Coucher le premier soir ? Le Grand Débat

Par Lilionceuponatime

Ca fait un bon bout de temps que je n'ai pas écrit de chronique. Ce n'était pas par flemme ou par manque de temps, mais tout simplement parce que je ne trouvais pas franchement de sujets d'inspiration. La campagne présidentielle ? Mouais... La météo pourrave ? Pffff... Jusqu'à ce qu'un événement dans mon entourage proche (très proche, voire trop proche) réveille une controverse rebattue mais qui continue à passionner les foules...

"Alors ta soirée hier, t'es rentrée avec un mec non ? - Ouais, trop bien... (sourire extatique aux lèvres, encore dopé aux hormones du sexe et de la luxure) - Ah t'as couché... Tu le reverras jamais.  - Mais si, je te jure, il m'a rappelée, cette semaine il est booké, mais on va se revoir, il est à fond. - Tu verras. - Ta gueule, rabat-joie, t'es jalouse parce que t'as pas eu d'orgasme cette nuit."

Bah on a vu. Ou plutôt non, on n'a rien vu. Les prévisions de la funeste Cassandre étaient justes. D'où la grande question. Ce qui hier constituait un fait acquis dans l'inconscient judéo-chrétien masculin (et féminin aussi, pour le coup) : "Coucher le premier soir = Pute infâme" est-il encore probant de nos jours, prenant en considération l'évolution des mentalités et l'émancipation de la femme ? Une chose est sûre, le débat fait rage. Il suffit de googler "coucher le premier soir" pour obtenir rien moins que 764 000 résultats. Forte de la conviction de tenir là un sujet de premier plan et de fait, un potentiel prix journalistique susceptible de doper ma carrière, je me rue dans une brèche de la taille du grand canyon, et vous offre sur un plateau mes conclusions suite à un enfonçage de portes très largement ouvertes.

L'avis des filles

Suite à cet épisode douloureux communément appelé "râteau", et par solidarité féminine envers cette personne de mon très proche entourage, j'ai partagé mon émoi avec mes bonnes copines. "Mais franchement je comprends pas... Attends, il était au taquet, il voulait me la revoir. Expliquez-moi !" La réponse fut lapidaire. "Jamais tu baises le premier soir, t'es malade ou quoi ? T'as ta fierté." Tant de compassion et d'écoute face à une situation de grande détresse sentimentale m'émeut. Pour le sens de la mesure, on repassera. Le constat est étonnant de la part de nanas, certes, non activistes, mais actives, et modernes. Je m'attendais à une réaction de femmes libérés (tu sais c'est pas si facile), j'en suis pour mes frais. Je décide donc de me diriger à la source, et me prépare à m'en prendre une nouvelle fois plein la gueule. Direction le sexe fort. 

L'avis des hommes

Très étonnamment, ils sont beaucoup plus cool sur le sujet. Alors, langue de bois ou réelle évolution des mentalités ? Toujours est-il que la règle des trois rencards semble pour eux une aberration, mais surtout une perte de temps (héhé, on voit midi à sa porte les gars ?). Pour eux, rien de choquant à ce qu'une nana affirme ses désirs : "Attends c'est bon, on a envie tous les deux, on le sait, pourquoi attendre pour une histoire de principes à la con ?" Bon point. Cela étant, les choses se corsent quand on aborde le sujet du "et pour après ?" Mon pote résume les choses en m'énonçant une phrase de Georges Clémenceau (oui, les hommes se font poètes dès qu'on aborde les choses du sexe) : "Le meilleur moment de l'amour, c'est quand on monte l'escalier". Ce qui signifie, en gros, que c'est le désir qui fait monter la flamme, à l'image des Zip quand on prépare un barbecue (et ouais, moi aussi je sais faire des métaphores). En lâchant tout le premier soir, la femme n'est certes plus une salope, mais elle ôte tout ce qui fait le charme des débuts de relations. En gros, elle grille ses cartouches. Ce que me confirme l'expert ès choses du sexe Gérard Leleu, auteur du Traité des orgasmes (paye ta référence).

L'avis de l'expert

"Il y a une grande distinction entre l’élue et l’opportunité. Lors d’une rencontre suivie aussitôt d’un rapport sexuel, certes, il y a une attirance, mais il n’y a ni élection ni sélection. C’est un désir presque subi. La situation est différente quand le rapportfait suite à une attirance qui a eu le temps de mûrir. Dans ces cas-là, il s'agit plutôt de la rencontre de deux désirsCe constat est la preuve que le comportement masculin traditionnel perdure : l’homme peut très bien dissocier le plaisir des sentiments. D’un côté, cela signifie que la relation ne repose pas uniquement sur le sexe. De l’autre, que l'homme est capable de se désinvestir lors d’un rapport sexuel.  Il y a une explication physique à cela : le pénisest une excroissance, quelque chose d’extérieur à eux. Lors d’un rapport sexuel, l'homme ne donne jamais qu’un "bout" de lui-même ! Cette spécificité fait que la sexualité au masculin ne nécessite pas d’implication affective : l’homme ne s’investit pas dans le plaisir, et le plaisir ne l’investit pas toujours !En revanche, pendant les rapports sexuels, une hormone appelée la dopamine est sécrétée, qui peut être à l’origine d’un attachement... Et pourquoi pas déboucher sur une véritable histoire d’amour ?" Et mon cul, c'est du poulet ?

La bonne nouvelle

Cette enquête poussée aux frontières de l'extrême menée avec le plus grand sérieux et qui aura eu le grand mérite de m'offrir une séance d'auto-congratulation à peine dissimulée prouve une chose. Aujourd'hui, une femme a le droit d'assumer ses désirs sexuels et de coucher le premier soir sans se prendre le lendemain une volée de bois vert, du moins de la part des mecs. Le concept de fille facile semble être en passe de tomber aux oubliettes des bons vieux clichés #femmeaufoyer #annéescinquante.

La pas très bonne nouvelle

Si tu as les yeux qui pétillent à l'idée d'une jolie histoire en mode conte de fées, à l'instar de 99% de la population féminine, et que tu souhaites malgré tout concilier tes rêves de petite fille et tes idéaux de femme moderne en assumant une sexualité décomplexée... prépare toi à te prendre un certain nombre de râteaux et à envisager une réorientation de carrière en qualité de vendeuse rayon outils de jardinage chez Leroy Merlin.
J'espère que cette petite chronique vous a fait plaisir, en tout cas pour ma part, je suis bien contente d'être revenue en mode Carrie Bradshaw. Pour tout vous avouer... ça me manquait !







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