Si cet automne est le dernier,demandons pardonpour le sac et le ressac de la mer,pour les souvenirs...pour ce que nous avons faitde nos frères avant l'âge du bronze.Nous avons blessé tant de créaturesavec des armes faites des os de nos frères,pour devenir leurs descendants près des sources.Demandons pardonà la harde de la gazellepour ce que nous lui avons fait subirprès des sources,quand un filet de pourpre serpenta sur l'eau.Nous ne savions pas que c'était notre sangqui consignait notre histoiredans les coquelicots de ce bel endroit. Si cet automne est le dernier,unissons-nous aux nuagespour apporter la pluie aux plantes suspenduesau-dessus de nos chants,pour pleuvoir sur les troncs des légendes...sur les mères revenues à leur enfance,pour recouvrer notre récitde conteurs qui ont rallongéles épisodes de la migration.Nous aurions pu les modifier un peuque s'apaisent en nous les cris des palmiers.
Mahmoud Darwich, Nous choisirons Sophocle et autres poèmes (Actes Sud, 2011)
traduit de l'arabe (Palestine) par Elias Sanbar