Commentaires de Paul Watson sur son arrestation et considérations sur la loi et la justice.
Je demeure prisonnier en Allemagne dans une affaire inhabituelle, controversée et internationale.
Le 13 mai 2012, j'ai été arrêté à l'aéroport de Francfort en Allemagne, car en octobre 2011, le Costa Rica a émis à mon encontre un mandat d’arrêt et d’extradition pour un incident qui avait eu lieu en 2002.
Cet incident impliquait une confrontation entre l'équipage de Sea Shepherd et un navire braconnier que nous avions pris en flagrant délit de découpe illégale d’ailerons de requins dans les eaux du Guatemala. Le gouvernement guatémaltèque nous avait alors autorisé à intervenir pour arrêter le massacre de requins. Personne n'avait été blessé et il n'y avait pas eu de dommages matériels, mais les braconniers du Costa Rica nous avaient accusés d’avoir mis leur vie en danger.
Et 10 ans plus tard, je me retrouve arrêté en Allemagne à cause de cette plainte.
Ce qui est encore plus étrange, c'est que j'ai beaucoup voyagé entre octobre 2011 et aujourd’hui, y compris en Europe et je n'avais jamais été arrêté. Sans doute parce qu’Interpol avait rejeté le mandat d'extradition le considérant comme politiquement motivé. Mais pour des raisons que j’ignore, l’Allemagne n'a pas rejeté le mandat, malgré l’invalidation de celui-ci par Interpol.
L'Allemagne ne dispose pas de traité d'extradition avec le Costa Rica, mais insiste sur le fait que le pays peut extrader quiconque vers le Costa Rica, s'il le souhaite.
Est-ce une coïncidence si le Japon a porté plainte au civil contre Sea Shepherd en octobre 2011 alors que le Fonds pour le Tsunami lui a accordé 30 millions de dollars US pour protéger sa flotte baleinière des agissements de Sea Shepherd Conservation Society?
Est-ce une coïncidence si la présidente costaricaine Laura Chinchilla a rendu visite au Premier ministre japonais en décembre 2011?
C'est une coïncidence qu’elle se soit rendue en Allemagne dix jours après mon arrestation, car elle n'avait aucun moyen de savoir que je serais arrêté, et mon arrestation lui a effectivement causé des problèmes qu’elle aurait préféré éviter au cours de sa visite en Allemagne.
C’est étrange que j’ai pu être libéré sous caution dans un pays qui ne prévoit pas la possibilité d'être libéré sous caution dès lors qu’il s’agit d’une personne en attente d’extradition.
C’est étrange que le Ministre des Affaires étrangères du Costa Rica demande à me rencontrer lors de sa visite en Allemagne avec la présidente du Costa Rica.
C’est étrange que la Présidente du Costa Rica ait déclaré publiquement que je voulais obtenir un procès équitable au Costa Rica. Cette déclaration implique qu’il y avait des raisons de penser que je n’obtiendrais pas de procès équitable dans son pays.
Je crois que si on présente la documentation en notre possession, les preuves et les témoins dans un tribunal au Costa Rica, je serais déclaré non coupable.
J'ai dit au Ministre des Affaires étrangères du Costa Rica que je reviendrais volontairement au Costa Rica avec mon équipe juridique une fois que la date du procès sera fixée, et que je trouvais injuste d’être emprisonné au Costa Rica jusqu'à ce qu’une date de procès soit fixée parce que cela pourrait prendre des mois voire des années.
J'ai dit aussi au Ministre des Affaires étrangères du Costa Rica que Sea Shepherd voulait travailler avec son pays pour protéger les requins et le Parc national de l'île Cocos.
Je ne crois pas que l’Allemagne ou le Costa Rica aient anticipé le soutien international que j’ai reçu : des dizaines de manifestations à travers le monde devant les ambassades allemandes, 400 manifestants à Berlin pour accueillir la Présidente du Costa Rica, une déclaration du Président du Sénat brésilien demandant ma libération, des déclarations de célébrités dans le monde entier, le soutien du Parlement européen et des menaces de boycott du tourisme au Costa Rica.
Notre équipe juridique a déposé une motion visant à rejeter les accusations pour vice de forme concernant le mandat d’arrêt.
Si la motion est rejetée, le Costa Rica dispose de 90 jours pour fournir son dossier demandant mon extradition aux autorités allemandes.
Donc, je pourrais être libre de quitter l'Allemagne dans quelques jours, quelques semaines ou trois mois ou, si nous perdons le procès, je pourrais alors être extradé de force au Costa Rica, OU le gouvernement allemand peut toujours intervenir politiquement pour empêcher mon extradition si nous perdons le procès.
Finalement, cela fait quand même beaucoup de gesticulations pour défendre la cause de quelques braconniers qui pêchent des ailerons de requins et à qui nous n’avons porté aucun coup physique ou matériel, mais qui ont porté plainte.
Entre–temps, le Capitaine du Shonan Maru 2 n’a jamais été inquiété alors qu’il a détruit l’Ady Gil, vaisseau d’une valeur de 1,5 millions de $, et qu’il a failli tuer les 8 personnes qui étaient à son bord. Aucun ordre d’extradition à son égard, ni de mandat d’arrêt – rien!
Pourquoi?
Parce que la loi est faite pour protéger ceux qui exploitent les océans pas ceux qui les protègent.
Quoi qu’il en soit, il ressort un résultat incroyablement positif de cet incident: l’attention mondiale s’est désormais focalisée sur les ailerons de requins et l’horrible massacre de dizaines de millions de requins chaque année.
Et pour quoi? Pour un bol de soupe!