Bande dessinée - 330 pages
Editions Delcourt - novembre 2011
Fauve d'Or - Festival Angoulême 2012
Parce que sa femme accomplit une mission humanitaire pour MSF, Guy Delisle s'y rend avec ses enfants. Où ? En Terre Sainte, en terre agitée, là où les conflits millénaires cristallisent d'importantes passions et de redoutables rivalités : à Jérusalem. Pendant une année, il va découvrir, dessiner, arpenter, analyser les quartiers de la ville et ses alentours.Quand Sarah Glidden passait 10 jours en Israël, Guy Delisle a vécu pendant un an une vie d'expatrié avec la soif d'apprendre et l'humilité de ne pas chercher à tout comprendre. Difficile pour moi de ne pas mettre ces deux récits sur la balance, non pas pour les évaluer mais plutôt pour comparer leurs approches. En effet, Guy Delisle est moins dans le jugement, son voyage n'a aucun enjeu d'opinion, il n'a pas décidé de s'y rendre de lui-même, il ne cherche pas à rentrer avec des certitudes. Juste vivre l'expérience de son expatriation dans une contrée surmédiatisée mais dont le quotidien et la diversité sont davantage méconnus.Il y a le quotidien de Guy, avec la garde des enfants ou leurs occupations alors que sa femme s'absente parfois plusieurs jours en mission. De cette vie personnelle il ne laisse transparaître que le minimum. Car c'est surtout l'environnement qu'il découvre avec ses yeux d'occidental-voyageur qu'il veut transmettre. On apprend alors une foule de choses, aussi bien sur les aspects historiques et culturels que sur les réalités politiques et sociales actuelles. Souvent des aberrations d'ailleurs. On réalise un certain paradoxe des colonies, ces quartiers construits illégalement par les colons juifs sur les territoires palestiniens, que les expatriés essaient de boycotter pour ne pas encourager cette violation, mais qui contre toute attente sont convoitées par des arabes qui ne trouvent plus à se loger décemment dans la vieille ville de Jérusalem devenue hors de prix.
Extrait :"- Ca ne te fait pas bizarre de te retrouver dans une colonie comme Pisgat Ze'ev ?- Tu sais, en tant qu'arabe israélien, je me sens tout à fait dans mon droit d'habiter où je veux, d'un côté comme de l'autre de la ligne verte.D'ailleurs il y a un phénomène assez drôle qui se passe ici. Beaucoup d'arabes s'y sont installés pour des raisons économiques et petit à petit ça commence à faire un petit groupe. D'une certaine façon, on est en train de recoloniser les colonies ! Ha ha !"
On ressent son exaspération face aux privations de libertés imposées par l'Etat d'Israël, aux check-points abusifs, aux barrages de routes, aux inégalités criantes face à l'éducation... Il souhaite recueillir les discours des différentes parties, rencontre des personnes de toutes les confessions (musulmans, juifs, chrétiens, arméniens....) et parfois de certaines minorités religieuses. Mais plus que tout, et malgré lui, il dénonce les extrémismes religieux, décrivant les réalités de la ville d'Hébron et du quartier ultra orthodoxe de Mea Shéarim comme des sommets de l'intolérance et du fanatisme colon juif.Un carnet de voyage instructif (sur les ONG, la séparation, la colonisation...) dont le scenario est agréable à suivre.
"Jérusalem. Un canadien errant dans la ville sainte" - Blog de l'auteur
L'avis de Kathel - Lettres exprès