efficacement. C'est la thèse d'un billet de Nick Carraway, billet halluciant par son érudition, qui suggère de voir, avec un peu d'ironie, dans la maladresse sarkozyënne une "révolution copernicienne dans l'épistémologie de l'observation". Il ne cite pas le principe d'incertitude de Heisenberg mais il ne manque pas grand'chose d'autre. (Enfin, si : la relation sujet-objet a quand même une certaine histoire...)
Nouveau cafouillage, alors ? Observation inefficace ou contradictoire ? Pourquoi en effet dévoiler ses intentions aussi visiblement. Juan se demande si la nomination de Princen est ridicule ou hypocrite. Sûrement les deux. Mais je me demande si le problème dans l'interprétation de ce geste maladroit n'est pas dû au fait que le message (car Princen est, à ce stade, essentiellement un message) n'est destiné ni aux internautes, ni à l'ensemble des téléspectateurs, mais essentiellement à des fidèles sarkozystes, notamment cette tranche de la population au-dessus de 65 ans qui commence à douter, plus à cause de Carla que du Paquet (Fiscal), et au-delà à toute cette population de conservateurs qui voudraient aimer Sarkozy mais qui n'y arrive plus, à ces populations pour qui l'internet est une chose étrange et effrayante.
La défense de Sarkozy en ce moment est : on adore ma politique, mais on déteste mon style. Et c'est aussi : je suis la victime d'attaques inadmissibles. En provenance de l'internet. Donc, cher électeur UMP, cher député UMP venant de perdre votre mairie, j'ai un type qui va arranger tout ça. Un pro, un jeune (car il n'y a que les jeunes à comprendre l'informatique, mon Jean, il fait toutes sortes de choses, tandis que moi, l'informatique...). Ce Princen va nous règler cette histoire, remettre ces gens-là à leur place. Ça va me libérer, je pourrais revenir comme avant. La tête haute.
Comme souvent, il est difficile de distinguer dans ce scénario ce qui relève de l'optimisme et du fantasme présidentiel, et ce qui relève de la stratégie communicationnelle proprement dite. Sarkozy est fort quand les deux coïncident ; il est nul quand il faut vraiment réfléchir. Il est possible que ce message ait atteint sa cible véritable. Il est tout aussi possible que les dommages collatéraux soient importants. En termes de com', bien sûr. Et de buzz.