Continuons notre série rétrospective en remontant à présent à 30 ans. Il y a un peu plus de 30 ans, en effet, s’opérait en pleine guerre froide un conflit interne au bloc occidental, au début du mois d’Avril entre le Royaume-Uni et l’Argentine. Voyons un peu les causes et les conséquences de ce conflit peu connu et pourtant intéressant pour l’époque.
Les Malouines, contexte historique et géographique
A l’origine, les Malouines sont des îles situées à environ 480 km des côtes argentines. Sous domination britannique, elles sont occupées par les descendants des britanniques. Revendiquées par les Français au XVIIIème siècle, elles sont occupées par les Espagnols qui y établissent une colonie pénitentiaire. C’est en 1833 que les britanniques s’en emparent, alors que les argentins indépendants maintiennent leurs revendications sur ces territoires.Il faut ajouter que ces îles sont appelées les Falkland Islands par les anglais.
Argentine et Royaume-Uni : pourquoi la guerre ?
Argentine et Royaume-Uni sont à l’époque dirigés par des « dirigeants de fer ». En effet, l’Argentine est sous l’autorité de la junte militaire de Léopoldo Galtieri, tandis que le Royaume-Uni est mené par la « dame de fer » Margaret Thatcher, peu populaire. Pour le régime argentin, le rêve populaire et national de récupérer ces îles occupées depuis 150 ans permettrait de faire oublier la contestation civile et les difficultés économiques du pays. Pour Margaret Thatcher, clore le chapitre concernant ces îles permettrait de restaurer une popularité perdue à cause de réformes économiques contestées. Réussir une opération militaire lui serait favorable. On a donc là l’exemple concret de deux régimes politiques qui, pour sauver leur politique intérieure, se tourne vers une politique extérieure plus osée.
Les évènements
Malgré des négociations entamées en 1965, rien n’avait réglé le statut de ces îles. Si l’ONU était plutôt favorable à l’Argentine, qui mettait en valeur le droit des peuples à la décolonisation, le Royaume-Uni avait lui aussi des arguments en mettant en avant la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes, sachant que la majorité des habitants de ces îles étaient britanniques. Ainsi la situation restait bloquée, et les britanniques ne souhaitaient pas en changer. Nous l’avons dit, les contextes intérieurs à chaque pays ont eu leur importance dans le processus militaire. Mais aussi important fut le concept géopolitique argentin d’une « Argentine bicontinentale », un projet patriote visant à établir l’Argentine en Antarctique. La récupération des îles Malouines était une étape importante dans la réalisation de cette politique. L’invasion se mit en place dès janvier et mars 1982 après les échecs des négociations. Malgré des signes annonciateurs, les britanniques n’ont pas semblé voir venir une telle attaque. C’est le 2 avril que le destroyer argentin Santisima Trinidad débarqua des forces argentines. Rapidement, le contrôle de l’île fut prit, provoquant la liesse à Buenos Aires. La stupeur et la surprise sont de mise au Royaume-Uni, où cette prise provoque un étonnement scandalisé, même si les Malouines étaient peu connues du peuple britannique. Margaret Thatcher, en bonne « dame de Fer », décide de répliquer à l’attaque. Le conflit provoqua une certaine division quant au soutien à la première ministre britannique, étant donné que certains pays considéraient ce conflit comme colonial. Toutefois, peu donnèrent leur soutien à l’Argentine du fait de son régime, et l’ONU condamna cette « rupture de la paix » à 10 voix contre une. Aussi le peuple britannique suivit sa ministre. Bien que le Royaume-Uni ait toujours voulu une solution diplomatique, la guerre gagna du terrain dans les mentalités. Le 1er mai 1982, l’attaque britannique survient, en raison de l’éloignement des îles. Le Belgrano est notamment coulé le 2 mai. La riposte argentine est lancée à l’aide d’avions, pour protéger le principal point d’ancrage, à savoir Puerto Argentino. Le débarquement anglais occasionne un certain nombre de pertes chez les pilotes argentins. Les conditions sont assez difficiles pour les britanniques, qui doivent rallier des villes à pied et à des températures négatives accompagnées de neige. Les unités argentines sont elles facilement retrouvées, déchirées et fatiguées, grâce notamment à l’aide des USA, du Chili, et malgré les aides Israéliennes et Péruviennes pour l’Argentine. La fin des hostilités est déclarée par les britanniques le 20 juin.
Conséquences
Le bilan humain fut de 255 morts chez les britanniques et de 649 morts chez les argentins. Environs 2 000 soldats des deux camps furent blessés. Mais au-delà du classique bilan humain, on peut dire que cette guerre eut des conséquences politiques. En effet, étant donné la motivation en partie intérieure du conflit, l’issue de celui-ci eu des conséquence sur la politique intérieure de chaque Etat. Au Royaume-Uni d’abord, malgré des démissions, la guerre permit à Margaret Thatcher d’accroître sa popularité, et l’aida à gagner les élections de 1983. Au contraire, la défaite accéléra la chute de la junte en Argentine. Déjà en difficultés économiques et politiques, elle fut remplacée par trois généraux qui assurèrent peu à peu la transition démocratique. Des élections eurent lieu dès 1983, portant au pouvoir Raul Alfonsin. De même, nous pouvons dire que ce conflit interne au bloc occidental remis en question la logique simpliste qui analysait alors les conflits d’époque comme essentiellement idéologiques ou coloniaux. En ce sens, ce conflit fut important dans un contexte de regain d’intérêt pour la géopolitique, rétablie dans tout son intérêt et sa pertinence par Yves Lacoste.Malgré la fin du conflit militaire, rien ne fut vraiment réglé sur le statut de ces îles, qui suscitent à nouveau l’intérêt des argentins du fait des forages britanniques opérés en février 2010. En effet, avec la montée du prix du pétrole, cette zone est devenue rentable et exploitable pour ses hydrocarbures.
Sources :
Les 1001 jours qui ont changé le monde. Flammarion. 960p.
Wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Malouines
La guerre des Malouines(Royaume Uni , 1987, 60mn), réalisé par Peter Kosminsky.
Vincent Decombe